Le Temps-Agences - Israël a procédé hier à l'évacuation manu militari de colons occupant deux maisons à AL Khalil dans une épreuve de force symbolique entre le gouvernement et les ultra-nationalistes. Accueillis par des jets de pierres, d'huile et de peinture, plus de deux cents gardes-frontières ont évacué sans grand mal les deux familles, soutenues par environ deux cents jeunes manifestants. "Malédiction éternelle!", "Vous serez punis de Dieu", "Comportez vous comme des soldats israéliens, les Arabes sont vos ennemis pas nous": retranchés dans les deux maisons, barricadés derrière des murs de béton, les familles et les adolescents ultra-nationalistes ont vilipendé les forces de l'ordre avant d'être traînés dehors. Vingt-sept personnes ont été légèrement blessées, dont près de la moitié de policiers, selon des sources médicales. Cinq manifestants ont été interpellés au terme de quatre heures d'évacuation, a indiqué un porte-parole de la police. "C'est une honte d'en être arrivé là. Ce sont des propriétés juives. Nous jurons de revenir", a lancé le porte-parole des colons d'AL Khalil, Noam Arnon. Arguant de la présence juive à AL Khalil depuis des siècles jusqu'à un massacre commis en 1929 par des Arabes, les colons entendent rejudaïser une partie de la vieille ville et y rendent la vie des Palestiniens difficile dans l'intention de les chasser. L'évacuation de deux maisons de l'ancien marché d'AL Khalil, dans le sud de la Cisjordanie, a pris une dimension symbolique. Pour le gouvernement, il s'agit d'affirmer son autorité après une décision de justice. Le camp ultra-nationaliste a de son côté voulu faire d'AL Khalil un symbole et prouver toute la difficulté d'évacuer ne serait-ce qu'un nombre minime de colons de Cisjordanie. Avant-hier, le commandement militaire israélien avait condamné à des peines de deux à quatre semaines de prison douze militaires qui s'étaient rebellés et avaient refusé "d'expulser des juifs de leurs maisons". Ils ont été exclus des unités combattantes. "La question essentielle n'est pas l'insoumission de ces valeureux soldats mais si Israël restera ou non à AL Khalil ", a déclaré aux journalistes le rabbin Shlomo Aviner, une des principales figures religieuses de la colonisation, opposé à tout retrait. L'opposition de gauche s'est en revanche félicitée de l'expulsion, regrettant que l'Etat en règle générale cède devant les exigences des colons. "L'enjeu est de savoir si une minorité d'extrémistes peut continuer sa rébellion ouverte contre la loi", a affirmé le député Ran Cohen, du parti Meretz. Deux familles comprenant douze personnes avaient finalement décidé de squatter deux logements il y a quelques mois. Elles avaient reçu dimanche un ordre d'évacuation dans les 48 heures. Aux termes d'un accord avec l'Autorité palestinienne, Israël avait évacué 80% d'AL Khalil (120.000 habitants) en 1997, continuant d'occuper une partie du centre ville. AL Khalil est un foyer de tensions permanent entre Israéliens et Palestiniens depuis son occupation en 1967 par l'armée israélienne et l'arrivée l'année suivante d'un premier groupe de colons. En février 1994, un extrémiste juif, Baruch Goldstein, avait massacré 29 Palestiniens.