Trois petits tours et puis s'en vont. L'image nous revient à l'esprit une fois sorti de cette réunion de l'Assemblée générale extraordinaire à laquelle a appelé le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT). A quoi a servi cette réunion décidée suite à la rencontre avec le chef du gouvernement au cours de cette semaine, sinon à permettre à des journalistes qui en ont bavé de l'époque Ben Ali, d'exprimer leur colère quant aux pratiques de ce gouvernement qui veut mettre le grappin sur les médias ? Et même si à l'ordre du jour de cette réunion extraordinaire il était question de parler de la possibilité d'organiser une grève générale dans le secteur de l'information et de ce qui sera décidé de la prochaine action syndicale, les journalistes présents étaient partagés entre ceux qui rêvent , ‘'rêve grandeur nature'' de voir les gens de l'information unir leur rang et entre ceux, plutôt très terre à terre, qui ont compris que les dés sont jetés et que les parties concernées ont déjà tranché sur toutes les questions liées au secteur de l'information.
Reste maintenant à se poser des questions qui nous brûlent les lèvres : les esprits brimés le resteront-ils pour autant ? Ceux qui ont plié l'échine le feront-ils encore une fois ? Les pratiques mafieuses du régime Ben Ali reprendront-ils de plus belle ? Ce serait malhonnête de répondre par la négative car selon les journalistes présents la peur qu'on avait de voir la situation empirer s'est traduite dans les faits. On a cité dans la foulée, la pression exercée par le gouvernement sur les Guignols de la chaîne Ettounssia de Sami Fehri et la pression qu'on exerce aujourd'hui sur les journalistes qui ne parlent pas le même langage du gouvernement dont Sofiane Ben Farhat qui affirme avoir reçu des menaces dernièrement. « Mais ce serait dupe de croire que le gouvernement va descendre de son piédestal pour traiter avec les journalistes et leur offrir la liberté d'expression. Ce gouvernement veut mettre la main non seulement sur les médias publics mais ceux aussi privés. » commente Samir Jarray, journaliste. Le caricaturiste Lotfi Ben Sassi a rappelé qu'il y a deux semaines le ministre nahdhaoui de la Santé « a exprimé publiquement que l'émission “Logique Siassi'' les Guignols version tunisienne, qui adresse une critique acerbe à l'endroit des acteurs de la scène politique, était insignifiante et du coup l'émission a été censurée. Est-ce que chaque ministre nahdhaoui va se donner les prérogatives d'interdire ce que bon lui semble ? » se demande-t-il. D'autres questions restent aussi en suspens et qui ont été également évoquées par l'assistance dont « la crise de confiance qui s'installe entre les journalistes et le gouvernement » ou encore celle « des nominations à la tête de Dar Assabah et la télévision tunisienne considérées motivées par le principe de l'allégeance. »
Un comité de concertation, mieux que rien ?
Retour maintenant à la réunion avec le chef du gouvernement qui a laissé un goût amer sur les lèvres. La présidente du syndicat, Néjiba Hamrouni a rappelé qu'il a été décidé de former un comité de concertation qui fera participer le gouvernement et les syndicats concernés par l'information et dont les travaux commenceront mardi prochain. Mongi Khadhraoui, lui aussi membre du bureau exécutif du SNJT a fait comprendre qu'ainsi étant, le SNJT aura son mot à dire dans les nominations et dans les décisions liées au secteur de l'information. « Qu'on en finisse avec les comités qui font étouffer dans l'œuf des causes justes. » commente une journaliste dans la salle.
Ce qui mérite d'être retenu lors de cette réunion est que les dés sont jetés. Mais une chose est sûre : il est parmi les journalistes présents, des âmes libres, et des plumes décidées de ne jurer que par la liberté d'expression qu'ils arracheront dans une bataille qui s'annonce de sang et de larmes. « Nous avons connu les affres de la prison. On n'a pas peur du harcèlement de ce gouvernement ni de ses pratiques répressives. » commente dans la foulée Zouhaier Zouidi journaliste dans ‘'Ekher Khabar'' (dernière minute). Ces gens-là nous représentent. Ils sont les nôtres. Ils vont mener la guerre pour la liberté d'expression en solitaire si le SNJT se contentera des rencontres protocolaires et sans résultat palpable. Et ce sera contre vents et marrées. Osez prendre le large. Larguez les amarres !!
Mona BEN GAMRA Résolutions du SNJIT
A l'issue de son Assemblée Générale Extraordinaire, le Syndicat National des journalistes tunisiens a décidé de donner au gouvernement un délai allant jusqu'au 15 septembre prochain pour répondre aux revendications des journalistes. Seulement c'est au bureau exécutif du SNJT de décider de la grève générale dans le secteur de l'information.
Le SNJT exige également le respect de la ligne éditoriale de chaque institution de presse et demande au gouvernement l'annulation des derrières nominations dans le secteur.
Il demande, en outre la séparation entre les fonctions administratives et celles liées à la rédaction et condamne le harcèlement dont sont victimes les journalistes.