Tweet Share TUNIS (TAP) - Les journalistes et le personnel de "Dar Essabah" et des membres du personnel de la télévision tunisienne ont organisé, mercredi, à midi, un sit-in à la Kasbah devant le siège de la Présidence du gouvernement. La manifestation, qui a mobilisé plus d'une centaine de personnes, vise à protester contre les récentes nominations décidées par le gouvernement au niveau des directions de la télévision nationale et de la société de "Dar Essabah" qui englobe les quotidiens "Essabah" et "Le Temps". Les journalistes de "Dar Essabah" ont dénoncé, lors de cette manifestation, une tentative de "mainmise politique" par le gouvernement sur "Dar Assabah", soumise désormais, selon leurs déclarations, à "l'allégeance politique" avec la nomination "d'une personne proche du mouvement Ennahdha et qui ne répond pas aux critères d'indépendance et de compétence". Une position reprise et défendue par les représentants du syndicat de base de "Dar Essabah", présents à la manifestation et qui ont souligné que leur média fait l'objet d'un "marchandage en prévision des prochaines échéances électorales", réaffirmant la volonté de défendre l'indépendance de leur ligne éditoriale et d'assainir la situation sociale et professionnelle au sein de leur société. Zied El Héni, membre du bureau exécutif du Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT), a affirmé pour sa part l'appui du SNJT aux revendications des journalistes des deux établissements médiatiques (la télévision et Dar Essabah), déclarant que les récentes nominations constituent une menace pour la liberté d'expression et l'indépendance des médias. Il a dénoncé dans ce cadre "les décisions unilatérales prises par le gouvernement qui a choisi de ne pas consulter préalablement les professionnels du secteur". S'exprimant en sa qualité de journaliste, Kamel Laabidi, ancien président de l'Instance Nationale pour la Réforme de la l'Information et de la communication (INRIC), a regretté "l'absence de mécanismes de concertation et de consultation entre le gouvernement et les médias concernant les nominations et les autres dossiers liés au secteur" malgré des promesses antérieures faites en janvier 2012 par la présidence du gouvernement quant à la mise en place de mécanismes de nomination sur le modèle des pays développés et après concertation avec les parties concernées. Commentant cette manifestation, Ridha Kozdoghli, conseiller auprès du chef du gouvernement, chargé de l'information et de la communication, a rappelé dans une déclaration à la TAP, que la présidence du gouvernement, conformément à la loi, est en droit de procéder à des nominations au niveau des médias pour les postes administratifs et financiers sans pour autant procéder à des concertations au préalable. Il a indiqué, dans ce contexte, que la présidence du gouvernement gère plus de 400 établissements et ne peut à chaque prise de décision consulter toutes les parties concernées, déclarant que dans un tel cas "aucune décision ne pourrait être prise". M. Kozdoghli a également tenu à préciser que les récentes nominations "ne toucheront pas la ligne éditoriale des médias concernées" avançant que les nominations décidées se limiteront, selon lui, aux fonctions administratives et financières des établissements en question. En réponse à une question sur le processus de sélection des candidats aux postes concernés, M. Kozdoghli a affirmé que les critères de compétence et d'expérience ont été pris en considération, ajoutant que la présidence du gouvernement n'intervient pas, par exemple, dans les décisions internes prises par la SNJT. Il a, à cet égard, souligné que les nominations faites par la présidence du gouvernement s'inscrivent dans le cadre de ses prérogatives en tant que représentant de l'exécutif et responsable des administrations médiatiques ou autres placées sous sa tutelle, ce qui correspond aux cas des établissements de la télévision et de "Dar Assabah" où le principal actionnaire est l'Etat. Le conseiller à la communication et à l'information du chef du gouvernement a relevé l'existence d'un déficit de communication et de concertation entre les médias et le gouvernement. Il s'est déclaré disposé à instaurer des mécanismes de consultation entre les deux parties non seulement pour ce qui est des nominations mais aussi pour l'ensemble des dossiers ayant trait aux réformes, à la restructuration, à l'amélioration des contenus, à la formation, à la déontologie, etc.). Au sujet des listes noires des journalistes corrompus, M. Kozdoghli a appelé la SNJT à oeuvrer de concert avec le gouvernement pour venir à bout de cette question, et ce à la faveur de la mise sur pied d'une commission qui aura pour mission d'examiner les listes des deux parties, proposant que les dossiers et la liste des journalistes corrompus soient transmis à la justice, qui statuera sur la question en toute indépendance loin de toute "chasse aux sorcières" ou de règlement de comptes. Il a également évoqué dans ce contexte la question de la "corruption financière" et la multiplication des cas de diffamation que véhiculent certains médias et journalistes après la révolution, appelant à la promulgation d'un code de déontologie, et à la sanction par les instances syndicales représentant les journalistes des cas avérés. Il est à noter que l'agence TAP est parvenue à obtenir, selon des sources bien informées, une information selon laquelle une rencontre pourrait être programmée dans les prochains jours entre des représentants de la SNJT et de l'Association des directeurs de journaux, et la présidence du gouvernement, afin de discuter de la situation des médias en Tunisie. Tweet Share Suivant