Moncef Marzouki, le président provisoire de la République a fini par créer l'évènement par la teneur de son discours lors de la séance d'ouverture de la deuxième phase du dialogue national organisé par l'UGTT. Les langues se délient et ses propos sont repris par tous les journaux électroniques de la place et le lendemain par les quotidiens en version papier. Il va sans dire que le dialogue de sourds s'installe entre un Président de la République et une élite politique qui se revendique du camp progressiste et qui par ailleurs n'écoute que d'une oreille les propos de son interlocuteur. Marzouki qui a parlé de la liberté des uns et des autres de s'habiller comme ils l'entendent, n'a pas été entendu de cette oreille par les démocrates de mon pays. Sauf que là, n'est pas démocrate qui veut et n'est pas progressiste qui le laisse entendre. Pour revenir un peu à ses dires, le président de la République fait remarquer qu'il ne comprend pas et qu'il rejette toute interdiction visant à empêcher les étudiantes en niqab de passer un examen, en expliquant bien avant le nécessaire respect de la différence et des choix idéologiques de tout un chacun. « Je ne comprends pas et je n'accepte pas que l'on prive les étudiantes de leur droit de passer leurs examens en portant le niqab. Je ne comprends pas que des citoyens subissent de la discrimination en raison de leur tenue vestimentaire ou leur manière de pratiquer leur religion. » dit-il. Chose qui a provoqué l'indignation de l'assistance qui l'a huée. Certains ont même quitté la salle en signe de désapprobation de ces propos qui ont dû choquer les oreilles de plus d'un. Alors que reproche-t-on à Marzouki ? On ne lui pardonne pas pour commencer le fait qu'il soit un président de la République…lui, dont les prises de position reflètent un esprit conservateur qui ne peut en aucun cas flatter l'oreille d'une élite libérale. On lui reproche cette fois le fait qu'il ait exprimé un avis personnel sur une question que la loi tunisienne y a donné son dernier mot. Les conseils scientifiques ayant refusé aux niqabées le droit à l'enseignement public et le tribunal administratif ayant rejeté par deux fois la requête des niqabées pour avoir ce droit. Point. Un scandale , selon Emna Mnif La présidente de l'association Kolna Tounes, Emna Mnif qui réagit sur les ondes de Radio Mosaique FM commente à ce propos « Le discours concernant le droit des niqabées dans les universités est une dévalorisation totale de la loi et des décisions des conseils universitaires. » dit-elle en ajoutant « ce discours est un scandale qui entre dans le cadre des surenchères politiques , dont les victimes sont la constitution et le peuple tunisien. » Par ailleurs, le camp conservateur a approuvé cette prise de position, qui donne son droit à la Tunisienne quelle que soit son appartenance religieuse de vivre pleinement sa citoyenneté. « Ben Ali a fait des femmes voilées des demi-citoyennes. Aujourd'hui on veut priver les niqabées de leurs droits à l'enseignement public. On parle d'un point de vue droit humain surtout que les niqabées ont fait des concessions en acceptant de se dévoiler le visage pour des raisons de sécurité. » nous dit Seifeddine Kaouache, porte parole du comité de la défense des niqabées à la faculté des sciences qui se demande comment est-ce qu'on peut refuser aux autres ce qu'on revendique à soi quand on est démocrate. « Cesdits démocrates rejettent les valeurs de la démocratie, à savoir le respect de la différence. On nous refuse à partir du moment où on n'adopte pas leurs idées. » dit-il. Rappelons, dans la foulée, que le comité de soutien aux niqabées est en sit-in ouvert depuis plus de deux mois et qu'il a organisé plusieurs manifestations pacifiques pour revendiquer le droit des niqabées à l'enseignement public. Chose qui semble bien tomber dans l'oreille d'un sourd. Alors, Parlez pour que je puisse vous voir'' messieurs dames les défenseurs des libertés individuelles et collectives ?