Le 27 juillet 2013, soit deux jours après la «fête» du 56ème anniversaire de la République, était une journée de deuil national. Une journée chargée en émotion, en dolence, en haine et en révolte. Hier, les centaines de milliers de Tunisiens, inconsolables, ont dit un dernier au revoir à une autre figure emblématique dans le paysage politique, l'élu Mohamed Brahmi. Deuxième victime politique pour ses idées et son appartenance à l'Opposition, le défunt a connu le même sort que son prédécesseur dans cette aventure fatale : Chokri Belaid. Pis encore, notre regretté Mohamed Brahmi a été criblé de 14 balles le matin-même de la fête de la République ! L'ultime périple d'un opposant
Connu pour sa sagesse, sa grandeur d'âme et d'esprit et pour ses prises de position longuement réfléchies, le martyr Brahmi, seconde victime d'un assassinat politique en pleine journée et devant chez lui, a quitté à jamais sa demeure pour celle qui sera, désormais, son ultime havre de paix. Comme l'a annoncé son fils Adnene, la dépouille de la victime a quitté la maison familiale située à Cité Ghazella aux environs de 9h30. Les lieux étaient surpeuplés par plusieurs centaines de Tunisiens entre membres et proches de la famille, voisins, société civile et hommes et femmes politiques, hormis la présence des trois présidents provisoires, dont la présence était radicalement refusée par l'épouse du martyr et de ses enfants. L'atmosphère était lourde, triste, morose et trop émouvante. Les pleurs se mêlaient aux youyous des femmes qui accompagnaient un martyr de la nation. Digne de l'homme qu'il était, les funérailles étaient grandioses et pompeuses. Un charre de l'armée transportait le corps de notre second martyr. Un charre guidé par la veuve de Mohamed Brahmi et sa fille aînée. Le cortège avançait difficilement. Des dizaines de milliers de manifestants ont répondu présents et ont tenu à accompagner le charre jusqu'au cimetière, véhiculés ou à pieds. Ni le soleil, ni le jeûne ne les ont empêchés d'avancer vers le cimetière El Jallez. Hymne national, psalmodies et protestation Toute personne ayant assisté aux funérailles nationales de Feu Chokri Belaid et accompagné le cortège du martyr aurait surement eu un déjà vu, vécu et ressenti en ce jour de deuil qu'était le samedi 27 juillet 2013. Les mêmes slogans, les mêmes revendications, la même révolte et haine ont accompagné les obsèques du regretté Mohamed Brahmi. Après avoir quitté la demeure du martyr, le cortège est passé par la Place des Droits de l'Homme où d'autres centaines de milliers de manifestants attendaient impatiemment l'arrivée de la dépouille. Le drapeau tunisien était hissé haut dans les cieux, le portrait de Chokri Belaid était mêlé à celui de Farhat Hached et celui de notre dernier regretté Mohamed Brahmi. Accusant le gouvernement d'être dépassé, incompétent voire complice de ces crimes politiques à 6 mois d'intervalle sans qu'il y ait de réelles prises de position ou d'arrestation des meurtriers. Parcourant ensuite l'avenue Habib Bourguiba, le cortège a été rejoint pas des milliers d'autres manifestants venus en nombre pour accompagner Feu Mohamed Brahmi à sa dernière demeure. On était 11h30 quand le charre est arrivé au cimetière où repose désormais le corps de notre cher regretté et père de 5 enfants. Il aura pour compagnons célestes et éternels les martyrs d'ores et déjà enterrés dont récemment Chokri Belaid. Désormais, voisins outre-tombe, les deux reposent dans le carré consacré aux martyrs. La foule était immense. Un élan de solidarité, de recueillement mais qui était interrompu de temps à autre par les pleurs, les cris et quelques tensions. Les élus de l'Opposition, les représentants de la société civile, les grandes figures emblématiques étaient elles aussi sur place pour accompagner le martyr Mohamed Brahmi à sa dernière demeure. L'émotion était au rendez-vous, l'on voyait ces visages défigurés par le deuil, le choc et la fatalité de cette mort. Les présents n'ont pas déclaré forfait. Le rendez-vous depuis tôt le matin, a été donné. Juste après avoir rendu un dernier hommage à un des héros de la nation, les manifestants se dirigèrent à l'ANC.