L'ivresse des sondages ? Aucun média ou presque n'y a échappé. Les analyses qui critiquent et prennent pour monnaie courante les résultats des sondages offraient une matière journalistique bien loin de la réalité. Sauf que là l'article 67 de la loi électorale est venu arrêter l'hémorragie des chiffres pour un silence électoral qui mettra à égalité de chances toutes les parties politiques. « Il est interdit de diffuser ou publier pendant la campagne électorale ou pour le référendum ainsi que pendant la période de silence électoral, les résultats de sondages directement ou indirectement liés aux élections et aux référendums, ainsi que les études et commentaires journalistiques relatifs au sondage d'opinion par différents médias. » stipule l'article 67 de la loi électorale qui interdit toute diffusion de statistiques en période électorale. Les sondages d'opinion disparaissent en cette période censée nous étouffer de chiffres et de statistiques qui fusent de toutes parts pour devenir et ce, selon plusieurs observateurs et politiques, de moins en moins crédibles. Et si les statistiques manquent horriblement de professionnalisme, c'est qu'ils ouvrent des portes à la corruption pour manipuler l'opinion publique. La loi est pourtant silencieuse quand il s'agit de publier les résultats des sondages d'opinion dans des réseaux sociaux comme Facebook ou quand il est question de médias étrangers qui planchent sur le sujet. Le sondage d'opinion aurait été vraiment un outil efficace s'il avait été utilisé à bon escient comme moyen de permettre d'avoir le feedback d'un fait social ou d'un évènement. Un moyen pour connaître l'opinion publique et non pas pour essayer de l'orienter, voire la manipuler ou plutôt s'en moquer avec des résultats aussi invraisemblables les uns que les autres. C'est que sans observer les critères de transparence et de crédibilité un sondage d'opinion ne peut en aucun cas être un outil pour informer l'opinion publique mais plutôt pour l'induire en erreur avec de fausses allégations et de données pompeuses. En l'absence d'une loi qui réglemente les sondages la question de la crédibilité des statistiques reste tributaire de la bonne volonté des sociétés de sondage et également des orientations politiques des uns et des autres. Et là encore l'argent fait des miracles. Des pièces sonnantes et trébuchantes sauront amener les plus hostiles à se ranger et à se taire... Le silence électoral prévu cette année, durera presque trois mois alors qu'en 2011 la période n'avait duré que 23 jours à compter du 1er octobre 2011. Sous d'autres cieux le délai du silence électoral s'étend entre un jour et un mois. « Seize des vingt-sept pays de l'Union européenne interdisent la publication des sondages avant le jour du scrutin, bien que ces délais d'interdiction s'étendent d'un mois complet à seulement 24 heures avant le jour en question. Seuls trois pays – l'Italie, la Slovaquie et le Luxembourg – en interdisent la publication plus de sept jours avant. Dans de nombreux pays européens, des difficultés juridiques survenues au cours des dernières années ont réduit la période d'application de l'interdiction. » toujours selon l'analyse du « Political Opinion Polls » « Les Etats-Unis considèrent quant à eux que la couverture médiatique des sondages d'opinion fait partie intégrante de la liberté d'expression dans les élections, leur publication étant autorisée à tout moment. Le problème est que les résultats de sondages d'opinion, comme toute autre forme d'expression, ne représentent pas simplement l'opinion des personnes consultées, mais risquent également d'orienter les opinions d'autres personnes. En clair, le vote peut être influencé par ce que ces personnes ont appris dans le sondage d'opinion...ou pensent en avoir appris. » Pourtant dans les années 1930, l'Américain George Gallup, le pionnier des sondages d'opinion, a parlé d'un outil formidable pour favoriser la démocratie, évidemment, selon la conception américaine de la réalité... On sait aujourd'hui que le sondage d'opinion appliqué à la politique a trahi ce rêve américain qui vire aujourd'hui au cauchemar. La production des sondages ainsi que l'usage qui en est fait est remis en cause par des spécialistes qui révèlent notamment la non-fiabilité des résultats à cause des techniques utilisées et par le refus croissant des citoyens de répondre aux sondeurs. Mais aussi par appartenance politique voire idéologique laquelle reste à la solde du pouvoir de l'argent. Ceux qui détiennent les grands capitaux détiennent l'opinion publique. Soyons vigilants.