Le vote utile a constitué la stratégie de campagne de Nida Tounes dans les dernières élections et servi à départager les candidats que ce soit aux législatives ou bien à la présidentielle. C'était le mot d'ordre qui a déterminé le comportement du plus grand nombre des électeurs. Ces derniers se sont inscrits dans cette logique pour écarter du pouvoir le parti qu'ils prennent pour responsable de la crise inédite qui a paralysé le pays pendant les années passées au pouvoir. Mais cette volonté est-elle respectée par ceux qui ont bénéficié de leurs voix ? Ou bien elle est troquée contre des arrangements politico-politiciens ? Le contrat moral Les déclarations de certains responsables du parti majoritaire sont favorables à cette deuxième thèse. En témoigne, par exemple, celle de Lazhar Akermi, sur le plateau du « 8ème jour » du vendredi dernier, qui n'émet aucune objection quant à la participation d'Ennahdha au nouveau gouvernement, soulignant qu'en politique ce qui prime c'est le consensus, la seule voie d'apaisement du climat. Mais, cette étape n'est-elle pas dépassée ? Les élections ne sont-elles pas venues suppléer à ce procédé, réservé aux états de crise, et détendre l'atmosphère? Les élections instaurent une démocratie fondée sur des volontés libres qui départissent, pacifiquement, les concurrents, en désignant des vainqueurs et des vaincus. Mais, apparemment, ce n'est pas de cette oreille que l'entendent certains leaders d'Ennahdha, à l'instar d'Imed Hammami avançant qu'exclure son parti du pouvoir serait synonyme de push !!! Dans ce cas, les élections, la voie démocratique par excellence, en seraient un. Pour revenir à Lazhar Akermi, le chroniqueur, Sofiène Ben Hamida, a insisté pour obtenir de lui une réponse précise à la question, posée par l'animateur de l'émission, qu'il a éludée, et se rapportant à sa position vis-à-vis au choix entre les partenaires du Front de salut National et Ennahdha quant à la participation au gouvernement de Habib Essid, tout en lui faisant savoir que Nida Tounès est tenu par un contrat moral envers ses électeurs. Mais, au lieu de lui fournir les précisions escomptées, il lui a opposé un sophisme, reléguant au dernier plan cette question primordiale et qui risque de discréditer son parti auprès de ces derniers. Il est à noter que les réserves formulées contre Ennahdha proviennent d'un certain nombre de députés et de leaders tels que Abdelaziz Kotti, Slah Bargaoui et le directeur exécutif, Boujomâa Remili, qui, commentant la position du conseil de la Choura de cette dernière, souligne que son appel à un gouvernement élargi n'est pas quelque chose de nouveau, puisqu'elle a, auparavant, avant les élections parlementaires, réclamé la constitution d'un gouvernement d'unité nationale. L'ombre de la Troïka Remili, qui rappelle que les partis qui se considèrent comme étant proches de Nida Tounes posent comme condition sine qua non de leur participation au prochain gouvernement l'exclusion d'Ennahdha, laisse entendre que cette dernière veut le beurre et l'argent du beurre, puisqu'en plus de sa participation au gouvernement, elle tend à exiger l'impartialité des ministères régaliens. Comme si elle avait souscrit à cette exigence lorsqu'elle était au pouvoir. D'après lui, les quelques intérêts que pourrait récolter Nida Tounes de la présence d'Ennahdha dans le futur gouvernement sont insignifiants comparés aux préjudices énormes qu'il risque de subir au cas où il tournerait le dos à ses électeurs et n'honorerait pas ses engagements à leur égard, ce qui serait un vrai push électoral. Cet éventuel manque de crédibilité pourrait compromettre, très sérieusement, les chances de Nida Tounes dans les élections municipales qui sont à nos portes. Il ressort des remarques faites par son directeur exécutif que l'engagement dans cette voie empruntée par sa direction est synonyme de suicide politique. Plusieurs observateurs y voient l'ombre de 2011 où le quota partisan était de rigueur. Décidément, les dissensions dans Nida Tounes s'approfondissent et se multiplient, étant donné qu'après les divergences apparues à la suite de la désignation de Habib Essid, en voilà d'autres qui se profilent à cause du feu vert donné à d'Ennahdha, concernant sa participation au gouvernement. La logique électorale et démocratique dit qu'un parti qui a remporté les élections doit respecter les promesses qu'il a faites à ses électeurs et assumer, pleinement, ses responsabilités pour gouverner le pays. Les tergiversations et les choix inappropriés ne peuvent que lui attirer des ennuis aussi bien en son sein qu'en dehors...