Le Temps-Agences- La menace turque d'une incursion militaire contre les bases rebelles kurdes dans le nord de l'Irak restait entière hier malgré les efforts diplomatiques, notamment un geste d'apaisement de Bagdad qui n'aurait pas exclu de remettre à la Turquie des séparatistes kurdes. Des responsables civils et militaires turcs devaient évoquer la riposte aux attaques des rebelles kurdes lors d'une réunion régulière du Conseil national de sécurité (MGK) qui s'est ouverte hier à Ankara, avant des entretiens aujourd'hui dans la capitale turque avec une délégation irakienne. La visite avant-hier à Bagdad du chef de la diplomatie turque Ali Babacan a provoqué des premières mesures de la part de l'administration irakienne qui a interdit en Irak les activités du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatiste) et décidé de fermer ses bureaux. Dans le passé, les bureaux du PKK avaient été fermés dans la zone kurde avant d'être rouverts peu après, souligne-t-on toutefois à Ankara. Le président irakien Jalal Talabani a aussi indiqué au chef de la diplomatie turque, que des rebelles kurdes réclamés par la Turquie pourraient lui être livrés, selon une source gouvernementale turque sous couvert de l'anonymat. "Je n'exclus pas la remise de membres de l'organisation terroriste PKK", a dit M. Talabani à M. Babacan, selon cette source. "Si cela se réalise il s'agira d'un premier pas positif" de la part de Bagdad a commenté le ministre turc, selon cette source, alors que l'Irak avait auparavant écarté une telle éventualité. La Turquie a transmis à Bagdad en début d'année une liste comprenant les noms d'une centaine de membres du PKK, réfugiés dans le Kurdistan irakien. Mais le gouvernement turc n'a pas l'intention pour autant de baisser les bras et continue d'agiter la menace d'opérations contre les rebelles. M. Babacan a rejeté avant-hier une offre de trêve conditionnelle faite la veille par le PKK et qui s'inscrit pour Ankara dans la ligne d'autres cessations d'hostilités qui avaient été suivies systématiquement de nouvelles attaques. Même si Ankara annonce vouloir privilégier la diplomatie, à l'heure actuelle, l'option militaire est toujours sur la table. La présidence du Kurdistan d'Irak, accusée par Ankara de soutenir les rebelles, a appelé hier le PKK, qui se bat depuis 1984 contre le pouvoir central turc, à mettre fin à la lutte armée. Il s'agit de l'engagement le plus clair depuis le début de la crise de la part du gouvernement régional autonome kurde qui contrôle la zone où sont installées les bases du PKK. Ankara ne reconnaît comme interlocuteur que le gouvernement de Bagdad et l'engagement risque d'avoir peu d'effet sur les Turcs. La question des huit soldats turcs que le PKK affirme avoir capturés et dont les photos ont été publiées avant-hier place le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan dans une position délicate face aux pressions de l'opinion publique et de l'opposition parlementaire qui crient vengeance. Les Etats-Unis, qui craignent qu'une incursion turque ne déséquilibre une des seules régions relativement calme de l'Irak, se sont engagés auprès d'Ankara et de Bagdad pour tenter de trouver une solution à la crise.