L'appel pressant à une fiscalité équitable fait partie des revendications de la Révolution. Répartition inégale de la richesse nationale, des pauvres qui paient pour les nantis, une pression fiscale lourde qui représente plus de 21% du PIB. Les salariés continuent d'être le dindon de la farce avec ployant sous une contribution intenable dépassant les 80% au titre d'impôts directs. Aujourd'hui et après plus de quatre ans de la Révolution, la réforme fiscale « somnole » et l'égalité fiscale espérée n'est toujours pas à l'ordre du jour du gouvernement. Pourtant la réforme fiscale est une condition sine-qua-none à l'amélioration des finances publiques, toujours en léthargie. Le FMI parle de régime fiscaux sous performants et non équitables dans la région MOAN (Moyen Orient et Afrique du Nord) et présente sa vision pour une fiscalité plus équitable. Le Fonds Monétaire International vient de publier une note de réflexion intitulée : Fiscalité équitable au Moyen Orient et Afrique du Nord (MOAN). La note établie par Andrew Jewell, Mario Mansour, Pritha Mitra, et Carlo Sdralevich1 du département Moyen Orient et Asie Centrale du Fonds traite des moyens à même d'améliorer les régimes fiscaux dans la région. « Les recettes fiscales des pays de la région MOAN sont restées stationnaires ces vingt dernières années tandis que celles des pays émergents et en développement ont suivi une forte tendance à la hausse », soulignent les auteurs de l'étude. La Tunisie fait partie de la catégorie des pays qui ont des régimes fiscaux bien établis et ne reposant pas sur les hydrocarbures. Selon les données avancées dans la note, la Tunisie arrive en tête du peloton de la région en termes de recettes fiscales avec un ratio de 22.5% du PIB hors pétrole et un niveau de recette fiscale dépassant les 7% du PIB hors pétrole au titre d'impôts directs. La part des recettes provient de l'impôt sur le revenu des personnes physiques est de 4.6% contre 2.6% pour les impôts sur les sociétés. Par ailleurs les recettes fiscales provenant des échanges commerciaux et du secteur foncier ne dépassent pas la barre de 1.5% du PIB hors pétrole. En Tunisie, les retenues à la source sur les personnes physiques sont a priori parmi les plus lourds de la région après la Mauritanie. Les services du FMI viennent proposer l'élargissement de l'assiette de l'impôt et la simplification de la structure des taux de TVA et des taxes sur les échanges internationaux outre la simplification de l'IS et la réduction des exonérations y afférentes, notamment pour les secteurs off-shore. Le secteur on-shore victime de favoritisme en Tunisie Pour le cas de la Tunisie, les auteurs de l'étude déplorent la dualité du modèle de développement on-shore et off-shore. Un généreux régime fiscal au profit des entreprises off-shore qui n'a pas entraîné de conséquences positives. Au contraire, la dualité entre les secteurs on-shore et off-shore a engendré les inégalités d'accès aux perspectives économiques notamment en matière de création d'emplois à forte valeur ajoutée. « Les taux moyens de pauvreté sont restés quatre fois plus élevés à l'intérieur du pays que dans les régions plus riches où se trouvent les sociétés offshore.... Le généreux régime fiscal fait sur mesure pour les entreprises offshore a attiré notamment des investissements dans des activités de montage, ce qui a entraîné une industrie manufacturière et des exportations à faible valeur ajoutée », note l'étude. Et d'ajouter : « l'absence de transfert de technologie et de savoir-faire entre le secteur offshore et le reste de l'économie a lésé le secteur on-shore et l'a maintenu isolé du reste de l'économie et victime de favoritisme, de privilèges, et de recherche de rente ». Un taux unique d'imposition sur les sociétés 15-20% ? L'institution de Bretton woods milite pour une convergence totale des deux régimes en Tunisie. « La convergence vers un taux unique d'imposition des entreprises de 15-20% signifierait un taux toujours inférieur à ceux des pays comparables de la région, ce qui maintiendrait ainsi la compétitivité de la Tunisie tout en assurant un régime plus équitable et plus efficient ». En ce qui concerne l'IRPP (Impôt sur le revenu des personnes physiques), le FMI recommande de renforcer sa progressivité. Les services du fonds recommandent par ailleurs au pays de la région dont la Tunisie de recourir aux taxes foncières pour renforcer la progressivité de l'ensemble du régime, de renforcer l'administration fiscale et douanière et d'améliorer les structures institutionnelles et juridique. Pour l'instant la réforme fiscale engagée par le gouvernement ne fait pas l'unanimité et le chemin reste encore semé d'embûches.