La Bibliothèque nationale de Tunisie organise du 20 au 22 janvier une rencontre-hommage à Tahar Haddad, 80 ans après sa mort. Plusieurs universitaires participeront à cet événement dans le cadre d'un colloque et d'une table-ronde. De plus, le film "Thalathoun" de Fadhel Djaziri sera projeté au cours de cette commémoration du père de l'émancipation féminine en Tunisie. De son vivant, Tahar Haddad a publié deux livres d'une grande importance. Le premier s'intitule "Les ouvriers tunisiens et la naissance du mouvement syndical". Plus connu, le second ouvrage a pour titre "Notre femme dans la législation musulmane et la société". Ces deux livres ont respectivement paru en 1927 et 1930. Ils vaudront à leur auteur, surtout le second ouvrage, la postérité mais aussi une mise à l'index jusqu'à sa mort. Ce dernier livre sera par contre le socle du Code du statut personnel dont nous sommes si fiers car il affirme notre singularité dans le monde arabe. C'est aussi dans l'oeuvre de Haddad ( et dans l'action de son compagnon M'hamed Ali El Hammi) que réside l'essor du syndicalisme tunisien. Résonances actuelles de la pensée de Tahar Haddad L'hommage de la Bibliothèque nationale intervient 80 ans après la mort de Haddad, quelques semaines après que celui-ci ait été décoré à titre posthume par le président de la République et salué par de nombreuses rencontres intellectuelles. Cet hommage se déroulera du 20 au 23 janvier et s'articulera autour de plusieurs temps forts. L'ouverture sera l'occasion de découvrir le film "Thalathoun" de Fadhel Djaziri, une oeuvre dans laquelle le réalisateur revient sur le parcours de Tahar Haddad, tout en brossant le portrait de la jeunesse tunisienne des années trente. Ce film sera projeté en présence du réalisateur qui, certainement, dira son rapport à cette époque et sa lecture de l'oeuvre et du destin de Tahar Haddad. Notons qu'une stèle commémorative sera inaugurée à l'occasion de ces rencontres et devrait demeurer à la Bibliothèque nationale, aujourd'hui dirigée par Raja Ben Slama. La pièce maîtresse de cette manifestation sera sans doute le colloque scientifique qui réunira de nombreux universitaires de toutes les disciplines. Historiens, philosophes et sociologues se pencheront sur l'oeuvre du père du Code du statut personnel après une ouverture qui sera présidée par Faouzi Mahfoudh, Chokri Mabkhout et Raja Ben Slama. Le colloque se déploiera en trois mouvements successifs. En premier lieu, c'est la conception de l'histoire chez Tahar Haddad qui retiendra l'attention des participants avec des communications de Leila Blili, Hédi Timoumi, Noureddine Douggui et Adel Ben Youssef. Ensuite, ce sera le thème de la femme et du féminisme qui sera au coeur des travaux avec les interventions de Dalenda Largueche, Lotfi Chaibi, Mohamed Dhiffallah et Leila Dakhli. Enfin, le colloque se concluera avec un ensemble consacré aux résonances de la pensée de Tahar Haddad, avec Fadhila Laouani, Lotfi Aissa, Raja Farhat et Julien Widmann. La pensée de Haddad entre l'histoire et le patrimoine La réflexion autour de Haddad et son oeuvre se poursuivra avec une table-ronde qui sera animée par Abdelmajid Charfi, le nouveau président de l'Académie Beit el Hikma. Encore une fois, la pluridisciplinarité sera de rigueur avec la participation d'une quinzaine d'intervenants qui auront à débattre du thème :"La pensée de Haddad entre Histoire et Patrimoine". Il faut noter que les termes arabes de "Tarikh" et "Tourath" qui sont les deux pôles de cette table-ronde sont polysémiques et que la traduction littérale par "Histoire" et "Patrimoine" ne recouvre pas complètement leur sens. Une discussion qui promet d'être passionnante vu la qualité des intervenants et aussi l'acuité de cette thématique dans notre rapport à l'héritage ou la pensée contemporaine. A tout prendre, cet hommage de trois jours est une belle manière de commencer l'année du côté de la Bibliothèque nationale même si de nombreuses voix auraient préféré une rencontre plus ouverte, moins universitaire et plus chevillée aux enjeux contemporains qui continuent à se poser à la pensée zeitounienne. En quelque sorte, le programme de cette rencontre autour de Haddad dédramatise le personnage, exfiltre les cabales et les carcans qui le malmenèrent. Est-ce une manière d'aborder son oeuvre sous de nouveaux éclairages? Nous le saurons en suivant ces débats qui s'annoncent passionnants. Enfin, notons qu'une exposition documentaire sera présentée au public et comportera des livres, des photographies et d'autres documents.