La présidente de l'Instance Vérité et Dignité, Sihem Ben Sedrine, a indiqué, hier, lors d'un point de presse au siège de l'IVD, à Tunis, qu'à la suite de la signature de l'accord cadre de réconciliation entre l'Etat tunisien en tant que victime et Mohamed Slim Chiboub, en tant qu'auteur d'un acte de corruption et de malversation aux dépens de l'Etat, comme il l'a reconnu dans la demande de réconciliation présentée à l'IVD, le procureur général suisse a décidé la levée du gel des avoirs de Slim Chiboub dans les banques suisses et leur transfert par le biais de l'Instance Vérité et Dignité au profit de la trésorerie générale de l'Etat tunisien. Elle a indiqué que l'opération de transfert attend la remise à la partie suisse du numéro de compte courant tunisien au profit duquel sera effectué le versement, émettant l'espoir que cette formalité sera accomplie, dans les meilleurs délais, en coordination avec le secrétariat d'Etat aux Domaines de l'Etat. Elle a signalé que le jugement définitif concernant ce dossier sera pris le 5 novembre après plusieurs reports à la demande du chef du contentieux de l'Etat. Khaled Krichi, président de la commission d'arbitrage et de réconciliation relevant de l'IVD qui examine les dossiers d'arbitrage et de réconciliation, a souligné que la levée du gel et le transfert a été prise à l'initiative de Slim Chiboub qui a voulu montrer ainsi sa bonne volonté et en tant qu'avance sur la somme globale qu'il devrait remettre à l'Etat. Il a noté que l'accord avec Slim Chiboub a été rendu possible parce qu'il a accepté les conditions mentionnées dans le formulaire modèle de demande de réconciliation que tout demandeur de réconciliation parmi les coupables doit remplir et présenter à l'Instance, s'agissant tant des atteintes aux droits de l'homme que des atteintes concernant la corruption et la malversation. Ces conditions sont la reconnaissance d'avoir commis les forfaits objet de la demande de réconciliation, la déclaration du montant réalisé grâce à la corruption et à la malversation, la présentation des excuses au peuple et à l'Etat tunisien, l'acceptation du jugement de l'Instance qui ne peut être contesté et l'engagement à participer aux auditions publiques organisées par l'IVD sur les dossiers qui lui avaient été adressés, et ce conformément à l'article 46 de la loi relative à la justice transitionnelle. Il a signalé que Slim Chiboub avait été le seul à demander une réconciliation selon la demande modèle ajoutant que d'autres ont présenté des demandes ordinaires de réconciliation et que quelques uns qui se comptent sur les bouts des doigts ont demandé une réconciliation selon le formulaire modèle mais leur demande a été refusée du fait du refus de la réconciliation par l'autre partie concernée. Il a annoncé le démarrage des audiences publiques en matière d'arbitrage et de réconciliation le 18 novembre 2016, ainsi que la décision de l'Instance Vérité et Dignité de déposer des plaintes auprès de la justice contre tous ceux qui se sont rendus coupables de fuites sur ces dossiers, notamment des fuites relatives à des noms et à des données personnelles. Le point de presse a permis, en outre, de fournir des statistiques sur le travail de la commission d'arbitrage et de réconciliation et sur le nombre des dossiers qu'elle a examinés. Au total et jusqu'au 30 septembre 2016, l'IVD a reçu 62 mille dossiers dont 5579 dossiers ayant trait à l'arbitrage et la réconciliation réparties entre 1897 dossiers intéressant des atteintes aux droits de l'homme et 3682 relatifs à des actes de corruption et de malversation. La commission en a examiné 1594. L'Etat a transféré en tant que victime 685 dossiers. 78 dossiers ont été refusés dont 59 refusés par le chef du contentieux de l'Etat aux dépens du ministère de l'Intérieur, du ministère de la Justice, du ministère de l'Education, du ministère des Domaines de l'Etat, et du ministère de l'Equipement, soit 75% des dossiers refusés. La présidente de l'IVD a souligné que l'Instance observe la neutralité totale en matière d'arbitrage et de réconciliation et elle ne prend parti ni pour la victime ni pour l'accusé de sorte que chaque partie présente ses preuves et ses arguments, puis la commission d'arbitrage et de réconciliation prend sa décision à la lumière de tout ceci, de sorte que la réconciliation exige l'accord des deux parties et leur acceptation du principe de la réconciliation. Lorsqu'une partie sollicitée à accepter une réconciliation et qu'elle refuse, le dossier est alors transféré à la commission d'enquêtes et d'investigations de l'IVD qui l'examine avant de le transférer à la justice. Khaled Krichi a indiqué que quelques victimes d'atteintes aux droits de l'homme ont présenté des demandes de réconciliation, mais, chose bizarre, l'autre partie, c'est-à-dire les bourreaux, a refusé la réconciliation.