Stéphane Richard, directeur général du groupe, a confirmé, jeudi 29 juillet à l'occasion de la présentation des résultats semestriels de l'opérateur du téléphone, avoir entamé des discussions avec Canal+, le groupe News Corp. De Rupert Murdoch et la Ligue de football professionnel (LFP). Orange négocie leur entrée aux tours de table de ses chaînes Orange Cinéma séries et Orange Sport. A l'examen, le retrait annoncé d'Orange des contenus audiovisuels ne fait pas plaisir à tout le monde. "C'est toujours embêtant qu'un acteur s'en aille", déplore le patron d'une chaîne commerciale. Surtout au profit de Canal+. Ce patron redoute les effets néfastes, pour les chaînes en clair, de "la concentration dans la télévision à péage". Un rachat des chaînes d'Orange par Canal+ pourrait en effet peser directement sur les audiences des programmes des télévisions généralistes. "Nous préférons qu'une série soit achetée et diffusée sur Orange plutôt que par Canal+, car elle y est moins vue" sur la première, et grignote donc moins d'audience potentielle pour les généralistes. Orange Cinéma Séries et Orange Sport rassemblaient fin juin, selon Stéphane Richard, 752 000 abonnés, contre plus de 5 millions à Canal+. Pour les télévisions généralistes, à coup sûr, un rachat des chaînes d'Orange par Canal+ "renforcerait le monopole de fait" de la chaîne cryptée sur la télévision à péage. Les conséquences seront immédiates. "Les gens du cinéma vont se mordre les doigts d'avoir maltraité Orange", estime-t-on dans une grande chaîne. Il y a plusieurs mois, après des discussions marathon, l'opérateur de téléphonie s'était engagé à investir dans le cinéma français 80 millions d'euros sur trois ans. Ce retour au monopole de Canal+ "ne fera pas forcément plaisir aux gens du cinéma français comme américain", renchérit Philippe Bailly, président du cabinet d'études NPA Conseil. Outre pour le cinéma, un retrait d'Orange aura aussi des répercussions sur le monde du football, la première motivation d'abonnement à la télévision à péage. La LFP envisage de créer sa chaîne pour compenser les 200 millions d'euros versés par Orange jusqu'en 2012. Pas sûr que, redevenu client quasi unique de la LFP, Canal+ accepte toujours de verser plus de 400 millions d'euros pour diffuser les droits de la Ligue 1. Pour la chaîne cryptée, une telle opération lui permettrait de faire disparaître un concurrent. Après TPS, Orange serait le second opérateur à s'être essayé, sans succès, à installer une rivalité dans la télévision à péage. En rachetant les chaînes d'Orange, Canal+ va aussi mettre la main sur les 752 000 abonnés des chaînes d'Orange. Une manne providentielle alors que le coût de recrutement de nouveaux abonnés s'accroît, pour atteindre entre 300 et 350 euros. Pour tenter de réintroduire une certaine concurrence, M. Bailly suggère d'organiser une manière de "dégroupage des chaînes". En pratique, faire en sorte que certaines des chaînes thématiques parmi les plus attrayantes soient accessibles par les concurrents ADSL de Canal+, comme Free ou même Orange. Déjà, la chaîne Disney Channel, filiale du groupe américain, a choisi d'en finir avec l'exclusivité qui la liait depuis de longues années avec CanalSat, le bouquet numérique de Canal+. Dès mars 2011, la chaîne pourrait aussi être disponible sur les réseaux de Neuf-SFR et Orange. Parmi la concurrence, on doute que "cette opération se fasse" au profit de Canal+ car la chaîne cryptée "va se retrouver dans une position dominante sur le marché de la télévision à péage". Cela justifie "un nouvel examen par l'autorité de la concurrence", estime M. Bailly.
Source : le Monde « Télévision payante : le retrait d'Orange remet Canal+ en position de force »
