Après la mort par injection léthale, à 5h08 ce jeudi matin, aux Etats-Unis, de Troy Davis, ce Noir accusé du meurtre d'un policier blanc qui a clamé son innocence jusqu'au bout, les réactions se multiplient. L'annonce de son exécution avait suscité ces derniers jours une importante mobilisation internationale. La France déplore l'exécution. «Nous déplorons vivement que les nombreux appels à la clémence n'aient pas été entendus», a déclaré jeudi un porte-parole du ministre des Affaires étrangères et européennes. «La France réaffirme son opposition à la peine de mort, quels que soient les lieux et les circonstances», poursuit le texte. «Elle rappelle que toute erreur judiciaire dans son application est irréversible». «Alors que plus des deux tiers des Etats dans le monde ont aujourd'hui renoncé à ce châtiment, en droit ou en fait, ce cas illustre la nécessité de poursuivre le combat pour l'abolition universelle et définitive de la peine de mort», conclut le ministère français.
Robert Badinter, l'ancien garde des Sceaux socialiste qui fit adopter la loi abolissant la peine de mort en France, a qualifié jeudi de «défaite pour l'humanité» l'exécution de Troy Davis. Sur Europe 1, le sénateur des Hauts-de-Seine a lancé : «S'il est innocent, comme nous en sommes convaincus, c'est un crime, un assassinat judiciaire». «Cette affaire restera comme une tache sur la justice des Etats-Unis», a assuré M. Badinter. «C'est une très grande défaite, bien au-delà des Etats-Unis, pour l'humanité». Il a cependant relevé le progrès des abolitionnistes dans ce pays. «C'est ça, la marche de l'Histoire». «Nous étions le 35ème Etat au monde à abolir la peine de mort en 1981. Aujourd'hui, sur 194 Etats des Nations unies, 138 sont abolitionnistes».
Amnesty International France a dénoncé jeudi «l'exécution lâche et honteuse de Troy Davis» et appelé «à poursuivre le combat pour l'abolition universelle de la peine de mort». «Aujourd'hui, la Géorgie n'a pas seulement tué Troy Davis, elle a aussi tué la confiance de tous les soutiens de Troy, à travers le monde, dans le système judiciaire aux Etats-Unis», a déclaré Geneviève Garrigos, présidente d'Amnesty International France, dans un communiqué.
Aux Etats-Unis, les abolitionnistes en font leur symbole
Un des avocats de Troy Davis, Thomas Ruffin a dénoncé un «lynchage légal».
Benjamin Jealous, président de l'association pour la défense des gens de couleur (NAACP), a parlé d'un «moment où votre coeur se brise, où la justice de votre pays déçoit des millions de gens dans le monde».
Pour Larry Cox, directeur d'Amnesty International USA, «Troy Davis est maintenant devenu le symbole incroyable de tout ce qui est cassé, de tout ce qui va mal, nous essayerons de nous appuyer sur cela (...) pour montrer que la peine de mort doit être abolie». «Nous n'arrivons pas à croire à ce qui arrive», a ajouté Laura Moye, directrice en charge de la peine capitale à Amnesty, «près d'un million de personnes ont appelé à arrêter l'exécution».