• Il n' y a pas eu d'exécution depuis 93. Mais 96 condamnés, dont 3 femmes, attendent... Le mouvement abolitionniste de la peine de mort dans le monde gagne la Tunisie. Des intellectuels et des membres actifs de la société civile ont engagé depuis 2007 une action pour l'abolition de la peine de mort. 139 Etats sur 193 ont déjà aboli la peine de mort. On considère qu'une corde est faite pour jouer et non pour servir à la pendaison d'être humains. Qu'a fait la coalition nationale pour l'abolition de la peine de mort à fin que l'opinion publique et les autorités acceptent cette position ? A quelques jours de la campagne électorale pour les élections de la Constituante que compte-t-elle faire ? Mohamed Habib Marsit, porte parole de la coalition, a affirmé hier, lors d'une conférence de presse tenue à Tunis, que la coalition vient d'engager une action de sensibilisation à tenir lors de la campagne électorale pour la Constituante et qui se poursuivra après, dans l'objectif d'abolir la peine de mort en Tunisie. Il attend beaucoup des médias afin qu'ils fassent évoluer l'opinion publique vers cette position. La coalition a été constituée le 14 juin 2007, par sept associations : l'Institut Arabe des Droits de l'Homme (IADH), la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme (LTDH), la section tunisienne d'Amnesty internatinal (AI Tunisie), la Fédération Tunisienne des Cinés Clubs (FTCC), l'Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD), l'Association des Femmes Tunisiennes de Recherche en Développement (AFTURD) et l'ancienne Association des Journalistes Tunisiens (AJT), aujourd'hui Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT). Cette coalition s'est étoffée, aujourd'hui, avec l'apport de six nouvelles associations, comme la Confédération Générale Tunisienne de Travail (CGTT), l'Association des Jeunes Avocats (ATJA), l'Association Tunisienne de Réhabilitation des Prisonniers et de Suivi des Prisonniers (ATRSP), l'Organisation Tunisienne Contre la Torture (OTCT), le Conseil National des Libertés de Tunisie (CNLT) et l'Association de la Conscience Politique (ACP). L'action va se poursuivre pour élargir la base de cette coalition. Malgré les difficultés rencontrées avant la Révolution du 14 janvier, la coalition avait entamé beaucoup d'actions. En 2007, une campagne de signature d'une pétition avait rassemblé des milliers de signataires. La coalition a essayé de constituer un groupe de pression auprès des députés de l'opposition de l'époque. 25 députés y ont adhéré. Ce groupe de députés dont Adel Chaouech, a essayé à plusieurs reprises de présenter un projet de loi pour l'abolition de la peine de mort. Plusieurs conférences débats ont été engagées à Tunis et à l'intérieur du pays pour diffuser la culture de l'abolition. La classe politique, y compris le parti au pouvoir, " avaient réagi de façon positive " dira Mohamed Habib Marsit, qui espère que " les différentes listes des candidats à la Constituante incluent dans leur programme l'abolition de la peine de mort ". Hatem Châabouni, de la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme (LTDH) a exposé le programme d'action de la coalition. Elle contactera tous les partis politiques et les indépendants pour les convaincre d'adopter l'abolition et de l'inclure dans la Constitution. Le deuxième objectif est de convaincre l'opinion publique et dégager une majorité favorable à l'abolition. " Nous sommes contre la peine de mort parce que c'est une sanction inhumaine qui touche au droit sacré à la vie ", dira Hatem Châabouni. Contrairement à ce que pensent certains, cette peine a montré ses limites. Les statistiques prouvent que l'abolition n'a pas entraîné l'augmentation des crimes. En plus c'est une peine irréversible. En cas d'erreur judiciaire, rien ne peut être réparé. Plusieurs cas d'innocents en ont été victimes. En Tunisie, la peine de mort n'a pas été appliquée depuis 1993. Cela montre que notre pays est prédisposé à l'abolition. Maintenir la peine de mort, sans l'appliquer réduit l'autorité de la Justice. 96 personnes dont 3 femmes sont condamnés à mort en Tunisie. Les conditions de leur incarcération se sont améliorées, depuis le Gouvernement Ghannouchi. Toutefois, ils vivent une situation intenable sous une grande pression psychologique en restant des années sans savoir si le lendemain, ils seront en vie ou non. Pour ceux qui pensent, sans pouvoir le chiffrer, que la majorité des Tunisiens est contre l'abolition de la peine de mort, on peut rappeler qu'en France en 1981, la majorité était contre la décision de Badinter. L'abolition a eu lieu. Aujourd'hui tout le monde est prêt à l'accepter. Certains pensent que l'abolition est contraire à un texte religieux tranchant. A ceux là on peut répondre que la lapidation pour adultère on s'en est bien passé, ainsi que d'autres peines physiques. En conclusion, la peine capitale peut être commuer en prison à perpétuité, ou à 25 ans de prison, selon les pays, sans que le nombre des crimes augmente, tout en préservant la vie humaine contre d'éventuelles erreurs impossibles à corriger. Dans les pays arabes l'Arabie Saoudite est à la tête des pays qui exécutent la peine de mort. Djibouti l'a abolie. Les Etats qui ont gardé la peine de mort sont généralement des dictatures. La Tunisie jouera –t-elle un rôle de leader dans ce domaine comme elle l'a fait avec la condition de la femme ? Attendons les réactions des partis politiques et de la société civile.