Avec 1,4 milliard d'habitants, une classe moyenne estimée à plus de 400 millions de consommateurs et une main-d'œuvre encore massive, la Chine constitue le plus grand marché intérieur du monde. À cette puissance de consommation s'ajoute la première base industrielle mondiale, dominant la production dans de nombreux secteurs : acier, électronique, batteries, énergies renouvelables, véhicules électriques. Côté technologie, la Chine consacre plus de 450 milliards de dollars par an à la recherche et développement, se positionnant au second rang mondial. Des entreprises comme Huawei, BYD, CATL, Tencent ou DJI incarnent son avance dans la 5G, les drones, les batteries lithium-ion ou l'intelligence artificielle. En 2024, la Chine a produit plus de 60 % des voitures électriques mondiales, renforçant sa suprématie dans les filières d'avenir. Une stratégie commerciale mondiale bien ancrée dans tous les continents La montée de la Chine ne repose pas uniquement sur sa production nationale, mais sur une présence active sur tous les continents. En Afrique, elle construit ports, routes, barrages et contrôle des ressources clés comme le cobalt, le cuivre ou les terres rares. En Amérique latine, elle multiplie les partenariats dans l'énergie, l'agriculture et les télécommunications. En Asie, elle est le cœur du RCEP, plus grand accord commercial de la planète. En Europe, elle investit dans les ports (Le Pirée, Anvers), la logistique et la haute technologie. Même aux Etats-Unis, malgré les tensions, la Chine demeure un acteur commercial incontournable, conservant une part majeure du marché américain de l'électronique et des biens manufacturés. À travers l'initiative des Nouvelles Routes de la Soie, elle développe une connectivité globale centrée sur Pékin, projetant ainsi son influence économique à long terme. Le bras de fer avec Trump, un test qui a renforcé Pékin La guerre commerciale lancée par Donald Trump a voulu imposer des tarifs douaniers élevés sur des centaines de milliards de dollars de produits chinois. Mais loin de freiner durablement Pékin, cette confrontation a eu un effet structurant : la Chine a accéléré sa stratégie d'autonomie technologique, a diversifié ses partenaires et a démontré sa résilience face aux pressions extérieures. Les reculs partiels de Trump, comme l'assouplissement des taxes douanières ou des sanctions contre Huawei ou le retard dans l'application de certains tarifs, ont été perçus à Pékin comme des signes de faiblesse stratégique américaine. Cela a conforté les autorités chinoises dans leur volonté d'adopter une stratégie à long terme, patiente et globale. Les métaux rares, l'arme invisible de la Chine La Chine contrôle plus de 60 % de la production mondiale de terres rares et près de 85 % de leur raffinage, éléments indispensables à la fabrication de smartphones, éoliennes, missiles, panneaux solaires, batteries et technologies numériques. Elle a brièvement suspendu ses exportations de gallium et germanium en réponse aux sanctions américaines, prouvant sa capacité à déséquilibrer des filières entières. Ce contrôle ne se limite pas à l'intérieur de ses frontières : la Chine détient des parts dans des mines en RDC, en Argentine, en Indonésie et au Chili, garantissant ainsi une sécurité d'approvisionnement à long terme. Ce levier est un outil de pression économique et diplomatique, tout en étant une assurance contre toute tentative de découplage imposée par l'Occident. L'image des Etats-Unis ternie, celle de la Chine renforcée Alors que les Etats-Unis continuent de soutenir Israël malgré les accusations de génocide à Gaza, une large partie du monde — particulièrement dans le Sud global, le monde arabe et les mouvements sociaux en Occident — perçoit Washington comme complice d'une impunité internationale. Cette situation affaiblit la crédibilité morale et diplomatique américaine, notamment dans les forums multilatéraux. La Chine tire profit de ce contraste en se positionnant comme une puissance respectueuse de la souveraineté des Etats, appelant au cessez-le-feu et à la paix, tout en maintenant des relations équilibrées avec le monde arabo-musulman. Cela lui offre un avantage d'image important, surtout dans les pays qui souhaitent diversifier leurs alliances économiques et stratégiques. Analyse : l'Europe, l'Allemagne, la France face à la bascule mondiale L'ascension chinoise place l'Europe dans une position délicate. L'Allemagne, très dépendante du marché chinois pour son industrie automobile, tente de préserver ses liens commerciaux tout en s'alignant partiellement sur la politique américaine de « de-risking ». La France, plus prudente, mise sur la diversification et la souveraineté économique, mais reste exposée dans les secteurs du luxe, de l'énergie et de l'aéronautique. Globalement, les anciennes grandes puissances industrielles européennes, confrontées au vieillissement démographique, à la dépendance énergétique et aux transitions numériques lentes, peinent à rivaliser avec la dynamique et l'investissement massif chinois dans les secteurs clés. Sauf repositionnement rapide sur l'innovation et les technologies vertes, l'Europe risque de devenir un marché de consommation dépendant des exportations chinoises, plutôt qu'un centre d'impulsion mondiale. Ainsi, avec la masse, la technologie, les ressources stratégiques, une stratégie globale et une image plus consensuelle dans le Sud, la Chine se positionne progressivement comme le futur hub de l'économie mondiale. Elle ne remplace pas encore totalement les Etats-Unis, mais elle redessine les équilibres et pousse le monde vers un ordre multipolaire dont elle entend bien être le pilier central. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!