Un fléau sous-estimé dans le e-commerce mondial Les retours de produits sont devenus l'un des problèmes les plus coûteux pour les acteurs du commerce électronique. Selon une étude du cabinet CBRE, les retours ont coûté plus de 100 milliards de dollars au secteur du retail en ligne aux Etats-Unis en 2023. Dans l'Union européenne, environ un tiers des articles achetés en ligne sont retournés, ce qui représente un défi logistique et économique considérable. Dans le secteur de la mode, la situation est encore plus critique. Zalando, l'un des leaders européens, enregistre un taux de retour supérieur à 50 %. Ce phénomène est en partie dû au comportement de bracketing, une pratique qui consiste à commander plusieurs tailles ou modèles pour en tester un seul. Un impact encore plus lourd en Tunisie En Tunisie, les retours prennent une forme différente mais tout aussi nuisible. Le paiement à la livraison, ou cash on delivery, représente plus de 85 % des transactions en ligne. Cette pratique favorise le refus de colis, un comportement courant chez les acheteurs qui changent d'avis, ne disposent pas des fonds nécessaires ou n'assument pas leur commande. Les conséquences sont immédiates pour les e-commerçants tunisiens. Chaque colis refusé signifie un aller-retour logistique inutile, une perte de produit parfois invendable et une absence de paiement. Selon les estimations de Tayara.tn, environ 30 % des commandes sont rejetées à la livraison. Des pertes économiques et écologiques majeures Les retours ont un coût direct sur les marges commerciales. Ils nécessitent un traitement, une vérification, un reconditionnement éventuel et parfois une remise en vente avec une réduction importante. Dans de nombreux cas, le produit retourné est invendable ou détruit, notamment dans les secteurs sensibles comme les cosmétiques ou la lingerie. L'impact écologique est lui aussi préoccupant. D'après Returns Management Magazine, les retours génèrent plus de 15 millions de tonnes de CO2 chaque année, ce qui équivaut aux émissions de plus de trois millions de voitures. De plus, près de 65 % des articles retournés ne sont jamais remis en vente à l'état neuf. Les réponses stratégiques des grandes marques Face à l'explosion des retours, les leaders du e-commerce réagissent. Amazon a commencé à facturer certains retours dans plusieurs pays européens, une mesure destinée à responsabiliser les consommateurs. Zara applique également des frais de retour, sauf lorsque l'article est ramené en boutique. De leur côté, des plateformes comme Shopify ou Nike misent sur l'intelligence artificielle pour anticiper les retours. Des outils prédictifs analysent les historiques d'achat, les habitudes clients ou encore les descriptions produit mal comprises. D'autres entreprises comme Fit Analytics ou TrueFit proposent des systèmes d'essayage virtuel ou de recommandation de taille pour limiter les erreurs. Quelles solutions pour les e-commerçants tunisiens ? Même dans un marché en développement comme celui de la Tunisie, il existe des moyens concrets pour atténuer les effets des retours clients. D'abord, encourager les paiements en ligne sécurisés permet de réduire significativement les commandes non sérieuses. Une politique de retour claire, affichée dès la page produit, renforce également la confiance tout en posant des limites. Il est aussi crucial d'investir dans la qualité des fiches produits. Des photos réalistes, des vidéos explicatives, un guide de taille détaillé et des avis clients authentiques peuvent prévenir les mauvaises surprises et limiter les demandes de retour. Enfin, la mutualisation des services logistiques, avec des partenaires spécialisés, pourrait faciliter la gestion des retours à l'échelle nationale. Un enjeu central pour la survie du e-commerce Les retours clients ne sont plus un simple détail opérationnel. Ils affectent directement la rentabilité des entreprises, compromettent la satisfaction client et nuisent à l'environnement. Ignorer cette problématique, c'est courir le risque d'un modèle économique fragile. Pour que le commerce en ligne en Tunisie et ailleurs reste compétitif et durable, il devient urgent d'adopter des solutions concrètes, à la fois technologiques, logistiques et comportementales. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!