Erratum: Nous avons publié cet article tel quel, à la suite de l'aimable autorisation de son auteur MonsieurJalel Snoussi. Il s'avère que la fille qui a affronté le salafiste sur le toit s'appelle, en réalité, Khaoula Rchidi étudiante à l'Institut de Presse et des Sciences de l'Information (IPSI). Nous rectifions cette erreur sur la personne. En cette journée Internationale de la femme, ma première pensée, tout aussi fière que complice, se précipite vers Khaoula Rchidi , étudiante à la Faculté de Manouba, qui a bravé quelques cavaliers de l'obscurantisme, inféodés à l'idéologie wahabite et déracinés de tout le creuset national , pour porter haut et fort le drapeau tunisien auquel, ces derniers ont substitué, sans raison ni respect, l'étendard de la Qaida, aussi noir que leur esprit, au grand vivat d'un essaim de barbus. Une épreuve de force d'un autre temps, impromptue, inégale et non moins inclassable, que Khaoula Rchidi a nourrie de sa force, de son orgueil et de sa chair, certes au prix de quelques fractures au visage mais au grand mépris de cette horde moyenâgeuse. Quand j'entends que toute cette gabegie est commise au nom de l'Islam, je suis encore plus convaincu qu'ils sont les plus grands ennemis de l'Islam. Il faut être une femme tunisienne, toujours égale à elle-même et fidèle à son combat, pour relever le défi et donner à la dignité sa pleine expression. Khaoula Rchidi n'a pas fait honneur seulement à la femme tunisienne mais à tout Tunisien, au-delà de toute appartenance sociale, régionale ou intellectuelle, pour qui les attributs de l'identité tunisienne transcendent toute les lignes idéologiques et toutes les visées. Khaoula Rchidi, une nouvelle héroïne ? Non, juste une femme tunisienne, parmi tant d'autres, soldat de sa patrie et de son identité, qui lève ses boucliers contre les nouveaux ennemis de la Tunisie. Un acte chargé de signification et de symbole, un message, énième message, de cette femme tunisienne, une femme certainement ordinaire mais hautement représentative, qui ne cesse de donner l'exemple et de montrer la voie, notamment dans l'adversité, n'en déplaise aux guerriers d'avant-garde et aux princes de l'ignorance et de la sédition. J'ai failli dire Merci Khaoula Rchidi d'être là à ce moment-là, je me retiens car nous sommes tous Khaoula Rchidi face à la bannière noire, à la barbe noire et au voile noir, bref à toutes les idées noires. Nous sommes tous Khaoula Rchidi pour une Tunisie réconciliée avec soi-même et avec son époque, riche de ses différences et ancrée dans son identité. Se fendre d'un communiqué au rabais alors que les cavaliers de l'apocalypse rivalisent de démonstrations de force, franchissent bien volontiers toutes les lignes rouges et souillent les repères de la Tunisie, dans l'impunité, voire la collusion de la Troïka, la présidence de la république a montré, encore une fois diriez vous, ses connivences et ses calculs partisans ! Ce rictus sémantique que la figure présidentielle répand en guise de réaction contre un acte d'une telle gravité, on dirait une formalité qu'on expédie pour faire bonne figure face à la galerie et faire un clin d'œil aux coéquipiers républicains. Et voilà comment on se contente de remuer un vague sourcil, même pas compatissant, alors qu'il s'agit de prendre les choses en main et de protéger le pays. Y aurait-il une parallèle avec l'appel lancé par le fantasque et toujours ténébreux Tahar Hmila, baron élu CPR (n'est ce pas Sidi Moncef !), pour changer l'hymne national ? Le raccourci est d'autant plus tentant que le paradoxe est saisissant, l'idée me démange la cervelle! Et pour conclure, je citerai un passage d'un poème de Louis Aragon, pour qui “la femme est l'avenir de l'homme”, beau texte toujours d'une actualité brûlante, interprété par le grand Jean Ferrat : Il y a douze siècles, Ibn Rochd (Averroès) s'élevait contre la précaire situation de la femme, disant à peu près ceci ” les hommes ont trop crétinisé, dégradé, exploité la femme pour que celle-ci perdure dans une position inférieure”! Je constate seulement que plein d'hommes accusent douze siècles de retard, au moins, par rapport à Ibn Rochd!