TUNIS (TAP) - La relation entre politique et religion a été au centre d'une conférence internationale organisée à Tunis les 24 et 25 juin, sur le thème "quels sont les moyens pour renforcer la liberté et la démocratie en Tunisie". La dualité du discours politique d'Ennahdha et les craintes exprimées par certaines parties à l'égard du mouvement ont été évoquées par différents intervenants aux assises de cette rencontre organisée par le Centre d'études sur l'islam et la démocratie (CISD). La vision du mouvement Ennahdha sur la question de la relation entre politique et religion a été défendue par le président du mouvement Rached Ghannouchi qui a souligné que la situation de gestation que vit la Tunisie après la révolution commande à toutes les parties de faire prévaloir le consensus. La situation actuelle qui prévaut dans le pays et les défis qui se posent pour assurer la réussite de la transition "sont importants et ne peuvent être assumés par un seul parti politique" a-t-il estimé. Evoquant les craintes exprimées à l'égard d'Ennahdha, M. Ghannouchi a affirmé qu'il s'agit de craintes infondées. Notre parti a signé, en 1988, le pacte national, une plate-forme qui stipule le respect des droits humains et le code du statut personnel. « Il n'y a plus parmi les membres de notre mouvement ceux qui croient que la violence est le moyen pour accéder au pouvoir », a-t-il soutenu. Pour Slaheddine Jourchi, président du forum El Jahadh, le mouvement Ennahdha doit être conscient de l'existence d'une crainte véritable à l'égard du mouvement. Il s'est aussi interrogé concernant l'aptitude du mouvement à remédier à la dualité de son discours politique et à adopter un discours unifié et cohérent. Le débat sur la liberté religieuse mettra à l'épreuve les tunisiens qui n'ont pas encore décidé le modèle de la démocratie souhaitée ainsi que leur définition de la liberté religieuse, a estimé de son côté l'universitaire Amel Grami. Elle a affirmé que la question de la liberté religieuse qui continue de susciter une large polémique dans le monde arabe permettra de mesurer l'aptitude de la classe politique et de la société civile à concrétiser leurs idéaux. Elle a aussi mis en garde contre l'écart qui existe entre le discours prôné par la direction d'Ennahdha et les agissements de certaines parties, y compris parmi les militants du parti, dit-elle, citant les attaques perpétrées contre des écoles mixtes ou encore le renvoi des Imams des tribunes des mosquées. Le discours d'Ennahdha compte parmi les discours les plus avant-gardistes des mouvements islamistes dans le monde arabe a estimé, pour sa part, l'universitaire américain Marc Linsh. Il a toutefois précisé que l'écart entre le discours des dirigeants du mouvement et les agissements des militants de base représente, aujourd'hui, un véritable défi dans la mesure où il a eu pour conséquent, a-t-il précisé, de ralentir la décision de la direction américaine à adopter une position claire et franche en faveur du mouvement Ennahdha". Cette conférence internationale s'inscrit dans le cadre d'une série de rencontres organisées par le CISD sur la situation politique en Tunisie. La dernière en date, la tenue d'une conférence à Washington sur le thème « quel type de démocratie pour la nouvelle Tunisie : islamique ou civile », avec la participation du secrétaire général d'Ennahdha.