TUNIS (TAP) - "Les transitions démocratique sur les deux rives de la Méditerranée" est le thème du colloque "Tunisie-Europe: les transitions démocratiques" qui se tiendra les 26 et 27 novembre au petit auditorium de la bibliothèque François Mitterrand à Paris. Il s'agit de rencontres publiques visant à mieux comprendre le plus important mouvement social des révolutions dans les pays arabes qui ont permis à certaines de ces sociétés une expression créative et libérée du carcan des dictatures à l'encontre des préjugés occidentaux qui n'imaginaient pas d'autres aspirations que la paix civile des dictateurs ou l'islam radical. D'après la note de présentation de ces journées et à la lumière des objectifs affichés de ces révolutions ayant porté exclusivement sur la liberté et l'amélioration des conditions de vie, il semble qu'après les élections en Tunisie et le succès du parti Ennahdha, la question de la cohabitation se pose avec acuité, dans des démocraties en construction, de partis islamistes puissants et de forces démocrates modernistes ou progressistes, majoritaires mais divisées. Dans cet esprit, les difficultés sont donc nombreuses dans l'établissement de la démocratie et la Tunisie n'y échappera pas. Et Si l'Europe dispose d'une longue expérience de transition vers la démocratie, tant elle a subi les dictatures (de la chute du fascisme au sud de l'Europe/Grèce, Espagne, Portugal) à la fin de la guerre en ex-Yougoslavie, en passant par la chute du mur de Berlin qui ramena à l'Europe et à la démocratie une dizaine de pays du bloc de l'Est), c'est une moitié des nations européennes qui ont fait dans les 40 dernières années l'expérience d'une transition démocratique. A la sortie des dictatures les pays européens ont eu à affronter des problèmes de même nature, même s'ils ne sont pas identiques à ceux que rencontre aujourd'hui la Tunisie : quelle constitution et quel système électoral ? Comment juger les criminels et comment traiter le personnel qui détenait l'autorité sous l'ancien régime ? Comment identifier et indemniser les victimes ? Comment redistribuer les richesses, lutter contre la corruption, comment réorganiser l'économie, la restaurer après la dictature et la révolution, comment maintenir un réel progrès social qui assure l'adhésion à la démocratie ? Comment assurer l'indépendance des média ? Comment maintenir ou ramener dans le jeu démocratique les composantes conservatrices et nostalgiques, les composantes politiques plus radicales que démocrates ? Les conditions d'exercice de démocraties fortes et stables concernent aussi bien la Tunisie que l'ensemble des pays européens. L'appauvrissement relatif de l'Europe qui l'a conduit, sous la contrainte du marché mondial, à proposer des réponses technocratiques sans consentement populaire, génère aussi un risque d'affaiblissement de l'adhésion à la démocratie. C'est dans le but d'échanger les réflexions et les expériences, que ce colloque a été proposé par l'association "Action tunisienne" et "Initiative Citoyens en Europe", en présence d'un grand nombre d'invités tunisiens et européens. La première journée démarrera avec une série d'interventions sur le thème "Archives, police politique, réforme judiciaire" ainsi qu'avec la projection d'un documentaire sur la police politique en Tunisie réalisé par Karim Bouzouita et Thameur El Mekki. Parmi les intervenants européens figurent Antoine Garapon (Magistrat, Secrétaire Général de l'Institut des Hautes Etudes sur la Justice) Jérôme Hertaux (Universitaire, auteur de "1989 ? l'Est de l'Europe. Une mémoire controversée") et Martin Pradel (Avocat, membre de la FIDH). Du côté de la Tunisie c'est Noureddine Hached (Syndicaliste, ancien ministre et ambassadeur) qui interviendra. Sur le thème "Institutions, vie politique et débat religieux", interviendront Ghazi Ghraïri (Juriste/Membre de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution), Samy Ghorbal (Constitutionnaliste), Marcela Ferrari (Historienne argentine) et Gilbert Naccache (Ecrivain et homme politique). Le colloque sera également une occasion de débattre de la question du développement économique et de la solidarité (décentralisation, micro-crédit et formation) avec les communications de Daniel Cohen (Professeur d'économie à Paris I Sorbonne et à l'ENS), Mohamed Ali Marwani (Economiste), Maria Novak (Economiste, Présidente-fondatrice de l'Association pour le Droit à l'Initiative Economique), Mickaël Cracknell (Co-fondateur de l'association de micro-crédit ENDA). Dimanche 27 novembre, les invités se pencheront sur le thème "Nouvelles formes d'information et d'organisation" avec la participation de Khelil Ben Osmane (Cofondateur du site fhimt.com ), Bruno Marzloff (Sociologue), Nicolas Diaz (Membre de la FIDH). La deuxième partie de ce colloque sera consacrée au thème "Ethique, journalisme, indépendance des médias" avec la participation de Seweryn Blumsztajn (Journaliste, ancien membre de Solidarnosk), Riadh Guerfali (Fondateur du site nawaat), Florence Hartmann (Journaliste, essayiste) et Noura Borsali (Journaliste, universitaire et essayiste). "Femmes tunisiennes, une garantie pour la transition" sera le dernier thème du colloque et l'objet des interventions de Sophie Bessis (Historienne, Directrice de Recherche à l'IRIS), Saida Rached (Secrétaire générale de l'Association Tunisienne des Femmes Démocrates), Azza Ghanmi (Membre de Doustourna, le Manifeste du 20 mars) et Michèle Sabban (Vice-présidente de la région Ile-de-France). Par la suite, un débat portera sur "la Société civile et l'engagement citoyen " animé par Andrej Nosov (membre de Youth Initiative for Human Rights dans les Balkans).