TUNIS, 10 juil 2009 (TAP) - Emporté par la vie, révolutionnaire, romantique, rêveur, inventif et idéaliste. Voila en somme, le portrait d'Abou El Kacem Chebbi, le grand poète tunisien, ressuscité à partir d'un répertoire revisité en 2009. "Le matin nouveau" ou "Essabah el Jadid", est une opérette dédiée à cette icône de la poésie, qui a marqué l'ouverture, jeudi soir, de la 45ème session du Festival international de Carthage. Au théâtre antique de Carthage, la soirée d'ouverture à laquelle a assisté M. Abderraouf El Basti, ministre de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine, s'est voulue un hommage appuyé à la mémoire et à l'oeuvre du poète de la vie, Abou El Kacem Chebbi, dont la Tunisie toute entière célèbre cette année le centenaire de sa naissance. En hommage à un fervent défenseur du renouveau littéraire, le spectacle s'est voulu, à l'image d'un poète hors normes, une sorte d'un show poétique qui puise dans l'oeuvre magistrale de Chebbi dont son célèbre recueil "Aghani El Hayat" (chants de la vie) où le dramaturge s'est escrimé à faire revivre l'adresse verbale du poète, la noblesse et l'extrême sensibilité d'un maître du mot. Une pléiade d'artistes, professionnels et jeunes parmi lesquels on a fait la découverte de nouvelles voix notamment opératiques, a pu, ce soir, exaucer le rêve du poète de la liberté. N'était-ce pas lui qui plaidait pour la liberté d'imaginer et d'exprimer autrement le monde. Par les cris des corps et avec des mouvements synchronisés sur un fond de partitions musicales bien colorées, ils ont embarqué le public fortement envoûté, dans un voyage initiatique sur les traces de ce poète multidimensionnel, à la fois mystique et philosophe. Pendant une heure vingt minutes, des acteurs et danseurs ont réussi à donner, par un jeu savamment interprété, un nouveau souffle à la poésie de Chebbi et à son amour pour la patrie. Par dix tableaux qui ont constitué la trame de fond de ce spectacle et qui ont donné forme à une renaissance dans l'intemporalité. Le spectacle ressemble à un story-board qui s'élance dans une trajectoire dont les notions du passé et du présent se mêlent à travers une filiation artistique qui a revisité les vers et les paroles de celui qui s'est longuement interrogé sur la vie et a tant rêvé de libérer son pays du joug du colonialisme. Entamé par le célèbre poème de Chebbi "Le matin nouveau", le texte revit sur scène et s'incarne dans un espace aux consonances lointaines. C'est un Chebbi dans l'art du temps que l'on découvre au fil d'une belle fresque qui signe des indications très brèves et précises sur l'itinéraire court de ce poète décédé jeune mais qui a pu avec son talent inscrire son oeuvre dans la continuité et réaliser la victoire sur la laideur et la faiblesse grâce à son amour sincère pour son peuple et pour sa patrie. D'ailleurs, l'interprétation passionnée de l'âme de celui qui a chanté la vie et toutes ses merveilles, n'est pas une tache facile. Car imaginer un poète de l'envergure de Chebbi est en soi un défi. Du point de vue artistique, la démarche dramaturgique du metteur en scène Hatem Derbal d'après un scénario de Mohsen Ben Nefissa et avec la musique de Rachid Yeddes, on découvre un Chebbi et le mal de vivre d'un étranger, solitaire, dans son environnement humain, qui parvient finalement à vivre son rêve, qu'il aurait tant voulu de son vivant: les couleurs du drapeau tunisien. Et c'est avec son hymne à la vie, à la joie et à la liberté que s'est terminé "Le matin nouveau". Quoi de mieux que "la volonté de vivre", l'un des poèmes les plus connus et dont l'histoire a retenu ces vers célèbres "lorsque le peuple un jour veut la vie, force est au destin de répondre".