TUNIS, 3 fév 2011 (TAP) - Les soldes d'hiver sont ouvertes depuis le 29 janvier et se poursuivront jusqu'au 15 mars 2011. A l'avenue Habib Bourguiba, artère principale de la capitale, toutes les boutiques de prêt-à-porter sont ouvertes et affichent des remises allant de 20 jusqu'à 70 pc. Pourtant, les vendeuses attendent encore les premiers clients. La boutique du coin, une grande marque au centre commercial "Claridge" commence à recevoir quelques clients, la majorité, des femmes. Amir El Fareh, son gérant, déclare que "d'habitude les soldes saisonniers sont un rendez-vous très attendu par les tunisiens, auxquels ils se préparent d'avance" et se dit optimiste en dépit de la baisse de la demande observée. "Ce n'est qu'une période transitoire qu'exige l'après révolution", tempère-t-il. Et le trentenaire d'ajouter: "la réticence des citoyens à descendre au centre ville et éviter la cohue dans les boutiques est compréhensible. Avec les rumeurs qui courent sur les kidnappings et les braquages, ils préfèrent rester chez eux", dit-t-il. Depuis le 14 janvier, date du départ de Ben Ali après un règne sans partage de 23 ans, la Tunisie vit au rythme d'une véritable révolution tant au plan économique que social. "Les tunisiens n'ont pas le cœur au shopping durant cette période", estiment certains boutiquiers. Ces tunisiens, pourtant réputés pour leur fièvre acheteuse, passent, aujourd'hui, beaucoup plus de temps dans leurs foyers, circonstance oblige (émeutes, manifestations, couvre-feu), à suivre l'évolution des évènements. A l'heure actuelle, "ils sont plus intéressés par la politique que par les nouvelles tendances de la mode", commente le propriétaire d'un kiosque à journaux au centre Claridge. A quelques mètres du centre, deux jeunes vendeuses d'une boutique de vêtements pour femmes discutent avec un client, non pas à propos des prix des articles mais des dernières news échangées par les internautes. Le regard braqué sur les camions des militaires qui campent devant le ministère de l'intérieur, Salwa ne cache pas son désarroi. "Terrorisée! Oui, car toutes les manifestations passent par l'Avenue Habib Bourguiba, nous sommes obligées de fermer la boutique à chaque fois qu'il y a foule", s'exclame-t-elle. "Nous ne sommes pas habituées à cela et les rumeurs n'ont fait qu'aggraver la situation. Même les clients que nous recevons se sentent anxieux et pressés de quitter les lieux", ajoute la jeune femme. Plus loin, au centre Palmarium, destination d'une clientèle plus large durant la période des soldes, ce n'est pas encore le grand rush. Par rapport à la saison précédente, "ça va très mal pour nos commerces", déclare Amira, une jeune vendeuse dans une boutique de prêt-à-porter féminin. Pourtant, des rabais de 20 à 50 pc sont affichés pour des articles très à la mode. "Les boutiques dans les banlieues continuent de recevoir une clientèle plus nombreuse que le centre ville", a avancé la jeune fille, informée par ses collègues. La situation est pareille pour les magasins de prêt-à-porter pour hommes. D'humeur morose, Alaa déclare: "notre boutique recevait, durant les périodes de soldes ''normales'', une centaine de clients par jour, ces jours-ci leur nombre ne dépasse pas les six personnes". L'inscription "prix monstre" sur la vitrine d'une boutique de chaussures et de sacs à main a suscité la curiosité de quelques clientes. Les nouveaux prix affichés en rouge ne dépassent pas les 20 dinars pour tous les articles. Malgré cela, "seul une cinquantaine d'articles ont été écoulés depuis l'ouverture des soldes pour des recettes d'environ 600 dinars", a déclaré la jeune vendeuse. "Dans des circonstances normales, nous faisons des recettes de 6 à 7 millions par jour, aujourd'hui, nous sommes à 600 dinars", réitère la boutiquière. "Nous fermons la boutique entre 16h et 17h, quatre heures avant le couvre-feu (22 heures), nous ne voulons pas courir de risques et les rumeurs sur Facebook n'arrangent pas les choses", affirme la jeune fille qui a requis l'anonymat.