La crise due au Coronavirus risque de porter le coup de grâce au secteur des industries du cuir et de la chaussure(ICC), déjà en difficulté en raison des problèmes financiers et de l'absence de mesures adéquates, a déclaré Chokri Najjar, directeur des Stratégies et de la Communication du Centre National du Cuir et de la Chaussure(CNCC). « Si nous devions continuer sur cette lancée, les entreprises opérant dans le secteur des ICC vont finir par mettre la clé sous la porte », a-t-il affirmé dans une interview accordée à l'Agence TAP. A fin octobre 2020, le secteur compte 224 entreprises, dont 7% ont déjà mis la clé sous la porte, a indiqué le responsable, ajoutant «qu'entre 5 et 8 mille emplois ont déjà disparus, depuis mars 2020». De même, le nombre d'artisans a enregistré une baisse passant de 15 mille avant la Révolution de 2011, à seulement 3 mille actuellement à cause des répercussions du Covid 19 et de l'absence de visibilité. S'agissant des exportations, les performances du secteur n'ont pas échappé aux retombées de la pandémie et du confinement général, avec une baisse de 28,6%, au cours des 9 premiers mois 2020, soit 911,6 millions de dinars(MD), contre 1276,6 MD, enregistrés durant la même période de l'année 2019. Les importations ont connu le même rythme descendant (-30%), au cours de 9 premiers mois 2020, pour se situer à 619,4 MD. Najjar a souligné qu'en 2019, la demande de la consommation locale en chaussures a été évaluée à près de 40 millions de paires par an, sachant que la production locale ne couvre que 47% du marché dont 30% fabriquée par les artisans et 17% provenant de la production industrielle. D'après les résultats d'une nouvelle enquête élaborée par le CNCC sur l'impact de la pandémie du coronavirus sur la situation des entreprises du secteur ICC, près de 80% de la demande locale est assurée à partir de l'importation, dont 65% proviennent des importations illégales et la commercialisation des chaussures de fripe. Cette proportion illustre, selon lui, « l'ampleur du circuit informel et explique les répercussions de la pandémie sur le secteur en termes de fermetures d'entreprises et de suppression d'emplois ». Pour le responsable, l'impact de l'interruption de la production pendant le confinement et l'absence de mesures exceptionnelles en faveur des entreprises pour faire face à la pandémie, expliquent la grave crise qui gangrène le secteur. « Face à cette situation, le taux d'endettement des artisans et des petites et moyennes entreprises est actuellement estimé à 80% et un grand nombre d'artisans et entreprises ont cherché à vendre leurs biens pour rembourser leurs dettes », a révélé la même enquête du CNCC. Pour remédier à la situation actuelle du secteur, le responsable a souligné que le CNCC, en collaboration avec la Fédération nationale de cuir et chaussures, ont appelé à suspendre les poursuites judiciaires contre les entreprises et les artisans endettés auprès de la CNSS et les bureaux de la recette des finances. Il s'agit également d'intervenir auprès des instances compétentes pour rééchelonner ces dettes avec exonération du paiement des pénalités de retard. Ils ont, en outre, plaidé pour une application rigoureuse de la loi interdisant l'importation et la commercialisation des chaussures usagées, et à assurer le fonctionnement des commissions régionales chargées du contrôle de l'importation illégale, outre le renforcement des opérations de contrôle technique à l'importation et la soumission des importations de chaussures à un cahier des charges à l'instar des articles médicaux,des pneus, du mobilier et la céramique. Le CNCC et la fédération ont mis l'accent sur la nécessité d'une Intervention auprès de la Banque tunisienne de solidarité(BTS) pour accorder aux artisans et PME des crédits de 10 mille dinars afin de les aider à surmonter leurs difficultés financières. Autre recommandation exprimée par les professionnels, exonérer les importateurs du paiement des droits de douanes appliqués à l'importation des composants et intrants nécessaires pour le secteur des industries du cuir.