« Le procès intenté auprès du tribunal militaire du Kef contre l'ex-président Zine El Abidine Ben Ali et d'autres anciens responsables est un pas important vers l'Etat de droit en Tunisie, mais le verdict restera insuffisant tant que Ben Ali ne reviendra pas dans le pays et n'affrontera pas les questions de ses accusateurs », a estimé, jeudi, le directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch (HRW). Selon un rapport de HRW, « des failles ont privé le tribunal des moyens d'identifier ceux qui ont commis les meurtres et de s'attaquer au problème de culpabilité des hauts fonctionnaires », faisant remarquer que « de telles affaires devraient dans l'avenir être jugées par un tribunal civil et non militaire ». « Les autorités tunisiennes devraient également modifier les lois du pays pour limiter la compétence des tribunaux militaires aux délits purement militaires », a encore estimé l'organisation. « Le code pénal tunisien est mal outillé pour juger de tels cas », a déclaré Human Rights Watch, expliquant qu'il « ne traite pas du concept de responsabilité du supérieur hiérarchique, reconnu en droit international et qui impute aux chefs militaires et supérieurs civils la responsabilité des crimes commis par leurs subordonnées si ces supérieurs étaient au courant des crimes, ou avaient des raisons de l'être et qu'ils avaient manqué de les prévenir ou de les punir. Plusieurs hauts fonctionnaires de l'ancien régime ont été acquittés faute de preuve directe qu'ils avaient donné l'ordre de tirer sur des manifestants. « Bien qu'un mandat d'arrêt international ait été émis contre Ben Ali, réfugié en Arabie Saoudite, le gouvernement tunisien n'a fait que des tentatives de pure forme pour obtenir des saoudiens qu'ils l'extradent en vue du procès », regrette Human Rights Watch. Le procès intenté contre Ben Ali et d'autres hauts fonctionnaires devant le tribunal militaire permanent du Kef s'est intéressé aux meurtres commis dans les gouvernorats du Kef, de Jendouba, Béja, Siliana, Kasserine et Kairouan en décembre 2010 et janvier 2011.