De sa ville frontalière, aride, terne et misérabiliste, le jeune kasserinois hoche la tête et s'interroge : « Un soulèvement avec ses martyrs, ses blessés, ses veuves et ses orphelins pour RIEN » Non pardon pas pour rien. Pour les pseudo-révolutionnaires, les lâches, les retourneurs de veste, les élites des salons feutrés, les inféodés aux puissances étrangères, aux barbus, aux ignorants, aux incultes et aux traitres qui, tels des rapaces et des charognards se sont jetés sur ma belle et meurtrie Tunisie devenue en l'espace de 3 années une proie facile et vulnérable. » Attablé au même café mais avec moins d'argent en poche, le jeune kasserinois pleure sa révolution. Sa vie n'a pas changé. Pire elle s'est dégradée. Les promesses d'emploi, de développement, de justice et de bien être se sont évaporées et le voila devant des ogres encore plus menaçants et plus féroces que la faim et la pauvreté. Sa ville est sous l'emprise des mafias de la contrebande assoiffées d'argent facile et des terroristes alléchés par l'odeur du sang. Le jeune kasserinois est, dépité et écœuré. Il s'apostrophe : « Comment ai-je pu être aussi stupide et naïf pour croire à cette théâtralisation et à cette machination révolutionnaire ? » La chevrotine des « Droits –hommistes » a remplacé le gaz lacrymogène de l'ancien régime, les milices des LPR se sont substituées aux cellules du RCD, les voyous de la République ont pris la place des courtisans au palais de Carthage, les « Révolutionnistes » et les blanchisseurs d'histoire ont supplanté les nababs du clan des Trabelsi et le petit peuple se retrouve hélas à la case départ. Toujours aussi pauvre, plus misérable, plus vulnérable et atteint du nouveau syndrome du masochisme et de l'auto-flagellation. Le jeune kasserinois a tout perdu. Son gout à la vie, ses espoirs et ses rêves. (Photo d'illustration)