Le défi logistique pour une meilleure compétitivité Par Latifa Cherkaoui
Les prochaines années vont être décisives pour le tissu économique marocain. En effet, dans un contexte de nécessité de croissance forte, le gouvernement cherche à augmenter la productivité du pays, développer ses exportations, attirer l'investissement étranger et favoriser l'investissement national. Pour un pays dont l'avantage comparatif est lié à la géographie, la logistique devient un élément d'importance cardinale sur ce front. Créatrice de valeur ajoutée et essentielle pour la création de l'emploi, cette logistique pourrait dynamiser l'économie en faisant apparaître de nouveaux services indispensables aux multinationales comme l'émergence de prestataires et de plateformes logistiques. Pour ce faire, les entreprises nationales devraient apprendre à maîtriser et optimiser les maillons des chaînes d'approvisionnement avec des contraintes de temps et de qualité, sachant que les donneurs d'ordre évoluent vers la livraison «juste à temps». Celle-ci se traduit généralement pour le partenaire marocain par des délais très courts. Ce que l'on retient est que l'avantage comparatif du Maroc sur son marché traditionnel réside tout de même dans sa capacité à s'intégrer dans des cycles courts de production. D'un point de vue logistique, le Maroc reposera de plus en plus sur le transport international routier qui doit être rapide, fiable et pas très onéreux. Car à l'heure où, sur les grandes lignes maritimes, les navires porte-conteneurs vont de plus en plus vite et le coût unitaire de transport d'un conteneur de plus en plus faible, le pays conserve malgré tout un avantage par rapport à l'Asie. En effet, un conteneur effectuant le trajet Shanghaï-Anvers ou Singapour-Hambourg coûte environ 1.300 euros mais seulement de 500 à 600 euros de Hambourg à Casablanca ou d'Anvers à Tanger. Il est important que l'on se penche sur la question du développement de la logistique surtout que Tanger-Med sera opérationnel à court terme. Cette dernière ne pourra se réaliser sans la mise en uvre d'une coopération entre l'Etat, les entreprises et les organismes spécialisés. Et le facteur clé de la réussite d'un plan d'action serait la capacité à impliquer les entreprises directement concernées. L'expérience du plan d'action «Maroc 2010» en faveur du tourisme montre qu'une telle opération en partenariat est tout à fait possible au Maroc. D'ailleurs, l'intérêt porté par les professionnels sur le sujet peut justifier l'engagement d'un tel programme. L'on retient également qu'une logistique performante doit s'appuyer sur quatre niveaux de métiers complémentaires, à savoir la conception, le pilotage des flux logistiques, l'encadrement et l'exécution des opérations. Dans le cas d'espèce, le Maroc est dans une situation intermédiaire puisque les fonctions classiques d'exécution sont les plus répandues tandis que les métiers de conception ne font qu'émerger. Comme en témoigne la quasi-inexistence du secteur conseil. Autre constat et non des moindres : les coûts et délais de transport pour rejoindre les grands marchés sont importants. Le problème ne réside pas dans la qualité des infrastructures mais plutôt dans l'addition de politiques tarifaires désavantageuses. En outre, la complexité des procédures provoque des surcoûts, les professionnels craignent qu'avec la mise en place du programme de l'Union européenne «Marco Polo», qui doit favoriser le cabotage, le transport routier soit interdit pendant le week-end en Espagne. Si c'est le cas, les systèmes de navettes routières, avec un départ de Casablanca (ou de Paris) le vendredi et l'arrivée à Paris (à Casablanca) le lundi matin, ne seraient plus possibles. Cela pourrait avoir un impact important sur les exportateurs notamment des produits textiles ou de fruits et légumes. D'autres liaisons Ro-Ro vers le nord de la Méditerranée devront probablement être créées. Enfin, le coût de passage devrait être de nouveau étudié. C'est un point important pour la compétitivité logistique du Royaume. Ajoutons à cela que la réforme portuaire et le transfert prévu en l'an 2009 de l'activité Ro-Ro à Tanger-Med vont radicalement changer l'environnement économique de la traversée. Une fois les réformes mises en uvre, le gouvernement devra saisir cette opportunité pour obtenir des partenaires concernés une tarification plus compétitive des services portuaires Ro-Ro. En tout état de cause, malgré des mesures remarquées comme la réforme des douanes, les coûts et les délais de la traversée, les problèmes de procédure et de sûreté entravent encore la performance de la logistique du commerce national. Source :www.lematin.ma