Les maltaises, variétés d'oranges très prisées en France, n'ont pas connu, en ce mois de février, leur succès traditionnel auprès de la clientèle française. D'importantes quantités entreposées au port de Marseille seraient soit impropres à la consommation en raison d'un mauvais conditionnement, soit réexpédiées vers la Tunisie pour mévente. Nos maltaises n'auraient-elles plus la cote en France ? Ce semble être le cas, du moins pour la saison en cours, et ce pour diverses raisons. Pour le Groupement Interprofessionnel des fruits (GIF), structure d'appui de la filière fruit, il s'agit d'un simple déséquilibre entre une offre abondante et une faible demande. Les exportateurs tunisiens ont expédié, sur la France, durant la période allant du 29 janvier au 5 février 2007, 3500 tonnes alors que le marché n'en demandait que 1300 tonnes, par semaine. Conséquence : les exportations ont été stoppées durant une semaine, le temps d'écouler les stocks. Pour d'autres, les maltaises tunisiennes, particulièrement juteuses et grandes cette année, ont buté sur la fameuse directive (norme) européenne (Numéro 178 de 2002) et auraient trouvé toutes des difficultés pour se conformer à cette norme de sécurité alimentaire. Cette directive, rappelons-le, impose aux exportateurs tunisiens d'agrumes de prouver, à partir de janvier 2007, la traçabilité des oranges tunisiennes, particulièrement de la variété maltaise. Cette thèse est étayée par les propos de M. Mohamed Boumayla, membre de l'Union régionale de l'agriculture et de la pêche (URAP) de Nabeul qui a fait état de l'apparition, cette année, de nouvelles maladies qui ont affecté les troncs d'arbres âgés de 8 à 10 ans. Cette même thèse rejoint les inquiétudes des agrumiculteurs qui estiment, dans leur ensemble, que les parasites (mineuse et autres) constituent de véritables menaces pour leurs orangeraies et suggèrent la création d'un centre technique des agrumes et l'exploitation à bon escient de l'insectarium de Beni Khalled, unité aménagée pour l'élevage d'insectes prédateurs naturels utiles en ce sens où ils sont destinés à éliminer les insectes nuisibles. M. Samir Ben Slimane, représentant du GIF, s'est inscrit en faux contre cette thèse. Pour lui, la suspension des exportations, durant une semaine, est une simple opération technique destinée à réguler le marché et n'a rien à avoir avec la problématique de la traçabilité. Le GIF s'est attelé, avec tous les intervenants, à sensibiliser les agrumiculeurs, bien avant le démarrage de la campagne agrumicole, aux exigences de cette traçabilité. Décryptage : une campagne de sensibilisation ne signifie aucunement la garantie que les agrumiculteurs se sont bien conformés à cette norme. Tout laisse à croire que les agrumiculteurs tunisiens, excités, cette année, par l'excellente qualité des maltaises et par les gains substantiels qu'ils pourraient en tirer, ont commis l'erreur fatale de se presser et de cueillir les maltaises par anticipation, c'est-à-dire bien avant que la demande ne s'exprime. Le reste est prévisible : la logistique de conditionnement et de bonne connaissance des exigences du marché n'a pas fonctionné selon les règles de l'art. Une année après les déboires des exportateurs d'huile d'olive, c'est autour des exportateurs de maltaises de connaître les mêmes problèmes de mévente. Et toujours pour la même raison : l'absence de professionnalisme des exportateurs et des structures d'appui, et surtout, l'ignorance des mécanismes de marché. Pour remédier à la situation, une nouvelle stratégie d'exportation des maltaises est mise au point avec le concours des importateurs en France. Elle prévoit l'exportation de cargaison de 1200 tonnes par semaine et la sensibilisation des agrumiculteurs à l'importance de ne cueillir que ce qui peut être exporté avec certitude. Côté promotion, des opérations de dégustation d'oranges maltaises tunisiennes seront organisées à Marseille, à Lyon et à Paris. Les exportations des agrumes ont démarré, à la mi-janvier 2007. Quelque 22 mille tonnes de maltaises (19.000 tonnes en 2005/2006) seront expédiées à l'étranger à raison de quatre cargaisons par semaine, et ce jusqu'à fin avril prochain. Sur ce total, pas moins de 20 mille tonnes seront exportées sur le marché français, premier client de la Tunisie. La Tunisie est fortement concurrencée sur ce marché par les agrumes marocains, algériens, israéliens et espagnoles. La production des agrumes est estimée, pour 2007, à 255.000 tonnes dont 60.000 à 80.000 tonnes seront exportées. Ces projections sont trop optimistes