On ne verra certainement plus autant d'adresses web avec des .com et autres .net dans nos navigateurs. Le 23 juin à Paris, devant une audience de 1.500 participants originaires de plus de soixante-dix pays, les responsables de l'Icann (Internet corporation for assigned names and numbers) ont lancé leur petite bombe médiatique. En 2009, les internautes pourront créer autant d'extensions qu'ils le désirent, sans limite autre que celle de leur imagination. Du moins théoriquement. Parce que l'institution compte remporter le jackpot avec son innovation. Si en théorie tout particulier qui le désire pourra avoir sa propre extension, le prix envisagé, « quelques dizaines de milliers de dollars », selon les agences de presse, sans précisions supplémentaires, risque de limiter la portée de cette décision. Une décision motivée aussi par la pénurie, des noms de domaines, prévue pour 2011dans le cadre de la norme IPV4. Le passage à l'Ipv6 permettra de faire sauter les barrages, en accordant (presque) tous les suffixes possibles et imaginables. De quoi décupler allégrement le « petit » 162 millions de noms de domaine existants, dont une bonne moitié sont des .net et des .com. A noter cependant que l'Icann est une organisation créée en 1998, régie par le droit californien. Elle est clairement liée au département du commerce américain. Ses décisions, pourtant, s'imposent même à des Etats. De quoi chambouler durablement le train-train de notre ATI, qui affiche 10 639 noms de domaines à son compteur, depuis mars 2008. Elle veillait jalousement sur l'attribution du .tn ? Elle va devoir faire face au .tun, au .tunisie, au .tunisia, le .sousse, le .gabès, avec des variations sur le même thème en langue arabe. De quoi s'emmêler les pinceaux, à moins de finir une bonne fois pour toute d'adopter le laisser-faire, et le laissez-passer, pour le plus grand bien de nos internautes. On verrait bien nos équipes de football se transformer en revendeurs de noms de domaine. De quoi renflouer les caisses quand les supporters ne suivent plus. On aurait ainsi des extensions du style .etoile, .taraji ou .esperance. Et puis, puisque les responsables de l'ICANN parlent même d'offrir la possibilité de lancer des noms de domaines en arabe, ce ne sont pas les accents de la langue française qui la rebuteront. Alors on pourrait envisager des variantes sur le .espérance, par exemple. Imaginez des petits malins qui auraient réservé les noms de toutes les villes tunisiennes, par exemple. Ou encore l'extension .couscous. De quoi déclencher une course sans précédent entre les restaurateurs du Grand Maghreb. Gageons que les Tunisiens, plus rapides à la détente, paraît-il sauront se ruer avant tout ce beau monde sur le .couscous. Après tout un des noms de domaines avec des suffixes aussi évocateurs ne pourraient qu'aiguiser les appétits. Et il faudrait éviter absolument que des investisseurs des pays frères du Golfe, ne nous piquent la version arabe de notre semoule nationale. Ce qui est sûr, c'est que l'Icann va tirer le gros lot. Puisque pour chaque nouvelle extension, chaque nouveau nom de domaine, il faudra aligner les billets, pour faire tinter la timbale. Et après tout, il n'y a pas de raison que l'inflation ne touche pas aussi les noms de domaines.