Les situations trimestrielles de tous les OPCVM (Organisme de placement collectif en valeurs mobilières) qui conformément à la loi devraient être publiées n'ont pas encore été toutes publiées au bulletin du CMF et au JORT. Pour trois de ces organismes les commissaires aux comptes ont noté des situations qui ne répondent pas aux règles prescrites par la réglementation en vigueur. Le marché des OPCVM en Tunisie est constitué d'au moins 158 entités, en grande partie des Sicav. Les capitaux gérés par ces organismes se chiffrent à 2 321 MDT. Entre mixtes et obligataires, les Sicav sont au nombre de 35 à opérer sur le marché financier et sont en grande majorité des « outils » de collecte de l'épargne publique et d'investissement. Elles ont été créé en majorité par des banques de la place . Les actifs qu'elles gèrent sont un peu plus de 1 833 MDT (Source : CMF). Ce marché est réglementé par la loi 2001-83 du 24/7/2001, portant promulgation du code des organismes de placement collectif et par le décret 2001-2278; ainsi que le règlement du CMF du 29/1/2002 relatif aux organismes de placement collectif et aux sociétés de gestion de ces organismes. Ces textes fixent entre autres les conditions et les proportions d'investissements dans chaque type de produit entre valeurs mobilières, emprunts, BTA et liquidités. Au-delà des résultats (qui présentent par ailleurs l'un des moyens de financement du CMF), trois au moins de ces organismes qui ont déjà publié leurs comptes se sont faits épingler par leurs Commissaires aux comptes pour non-conformité avec les dispositions du code des organismes de placement collectif et, en particulier, l'article 29. Que dit la loi ? L'article 29 du code précise, en effet, que «les actifs d'un organisme de placement collectif en valeurs mobilières doivent être constitués de façon constante, essentiellement de valeurs mobilières et, à titre accessoire, de liquidités dans des conditions et limites fixées par décret. Les organismes de placement collectif en valeurs mobilières ne peuvent détenir plus de 10% d'une même catégorie de valeurs mobilières d'un même émetteur sauf s'il s'agit de l'Etat, des collectivités locales ou de valeurs mobilières garanties par l'Etat. De même, ils ne peuvent employer plus de 10% de leurs actifs en titres émis ou garantis par un même émetteur sauf s'il s'agit de l'Etat, des collectivités locales ou de titres garantis par l'Etat. » Selon l'article 2 du décret n° 2001-2278, les actifs des OPCVM doivent se composer, dans une proportion de 80%, de valeurs mobilières. Dans une proportion d'au moins 50% de valeurs mobilières admises à la cote de la Bourse ou actions ou parts d'organismes de placement collectif, emprunts obligataires ayant fait l'objet d'opérations d'émission par appel public à l'épargne, bons du trésor assimilables et emprunts obligataires garantis par l'Etat. Dans une proportion n'excédant pas 30% de valeurs mobilières représentant des titres de créance à court terme émis par l'Etat, valeurs mobilières représentant des titres à court terme négociables sur les marchés relevant de la Banque centrale de Tunisie. La proportion de 20% restante est constituée de liquidités et de quasi-liquidités. Les OPCVM ne peuvent employer plus de 5% de leurs actifs nets en parts ou actions d'OPCVM. Les 3 situations ! Ces trois OPCVM sont donc à la date d'arrêté des comptes trimestriels, en situation de non respect de ces proportions. Il s'agit de «Sicav Placements», gérée par «Sud Invest», une Sicav mixte filiale de la Banque du Sud. Il s'agit aussi de «Sicav Amen», une autre mixte gérée par «Amen Invest», filiale de l'Amen Bank. La dernière est la Sicav BH, une obligataire gérée par la Sifib, filiale de la Banque de l'Habitat. Pour la première, il a été constaté trois situations non conformes. D'abord «l'actif employé, à la date du 31 mars 2004, à raison de 6,31% uniquement des liquidités et quasi-liquidités, ce qui est en dessous de la proportion minimale de 20%». La deuxième relevée par le commissaire aux comptes «L'actif employé, à la date du 31 mars 2004, sous forme d'actions de la Banque du Sud à hauteur de 15,34%, une situation non conforme aux dispositions de l'article 29 du code des OPCVM». Rappelons que l'article 29 autorise l'acquisition d'actions à hauteur de 10%. La troisième situation est une proportion anormale (12,5%) des obligations d'une société touristique (Miramar) dont l'emprunt a été garanti par la banque. Pour «Sicav Amen», c'est un actif à 15% en titres émis ou avalisés par la banque mère, l'Amen Bank, toujours en contravention de l'article 29 du code des OPCVM. Pour la «Sicav BH», c'est un actif à moins de 50% (49,92 % pour être exact contre l'obligation des 80% requise par la loi) en valeurs mobilières uniquement. C'est aussi un actif à 23,63% formé d'emprunts obligataires et de certificat de dépôt BH! La banque prendrait même beaucoup plus de risque que nécessaire. Plus de 50% des actifs de la Sicav obligataire sont en certificats de dépôts à terme ! Responsabilité du CMF L'article 41 de la loi portant organisation du marché financier met les OPCVM sous la directe «tutelle», si l'on peut dire, du Conseil du marché financier. Pourtant, aucun communiqué du «tuteur» du marché financier n'a fait suite, à notre connaissance, aux remarques des trois Commissaires aux comptes. Il est a rappeler que L'article 53 donne au CMF le droit de contrôle dans le but de «s'assurer de la conformité de l'activité de ces organismes aux dispositions légales et réglementaires en vigueur. ( ) A l'effet d'accomplir ce contrôle, le Conseil du marché financier peut demander tous les documents et informations qu'il juge nécessaires et effectuer toutes investigations sur place, » !
Commentaires d'un professionnel du secteur : - Il ya lieu de rappeler qu'une situation trimestrielle constitue une photo de la situation à un moment donné (Dans ce cas le 31 mars). Elle ne traduit pas nécessairement la situation de la société ou d'un compte avant ou après cette date. Par ailleurs un retrait important d'un client de l'OPCVM quelques jours avant la fin du trimestre va entraîner une baisse de la valeur de l'actif et donc augmenter le % d'un titre dans le portefeuille au delà de ce qui est autorisé par la loi. - Le CMF appelle les gestionnaires et leur demande des explications des dépassements et vérifie qu'elles sont passagères, sinon il exige une régularisation dans des délais définis. - Certaines situations sont historiques et leurs régularisations nécessitent un délai plus long. Dans ce cas, le CMF peut accorder des délais supplémentaires lorsque l'intérêt du public n'est pas en jeu.