Si la crise a réussi jusque-là à affaiblir les règles de l'économie formelle, elle constitue le moment adéquat pour le renforcement de l'économie informelle, à savoir la contrefaçon. Certains se demanderont peut-être sur le rapport entre contrefaçon et crise financière. Le rapport existe bel et bien puisque les deux aboutissent au même résultat qui est le chômage. Et c'est là où peut venir le danger de la contrefaçon. Si la crise a engendré des licenciements de plus en plus étendus dans tous les pays du monde, la contrefaçon risque de renforcer cette tendance et mettre en danger les entreprises performantes, en particulier, et pour le tissu industriel, en général. Ce qui revient à dire que «se protéger contre la contrefaçon, c'est protéger l'emploi et la croissance», affirme M. Bahri Rezig, directeur de l'Agence nationale de la recherche et de l'innovation (ANRI), lors de la table ronde, organisée le 6 février 2009, par l'Ecole Polytechnique de Tunisie, en marge de son forum annuel. C'est que la contrefaçon atteint d'une façon agressive «les éléments de la propriété intellectuelle, à la base de tout développement économique d'un pays», soulignera pour sa part Mme Nébila Mezghanie, professeur de droit. Et si notre pays a promulgué lois et décrets pour faire face à ce fléau mondial, plusieurs actions restent encore à faire. La promulgation du Code de la Douane en 2008 est un acquis fondamental pour la lutte contre la contrefaçon, puisqu'il renforce le rôle des douaniers et élargit leurs interventions. Néanmoins, Mme Ichrak Benzine, juriste, estime qu'il est encore important de renforcer l'action pénale par la promulgation de dommages et intérêts adéquats et par la création d'une commission de réflexion qui rassemble juristes et techniciens pour discuter des actions qui doivent s'appliquer au regard des «contrefaiteurs». De son côté, M. Rezig a indiqué que deux actions doivent être entreprises : «intervenir en amont dans les universités, et en aval en assistant l'entreprise à évaluer son potentiel et la mettre en contact avec les laboratoires de recherche». Il est, donc, question de renforcer l'innovation au sein de l'entreprise de façon vigoureuse. Pour ne citer que l'exemple de l'entreprise TPR (Tunisie Profilé Aluminium) qui souffre depuis un bout de temps de la contrefaçon. «Nous avons trouvé que le développement de l'innovation pourrait être un moyen de lutte contre ce fléau. De cette façon, les contrefaiteurs se fatigueront vite et ne pourront plus suivre le rythme de l'entreprise. Il est aussi important d'agréer nos vendeurs pour que nos produits soient bien visibles aux yeux des consommateurs», pense-t-on du côté de TPR. Il y a toutefois lieu de se demander sur le rôle du consommateur, le premier concerné par la prolifération de la contrefaçon. Il suffit juste de faire un tour du côté de Moncef Bey et de Bou Mendil, par exemple, pour voir que les Tunisiens ont un engouement féroce pour le marché de la contrefaçon, du fait des prix très bas... -pouvoir d'achat oblige-, avec les risques que cela peut engendrer. Donc, la question qui se pose est de savoir comment conscientiser le Tunisien à la fois sur sa santé mais aussi sur les conséquences de ces pratiques sur la croissance de son pays... On aura compris qu'il faudra beaucoup de pédagogie, car nous sommes devant un noeud gordien: un pouvoir d'achat du citoyen qui s'érode de jour en jour et des conséquences sur l'économie du pays. Et par les temps qui courent, la solution est difficile à trouver!