Selon le rapport intitulé E-Commerce and Development Report 2004 (rapport sur le commerce électronique et le développement 2004), publié le 15 décembre par la CNUCED (Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement), les entreprises des pays en développement sont de plus en plus nombreuses à se raccorder à l´Internet, mais leur participation au commerce électronique demeure limitée. Bien que les petites et moyennes entreprises soient celles qui peuvent le plus gagner en productivité grâce au commerce électronique, elles ne tireront pas vraiment parti des TIC si elles ne possèdent pas de bonnes compétences administratives et techniques et de solides capacités en matière d´innovation. Ce que les PME, en particulier dans les pays en développement, ont souvent du mal à développer. Le rapport ne se limite pas aux données empiriques sur les TIC dans les pays en développement, mais contient une compilation de statistiques réalisées par la CNUCED sur l´utilisation des TIC par les entreprises de divers pays. Cette compilation s´inscrit dans le cadre d´une initiative commune à plusieurs organisations internationales. Elle aboutira à la création d´une base de données mondiale sur les indicateurs des TIC qui devrait aider les pays en développement à remédier au manque d´informations statistiques fiables et comparables au niveau international concernant l´utilisation des TIC, condition sine qua non pour l´élaboration d´une politique en matière de TIC. D´après le rapport, les entreprises, tout au moins dans les zones urbaines, ne rencontrent pas beaucoup de difficultés pour se procurer des ordinateurs et se raccorder à l´Internet, bien que les connexions demeurent lentes. Une étude effectuée conjointement par la CNUCED et la Fundación para el Desarrollo Sostenible en América Latina (FUNDES) dans les capitales de cinq pays latino américains (Chili, Colombie, Costa Rica, Mexique et Venezuela) montre que 97 % des PME recensées dans ces zones urbaines possédaient des ordinateurs personnels et 94 % avaient accès à l´Internet. D´après d´autres enquêtes citées dans le rapport, la moitié des entreprises évaluées en Thaïlande en 2001 possédaient des sites Web, en particulier celles travaillant dans le secteur du tourisme. Il ressort d´une autre enquête réalisée au Ghana en 2002, que 85 % des entreprises recensées avaient accès à l´Internet, 35 % disposaient d´un site Web et que 16 % s´étaient lancées dans le commerce électronique. Ces enquêtes et d´autres ayant un caractère plus sectoriel dont il est question dans le rapport (réalisées en Afrique du Sud, au Bangladesh, en Egypte, au Kenya, au Maroc, au Nigéria, en Ouganda et au Sénégal) aboutissent à des conclusions analogues: le nombre des entreprises qui ont accès à l´Internet est relativement élevé, mais elles sont peu nombreuses à s´être lancées dans le commerce électronique. Bien souvent, seul le propriétaire/directeur utilise l´Internet, surtout pour effectuer des recherches et envoyer du courrier par voie électronique. Plus d'acheteurs que de vendeurs en ligne L´automatisation et l´intégration des opérations en faisant appel aux TIC (transactions électroniques) sont beaucoup moins fréquentes dans les PME, et le commerce électronique demeure peu pratiqué, en particulier pour la vente: si le pourcentage des entreprises étudiées par la CNUCED qui achètent en ligne varie de 59 % parmi celles qui ont accès à l´Internet au Costa Rica à 16 % au Mexique, la proportion de celles qui vendent en ligne est beaucoup plus faible, de 30 % au Costa Rica à 2 % en Colombie. Les sociétés de services sont celles qui ont le plus recours aux transactions électroniques, les entreprises commerciales et manufacturières tardant à les suivre. Cela pourrait s´expliquer par le fait que les fonctions de commercialisation et de vente nécessitent une utilisation relativement élémentaire de l´Internet, alors que la gestion de la chaîne d´approvisionnement, qui est un élément important dans le secteur manufacturier, exige une intégration plus poussée des systèmes. Les PME, où qu´elles se trouvent, mais de manière plus marqué dans les pays en développement, éprouvent des difficultés à avoir recours aux TIC pour intégrer leurs opérations. Les obstacles les plus souvent cités à l´utilisation des TIC par les entreprises qui ont participé à l´enquête de la CNUCED sont leur coût (48 %), le manque de compétences du personnel (42 %), la brièveté de vie des logiciels (41 %), l´absence d´une correspondance entre l´offre et la demande de TIC (38 %) et le manque de clients ou de fournisseurs disposés à s´engager dans des transactions électroniques (34 %).
Les principaux freins au développement du commerce électronique sont pratiquement les mêmes pour les PME des pays en développement qui utilisent déjà l´Internet et pour leurs homologues des pays développés: manque de sécurité (71 %), coût de réalisation (41 %), "perte de temps" (37 %), absence de volonté de la part des clients/fournisseurs (33 %), lenteur et instabilité des connexions (32 %). De plus, la plupart des PME n´ont pas de stratégie bien définie en matière de commerce électronique, en raison bien souvent du manque d´intérêt des propriétaires/cadres pour les TIC. D´après le rapport, l´établissement de partenariats entre des organismes publics et des intervenants du secteur privé peut apporter un soutien décisif aux PME en remédiant à ces obstacles grâce à des politiques qui ont pour but d´améliorer l´accès (en termes de qualité et de coût), de susciter une confiance dans l´Internet et d´améliorer les capacités administratives et techniques. Encourager les PME des pays en développement à utiliser les TIC devrait être également l´une des grandes priorités des cyberstratégies nationales qui constituent des moyens importants pour l´avancement de la société de l´information préconisé par le Sommet mondial sur la société de l´information qui a eu lieu l´année dernière. Dans la perspective du deuxième volet du Sommet mondial qui doit avoir lieu à Tunis à la fin de 2005, le rapport recommande la formation d´un consensus sur les mesures nationales et sur le soutien et l´environnement internationaux qui sont de nature à conduire à l´utilisation accrue des TIC par des entreprises de pays en développement. Gouvernance de l´Internet :Trouver un équilibre entre les préoccupations politiques Le Rapport sur le commerce électronique et le développement analyse également la question de la gouvernance de l´Internet, qui va probablement retenir largement l´attention au Sommet de Tunis et pendant toute la préparation du Sommet. D´après le rapport, il est devenu absolument nécessaire de revoir les mécanismes de gestion applicables au fonctionnement de l´Internet pour répondre aux préoccupations politiques liées à l´instauration d´un équilibre entre les accords de gouvernance en vigueur, en particulier dans la perspective des intérêts et des besoins des pays en développement. En revanche, au regard de la compétitivité économique et étant donné la volonté politique nécessaire, les mécanismes actuels de coordination, de coopération et de réglementation internationales pourraient suffire pour résoudre bon nombre des problèmes de gouvernance économique et commerciale liés à l´Internet. Une distinction est parfois établie entre "gouvernance sur l´Internet" (qui désigne l´impact de l´Internet sur les activités sociales, culturelles, économiques ou politiques) et "gouvernance de l´Internet" (qui s´applique à la gestion des ressources de l´Internet). Le rapport semble indiquer que s´agissant de la gouvernance sur l´Internet, il convient de prendre avant tout en considération le fond de la question, et non le fait que l´Internet est le moyen par lequel l´activité qui pose problème est exercée, pour déterminer les instruments de gouvernance applicables. Pour ce qui est de la gestion des ressources qui sont à la base de l´Internet (par exemple le système des noms de domaine, les adresses IP ou les serveurs racines), le rapport fait valoir qu´il convient avant tout de s´entendre sur une définition commune des intérêts de la communauté internationale que doit servir le mécanisme de gouvernance de l´Internet, et de se mettre d´accord sur le mode d´intervention des Etats et d´autres acteurs. Pour la CNUCED, les réformes proposées doivent assurer la stabilité de l´Internet et le maintien de la qualité des services, empêcher le morcellement du système, assurer la véritable internationalisation de la gestion des établissements compétents et préserver les processus "ascendants" d´élaboration des politiques. Etant donné la complexité des liens entre les aspects technologiques et politiques, un réseau de forums différenciés de coopération et de coordination devrait, selon le rapport, avoir plus de chances de fournir des résultats généralement acceptables qu´un cadre unique de gouvernance qui engloberait tous les aspects.
Enfin, le rapport préconise une démarche évolutive et par étapes pour résoudre le problème de la gouvernance de l´Internet. Pour les pays en développement, le rapport précise en conclusion qu´il importe d´évaluer les conséquences de différents modèles de gouvernance de l´Internet, s´agissant en particulier de leurs incidences sur l´aptitude de leur économie à tirer profit des transactions électroniques pour améliorer leur productivité et leur compétitivité. Un grand nombre de pays en développement devront s´attacher à renforcer leur capacité en matière de politique de l´Internet s´ils veulent prendre une part active aux futurs mécanismes de gestion ou de gouvernance de l´Internet. Le rapport sur le commerce électronique et le développement 2004 aborde également d´autres questions liées aux répercussions sur le développement économique de l´utilisation des TIC par des entreprises et des organismes publics, s´agissant notamment de l´Internet et des secteurs créatifs, de l´enseignement supérieur en ligne, de la passation de marchés en ligne par les administrations publiques dans les pays en développement, de la protection de la vie privée dans un monde en ligne et de l´évaluation de la compétitivité dans le secteur des TIC dans le cas de la Tunisie.