En optant pour l'intensification des mesures préventives tous azimuts, nos forces de sécurité intérieure, jusque-là sur la défensive, sont désormais bien parties pour relever le défi terroriste. Pourvu que ça dure... Des barrages de policiers armés jusqu'aux dents un peu partout dans les carrefours et axes routiers, des opérations de contrôle de papiers et de fouille des véhicules presque triplées, des descentes dans les mosquées et les quartiers suspects de plus en plus fréquentes... C'est là, en bref, le décor planté aux quatre coins de la République, témoignant ainsi parfaitement de l'ampleur des mesures de sécurité exceptionnelles prises récemment, dans le sillage des opérations sanglantes de Raoued-Plage, Cité Ennassim et Jendouba. Il est vrai que l'hydre terroriste s'est débarrassée de ses habits de montagnard pour enfiler une tenue urbaine aux conséquences imprévisibles. Droit au but Ces mesures préventives, prises au cours de la dernière réunion du Conseil national de sécurité présidée par le nouveau chef du gouvernement, scellent enfin le recours, tant attendu et jusqu'ici bizarrement «oublié», à la tactique de «l'effet de l'anticipation», celle-là même qui va droit au but, sans attendre que le mal soit fait. «Plus question d'hésitation ou d'improvisation», jure une source policière au fait du dossier du terrorisme. Et d'expliquer: «Le fait de voir les jihadistes devenus de plus en plus menaçants nous condamne à passer à l'offensive, quitte à nous taxer d'envahissants, sachant que notre combat est, dans sa globalité, une cause nationale pour la réussite de laquelle toute la population doit s'impliquer, en nous facilitant la tâche». Pour un flic en patrouille, l'autre jour du côté de la Cité Ghazala, «ce message, pourtant imprégné des fondements du patriotisme et de la citoyenneté, n'est hélas pas encore reçu 5 sur 5, en raison de la réticence de certains que nos opérations de contrôle et de fouille gênent et dérangent, alors que c'est bien ce genre d'opérations préventives qui peuvent aider à identifier un terroriste, à découvrir armes et munitions et, par conséquent, à dissuader nos ennemis». Investigations non-stop Ceci sur le terrain. Mais l'état d'alerte sécuritaire est, également, à son paroxysme dans les départements du ministère de l'Intérieur où des équipes d'enquêteurs travaillent désormais 24 heures sur 24, à coups d'investigations visant à exploiter à bon escient le contenu de la banque des données alimentée par les aveux arrachés aux terroristes arrêtés ces jours-ci, sans compter le plus apporté par les informations précieuses distillées à satiété par les services de renseignements algériens et occidentaux. Il va sans dire que, conformément aux traditions policières, quand on est assis sur une telle mine d'informations, on n'a plus droit à l'erreur, même si la tâche, faut-il le reconnaître, demeure ardue et de longue haleine, étant donné les ramifications complexes des jihadistes et l'existence de cellules dormantes au nombre indéterminé et aux repaires non encore totalement identifiés. C'est pourquoi il a été décidé récemment de refaire confiance au défunt service de renseignements, ce corps d'espions qui a longtemps fait ses preuves du temps de l'ancien régime et qui a été, à la surprise générale, dissous au lendemain de la révolution. Rappelons que ce service avait, sous Ben Ali, abattu un travail colossal au niveau des districts de la sûreté nationale où on lui devait de retentissants coups de filet dans les rangs des intégristes.