Basculement du « Printemps arabe » ? L'Egypte qu'on croyait une longueur derrière nous dans la transition démocratique, tutoie l'histoire et inverse toutes les pesanteurs, au niveau de toute la région, avec, bien sûr, une onde de choc qui retentira peut-être dans le ciel clairsemé de la Révolution tunisienne. Vingt-quatre millions d'Egyptiens ne cessent de manifester sur instigation du mouvement « Désobéissance ». Réelle Intifadha et qui n'a rien à avoir avec le côté pâteux « petit-bourgeois » des soubresauts de la Société Civile de chez-nous sous-tendue par des partis dits progressistes, mais qui évoluent en rangs dispersés. Ce mouvement n'a bien sûr aucune de ces prétentions des « gardiens de la Révolution », il ne s'en arroge guère le droit ni le monopole, mais il a réussi à jouer sur la sensibilité populaire et, haute béance, à interpeller l'Armée. Pourquoi « haute béance » ? Car il est clair que l'ultimatum adressé par celle-ci est quelque peu irréalisable. Morsi quittera-t-il aussi facilement son fauteuil, son projet d'islamisation du pays même si, sur Twitter, Barak Obama s'est subitement ravisé de se rallier à la volonté populaire égyptienne laissant ainsi tomber son grand projet récupérateur du Printemps arabe sur la base d'un détournement des idéaux nationalistes et identitaires vers un morcellement de petits-Etats-nations arabes basé sur l'impératif islamiste ? La partie s'annonce difficile. Peut-on quand même toujours accréditer la thèse avancée, avec beaucoup d'emphase par les Egyptiens, selon laquelle l'Armée va arbitrer le jeu politique, superviser de potentielles nouvelles élections, et laisser se mouvoir un régime civil malgré le péril obscurantiste que font planer les Frères Musulmans sur l'Egypte et sur toutes les révolutions du Printemps arabe ? Peut-être les Egyptiens, dans leur majorité, se reconnaissent-ils dans leur armée, une sorte de roman des origines tel que prophétisé par Mohamed Ali puis concrétisé par Abdennasser. Malgré ses institutions, l'Egypte a, en fait, toujours été un régime militaire sauf durant la parenthèse Morsi. Elle l'est de facto redevenue. Car, historiquement, elle seule a toujours su combattre l'extrémisme égyptien. En fait, peut-être bien que la vraie révolution égyptienne a eu lieu hier, plutôt que le 25 janvier 2011. Du coup c'est la résurgence du Nassérisme. Comme celle du Bourguibisme chez-nous. A la seule différence que Nasser était un militaire et Bourguiba non. C'est juste une hyperbole. Pour le reste quelles implications a cette Révolution égyptienne sur la Tunisie ? Peut-être bien aucune, en fait… Car les réalités sont bien différentes…