Le ministre de l'Economie, des Finances et de l'appui à l'Investissement, Ali Kooli, a été l'invité de Anis Moraï dans l'émission “Dans le vif du sujet” du mercredi 21 octobre 2020 sur RTCI. Il est revenu, entre autres, sur le projet de la loi de Finances complémentaire et le projet de la loi de Finances de 2021. Il a d'abord décortiqué la situation économique et l'impact de la pandémie sur la loi de Finances de l'année 2021. “L'épidémie a eu un effet de ciseau avec des recettes beaucoup moindres qu'attendu. Nous espérions avoir 36 milliards, nous n'en aurons que 30, grâce à la loi de Finances complémentaire. Nous avons également eu des dépenses supplémentaires liées au traitement du Covid et aux mesures d'ajustement que le gouvernement a décidé de faire. Ce qui nous amène à des dépenses de l'ordre de 51.7 milliards de dinars. Le gap à financer était de 21 milliards”. Notant que la fusion des différents départements dans un seul et même ministère avait facilité le travail des autorités de façon significative, il a fait savoir que le retrait économique de 14% enregistré au premier semestre de l'année 2020 signifiait un déficit économique de l'ordre de 8% d'ici à la fin de l'année en cours. "La récession économique conjuguée aux dépenses supplémentaires inhérentes à la crise sanitaire nous mènera à un déficit budgétaire de l'ordre de 14%. Un chiffre jamais atteint dans l'histoire moderne de la Tunisie”, a-t-il signalé. Au sujet de la masse salariale de l'Etat, il a affirmé que le montant atteindrait 19.5 milliards de dinars soit 17 à 18% du PIB. S'ajoute à cela des dépenses qui, selon Ali Kooli, ont toujours étaient comptabilisées dans le budget d'investissement et non comme salaires. Il a évoqué, dans ce sens, l'accord signé entre le gouvernement et l'UGTT pour la régularisation de la situation de 31 000 ouvriers de chantier. “L'impact de cet accord sera de un milliard de dinars sur le budget de l'Etat”. Interpellé sur le budget alloué aux compensations, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'appui à l'Investissement a relevé des disparités entre les montants dépensés - qui continuent d'augmenter considérablement - et la courbe de consommation qui, elle, n'évolue pas à la même vitesse. “La compensation demeure difficile à chiffrer. Nous avons d'une part la compensation directe et d'autre part la compensation indirecte, notamment les aides de l'Etat aux entreprises publiques en difficulté. En combinant les deux, nous atteignons des montants importants avoisinant les dix milliards de dinars”, a-t-il expliqué. “Cette compensation conviendrait à l'Etat si elle allait aux gens qui la mériteraient. Or elle touche tout le monde: des gens qui sont dans le besoin et ceux qui le sont moins. Nous continuons, à titre d'exemple, de subventionner l'énergie, et donc le carburant, alors qu'il y a des gens qui disposent de véhicules qui consomment 5 à 6 litres et d'autres qui consomment 10 à 15 litres. Aussi, un grand nombre de produits subventionnés se trouvent aujourd'hui dans le circuit de la contrebande. Quand on importe du blé pour faire des pâtes et que le produit finit en aliment pour le bétail, c'est de la contrebande. Quand on subventionne le lait pour les populations les plus démunies pour le trouver dans des étalages transfrontaliers, c'est de la contrebande”, a-t-il soutenu. Pour ce qui de la dette de la Tunisie, Ali Kooli a tenu à préciser que d'ici la fin de 2020 le stock de la dette pourrait atteindre les cent milliards, ce qui représenterait 90% du PIB. “Le service de la dette sur 2020 et 2021 est effrayant si comparé aux années précédentes. En 2011 on payait 3.5 milliards de dinars soit 1.1 d'intérêts et 2.2 en capital. En 2020, on payera 15.6 milliards de dinars soit 4 en intérêts et 11.6 en capital”, a-t-il indiqué. “Ces chiffres, nous les subissons. Mais nous pouvons les traiter autrement. Nous allons, d'ailleurs, essayer de convaincre nos partenaires financiers de nous re-prêter cet argent et d'étaler les remboursements dans le temps. Avoir à rembourser 15 milliards sur une année pour un endettement de cent milliards, c'est quand même lourd”, a-t-il ajouté.