Immunité et impunité. Deux termes au sens totalement différent, mais dont la synonymie semble, pourtant, incontestable pour certains parlementaires. Vous l'auriez compris, il ne s'agit guère, dans cet énoncé, de l'immunité médicale qui préoccupe le monde aujourd'hui. Cela ne revêt pas l'importance nécessaire pour s'en préoccuper en Tunisie. Seulement, au grand dam de ce pays, le nombre de victimes de la pandémie ne cesse d'augmenter, alors que la campagne de vaccination laisse à désirer. De l'avis des experts, il faudra immuniser rapidement au moins 5 millions de citoyens, essentiellement ceux qui ont en le plus besoin, afin de dépasser la crise sanitaire et par conséquent espérer un tantinet de répit économique, parce que tout est lié. Nous en sommes à 2 millions de personnes inscrites et plus de 800 mille ayant reçu le vaccin et parmi elles, toutes ne sont pas prioritaires. Mais ça c'est une autre histoire. L'immunité anti-Covid attendra, pour le moment ce qui fait débat c'est la sacro-sainte immunité parlementaire. Et c'est une histoire assez embêtante, lorsqu'on constate que certains élus la confondent avec impunité, lorsque des élus du peuple s'y cramponnent sans vergogne. On dit même que certains de nos députés s'étaient cachés avant leur prestation de serment pour pouvoir en bénéficier et sauver leur peau. Le fait est que cette histoire d'immunité parlementaire ou de sa levée, c'est du réchauffé, elle est arrivée à point avec la dernière sortie du président de la République. Depuis un bon moment déjà, les médias évoquent la problématique. De sales affaires concernant des députés sont connues de tous et pourtant, ils se cachent derrière cette immunité en violation totale de ce dont dispose la constitution. Avec la complicité d'un système judiciaire au pas et surtout un appui inconditionnel du cheikh président du Parlement, qui ferme les yeux pour protéger ses précieux alliés (il faut les contenter pour ne pas fragiliser encore plus sa position au Parlement), nous nous retrouvons face à une bande organisée qui défend ses intérêts se jouant de la loi, de l'Etat de droit et des règles de la démocratie. Nous sommes face à des députés voyous qui se croient au-dessus des lois et des citoyens qui les ont élus, conforté dans leur conviction par une omerta motivée par de bas calculs politiques. L'assesseur nahdhaoui du président du Parlement chargé de la communication, Maher Medhioub n'a fait que défier quiconque s'avancerait à évoquer des demandes enterrées de levée d'immunité. Il dit au président de la République « Ghaltouk » (reprenant la célèbre expression de Ben Ali). Il lui intime de s'occuper d'autres affaires plutôt que de fureter dans celles des députés. Il défie aussi son collègue Nabil Hajji qui, documents à l'appui, affirme l'existence de plusieurs procédures de levée d'immunité. Il n'est jamais vain de rappeler que, contrairement à l'opinion courante, l'immunité parlementaire n'offre en aucun cas aux membres de l'Assemblée une impunité totale, mais seulement une certaine protection dans le cadre, exclusif, de leur travail. Cette disposition, qui existe dans de nombreux pays, vise en premier lieu à protéger le parlementaire, dans le cadre de ses fonctions, contre les pressions politiques ou autres, afin de garantir son indépendance. De ce fait, des affaires de harcèlement sexuel, d'évasion fiscale ou de blanchiment d'argent, de trafic, de contrebande ou d'infractions en tout genre ne peuvent aucunement dispenser un député de poursuites judiciaires, surtout si le flagrant délit est établi. On n'aura de cesse de rappeler les articles 68 et 69 de la constitution qui établissement clairement ces notions. Cette polémique ne fait que renforcer la méfiance des citoyens à l'égard d'un Parlement et de parlementaires (hormis quelques-un-e-s) dont les actes et les querelles ont fini par les discréditer irrémédiablement. Il est tout aussi flagrant que la question de l'immunité est utilisée comme étant un moyen de marchandage politique. La bande se joue des lois et des institutions de l'Etat pour pouvoir continuer à tirer les ficelles. Dans le cas d'espèce, il est de la plus haute nécessité de se poser la question : A quand la levée de l'impunité parlementaire ?