Comment embellir l'image de notre pays quand tous se bousculent et s'évertuent à la rendre plus terne ? Beaucoup de dossiers en rapport avec les relations de notre pays avec des instances étrangères ou internationales ont été au centre des débats politiques durant les derniers jours en Tunisie. Mais tous ces débats ont donné l'impression d'assister à un combat de coqs ou à des chamailleries dans la cour de recréation d'une école primaire. Aucune discussion sérieuse sur la politique étrangère tunisienne, ni aucune réflexion sur les moyens de normaliser nos rapports avec nos partenaires politiques, économiques ou financiers. En définitive, ce qui aurait pu être une belle opportunité pour un débat et une concertation nationale, a été une occasion supplémentaire pour diviser davantage les Tunisiens, sinon ceux qui se sont arrogé le droit aujourd'hui de parler en leurs noms. Pêle-mêle, ces dossiers de la discorde concernent l'appel à ne pas envoyer des dons de vaccins à la Tunisie, le report du sommet de la francophonie, le gel du parlement tunisien en tant qu'observateur au sein de l'union parlementaire européenne, la baisse de la note souveraine de la Tunisie par l'agence de notation Moody's, l'examen de la situation politique en Tunisie par le congrès américain et très prochainement par l'union européenne. Un énorme travail de sape, une débauche d'énergie et un lobbying « efficace » ont été nécessaires pour atteindre ce résultat peu glorieux. Par souci de sécurité face à la déferlante de l'agressivité dans le pays, on ne citera pas les noms des leaders des détracteurs du régime de Kaïs Saïed qu'ils soient des islamistes ou leurs acolytes, des partisans de la gauche ou des militants pour la démocratie et les libertés. Les autres, ceux qui ont choisi l'exil pour mener, têtes baissées, une campagne de dénigrement contre le régime ultra-présidentiel de Kaïs Saïed au point de ne plus faire la différence entre ce dernier et les Tunisiens, ils n'ont pas de quoi être fiers et ils ne seront pas cités non plus, mais par dégoût et mépris personnel. Seule la baisse de la note souveraine de la Tunisie échappe à ce harakiri. La dégradation de l'économie nationale depuis plus d'une décennie rendait cette baisse de la notation souveraine prévisible, attendue et même inéluctable.
Bien entendu, on aurait souhaité que les Tunisiens, partout où ils sont, donnent une image positive de leur pays. On aurait aimé que chaque Tunisien puisse être l'avocat de son pays à l'étranger et l'ambassadeur de sa nation. Il y a toujours un pincement au cœur en voyant des Tunisiens véhiculer une image négative de la Tunisie. Quand ils vont un peu loin et confondent les régimes en place avec le pays, ce que les régimes tentent toujours de faire, ils sont critiqués et hués même. Mais de là à les suspecter d'être des agents de l'étranger et les accuser de trahison, c'est excessif et montrer une émotivité à fleur de peau. Face à une dictature, ou un régime supposé comme tel, l'opposition a le droit de lutter pour un retour à la démocratie en utilisant tous les moyens disponibles y compris s'adresser aux organisations et instances internationales ainsi qu'aux ambassades pour leur donner une image fiable sur la situation, et pourquoi pas chercher leur protection contre l'oppression. Cela peu choquer les rêveurs et les cœurs fragiles. Mais dans un rapport des forces forcément déséquilibré entre la dictature et ses opposants, ces derniers ont le droit de se défendre au risque d'être anéantis et pérenniser la dictature.
En Tunisie, Kaïs Saïed aurait pu contourner aisément les manœuvres de ses opposants s'il avait été plus diligent, s'il avait annoncé son gouvernement plus tôt, s'il avait clarifié son agenda et s'il avait surtout engagé un dialogue avec les acteurs politiques, économiques et sociaux, même s'il aurait fallu écarter de ce dialogue, quelques uns parmi eux. Malheureusement pour lui et pour le pays surtout, il a refusé tout dialogue et s'est emmuré dans sa logique et son palais. L'image officielle véhiculée à l'occasion de la fête de l'évacuation, montrant le président de la République assis seul sur son fauteuil, à l'écart des autres dignitaires de l'armée et de l'Etat, était censée suggérer l'idée que Kaïs Saïed est le seul maitre à bord. Elle surtout montré un Kaïs Saïed seul, isolé, qui se cramponne à deux mains à son fauteuil.