Aram Belhadj, docteur en sciences économiques, enseignant-chercheur à l'Université de Carthage et expert-consultant, est revenu, vendredi 4 février 2022, sur la situation économique du pays, la visite d'Emmanuel Moulin et le communiqué de la Banque centrale de la veille. Au micro de La Matinale de Myriam Belkadhi sur Shems FM, M. Belhadj a écarté le fait que la visite d'Emmanuel Moulin soit dans le cadre de l'ouverture de négociations avec le Club de Paris. Mais, pour lui, les doutes des Tunisiens sont légitimes vu la situation économique et financière très délicate du pays et le manque de communication du gouvernement. La plus grande peur étant que la Tunisie aille au Club de Paris. Cela dit, la menace que la Tunisie soit incapable de faire face à ses engagements financiers reste de mise. Et d'expliquer que M. Moulin est connu pour être l'homme qu'on appelle en cas de crises. Pour lui, certes, il y a un appui technique de la France et des autres partenaires de la Tunisie, mais la venue de cet homme en Tunisie en ce timing, sous le silence des autorités tunisiennes et françaises, n'est pas anodin. Et de dénoncer le manque de communication des autorités tunisiennes.
S'agissant du communiqué de la Banque centrale de Tunisie, Aram Belhadj a salué la décision de l'autorité monétaire de ne pas augmenter le taux d'intérêt directeur, qui a priorisé l'intérêt national en ce temps de crise, car une hausse du taux, se traduira par une hausse du coût des crédits, empêchant les PME d'accéder au financement. Par contre, le chercheur a estimé que le ton utilisé par la BCT est un signal d'alerte tacite au gouvernement afin qu'il prenne ses responsabilités concernant le contrôle des circuits de distribution et des réformes structurelles en général. Si la situation persiste et que les pressions inflationnistes perdurent, elle sera obligée de tenir son rôle de maitrise de l'inflation, en augmentant le taux directeur. Pour lui, l'autorité monétaire a compris que la raison principale de la hausse des prix n'est pas la masse monétaire ou le glissement du dinar mais les circuits de distribution à cause du manque de contrôle et de l'application de la loi.
En ce qui concerne sa préoccupation par rapport au retard dans la mobilisation des ressources extérieures pour le budget 2022, l'économiste pense que la BCT a peur de reproduire le schéma de fin 2020 où elle a été obligée de fournir un financement direct au budget de l'Etat. Et de noter la lenteur de la mobilisation des ressources en général. Sa lecture est que la BCT encourage le gouvernement à prendre ses responsabilités en entamant des négociations sérieuses avec le Fonds Monétaire International (FMI), étant obligé de passer par cette institution financière internationale vu la crise qui secoue le pays. Elle pousse vers la préparation d'un programme global pour le soumettre au FMI, l'objectif étant d'avoir la première tranche, qui facilitera l'accès du pays à d'autres financements extérieurs outre le fait que cela nous permettra de baisser les coûts et charges liés à ce nouvel endettement.