L'enseignant et activiste politique Amara Ben Mansour est en détention depuis jeudi 10 mars 2022, affirment des sources familiales, pour avoir critiqué dans un statut Facebook, la « consultation nationale » initiée par le président de la République, Kaïs Saïed. Cela se passe à Sfax. Enseignant très engagé dans la vie publique et actif sur les réseaux sociaux, Amara Ben Mansour est accusé d'offense contre le chef de l'Etat. Une accusation qui pourrait aboutir à trois ans d'emprisonnement et une amende, comme le prévoit l'article 67 du code pénal.
Dans son statut, le prévenu a écrit ce qui suit : « Connexion gratuite, mais pas de semoule. Le slogan de la prochaine période est : participez à la consultation, on vous donnera un sac (de semoule) ». Une publication qui n'a rien d'insultant, surtout que les Tunisiens ont été nombreux à ironiser sur la décision de gratuité d'internet pour participer à la consultation présidentielle. D'après un parent, Amara Ben Mansour avait soutenu activement la campagne de Kaïs Saïed lors de l'élection de 2019, mais qu'il a, comme beaucoup de citoyens, critiqué les dérives post-25 juillet. Ce parent affirme d'ailleurs avoir été coordinateur de la campagne électorale du candidat Saïed à Sfax et avoir convaincu son beau-frère de se joindre au mouvement. Il a fait part de sa grande déception du fait qu'on emprisonne des citoyens pour avoir exprimé une opinion libre.
Le député islamiste Samir Dilou a, pour sa part, commenté, dimanche 13 mars 2022, cette arrestation. Usant de sarcasme, il a s'est exprimé en ces termes : « Je n'ai porté plainte contre personne… mais celui qui parle se retrouve en prison », rappelant les paroles du président qui a assuré à plusieurs reprises qu'il n'est jamais intervenu pour museler les libertés. Samir Dilou relève que l'enseignant n'est pas la première personne à être emprisonnée à cause de cette accusation « ridicule » sur fond d'un post sur les réseaux sociaux et que malheureusement ce ne sera pas la dernière. « Soit le président de la République ignore que des dizaines de citoyens sont poursuivis pour avoir commis une offense à son encontre, et cela est dangereux et ouvre la porte à diverses interprétations ; soit il est au courant et ne s'y oppose pas. Dans ce cas, on peut considérer qu'il s'agit d'une plainte avec effet rétroactif ».