Le président du Cercle des financiers tunisiens (CFT) et professeur en économie à l'Institut des Hautes études commerciales de Carthage, Abdelkader Boudriga a considéré que l'annonce du président de l'Agence japonaise de coopération internationale, Akihiko Tanaka faisant part que toute assistance financière au profit de la Tunisie dépendait des négociations avec le Fonds monétaire international (FMI), était compréhensible. Il a expliqué que la majorité des bailleurs de fonds et pays attendaient l'aval et le soutien du FMI à un Etat donné afin de l'appuyer financièrement et qu'il s'agissait de l'un des fondements de la coopération internationale. Invité le 30 août 2022 par Hatem Ben Amara sur les ondes de Jawhara Fm, Abdelkader Boudriga a expliqué que les Etats et bailleurs de fonds attendaient généralement l'aval du FMI afin d'éviter toute contradiction entre la politique d'un pays et celle de cette institution. Il a, aussi, déploré le manque d'information et de précisions au sujet des promesses japonaises envers la Tunisie. « Nous n'avons aucune idée sur ces promesses, sur leur volume ou sur les points ayant fait l'objet de négociations... La Ticad n'est pas un sommet tuniso-japonais portant sur l'investissement japonais en Tunisie ou un sommet tuniso-japonais portant sur l'investissement tuniso-japonais en Afrique... Il s'agit de géopolitique... L'Afrique a la possibilité d'être, dans les prochaines années, la locomotive de l'économie mondiale », a-t-il ajouté. Abdelkader Boudriga a affirmé que la majorité des Tunisiens avaient mal interprété les objectifs de la tenue de ce sommet. Il a assuré qu'il ne s'agissait pas d'un sommet économique d'investissement. Il a considéré que le sommet portait sur le positionnement du Japon et son rôle dans la croissance et le développement des transactions en Afrique. « Le Japon cherche à jouer ce rôle en améliorant les conditions de vie... Il ne s'agit pas d'un sommet tuniso-japonais ! Nous avons présenté 81 projets dans le secteur privé et 46 projets dans le secteur public. Seulement trois de ces 120 projets ont été acceptés ! Nous n'avons pas mal présenté les projets ! Nous nous sommes trompés de cadre... Il ne s'agit pas de sommet portant sur la présentation de projets ! », a-t-il insisté.
Le président du CFT a expliqué que la Tunisie aurait dû présenter un projet transcontinental tel que la mise en place d'un observatoire africain. Ce dernier aura pour tâche d'élaborer des études portant sur des questions touchant l'ensemble de l'Afrique telles que la migration, l'innovation et les nouvelles technologies. Ce projet aurait pu être soutenu par la Tunisie et une quinzaine de pays et obtenir la validation des organisateurs. Il a déploré l'attitude de la Tunisie vis-à-vis du reste du continent. Il a expliqué que les autorités tunisiennes se croyaient supérieures au reste de l'Afrique, en plus d'essayer de séduire les pays étrangers en se présentant comme l'unique choix leur permettant d'accéder au reste du contient. Il a mis l'accent sur la montée de plusieurs puissances économiques telles que le Maroc, l'Afrique du Sud, l'Algérie, le Sénégal et le Rwanda. Il a expliqué que ces pays contrôlaient en partie le marché africain. La Tunisie, selon lui, pourrait jouer le rôle de façade ou se focaliser sur l'entrepreneuriat et la formation en Afrique. « A la fin du sommet, avons-nous eu des témoignages ou des déclarations portant sur des success story ? Non ! Nous nous sommes trompés de cadre... Il y a eu une réussite au niveau de l'organisation... La Tunisie aurait dû présenter ses atouts et mettre en valeur l'apport possible à la collaboration entre les pays africains et le Japon. Or, nous avons cherché à tirer profit d'une collaboration tuniso-japonaise... Finalement, nous n'avions rien récolté ! », s'est-il exclamé. Par la suite, Abdelkader Boudriga a affirmé que la pénurie de marchandises en Tunisie portait uniquement sur les produits importés par l'Etat. Il a considéré qu'il ne s'agissait pas d'une défaillance de l'administration tunisienne, car elle procédait à l'importation de ces marchandises depuis des dizaines d'années. Il a évoqué l'impact de la propagation du Coronavirus et de la guerre russo-ukrainienne, néanmoins ceci n'explique pas la pénurie. Il a conclu qu'il s'agissait d'un problème de ressources financières. Il a révélé que depuis le mois d'avril, date de la baisse de la note de souveraineté par l'agence Fitch rating, plusieurs banques étrangères avaient changé de politique vis-à-vis des entreprises publiques. Les entreprises publiques ne peuvent plus mobiliser des fonds auprès de ces établissements et doivent honorer leurs engagements à la livraison des marchandises. Il a expliqué que les fournisseurs de marchandises exigeaient cela en raison de la baisse de notation et de la situation économique du pays. Il a considéré que la Tunisie devait revoir le système d'importation de certaines marchandises telles que le café et le sucre. Le président du CFT a estimé qu'un taux d'inflation idéal devrait être aux alentours des 2% à 3%. Il a rappelé que le taux actuel en Tunisie était de 8% et qu'il s'agissait d'un taux assez élevé. Il a assuré que le calcul du taux d'inflation et des hausses des prix se faisait conformément aux standards internationaux. Il a rappelé que la hausse des prix de certains produits tels que les voitures résultait des taxes mises en place par l'Etat. La pression fiscale n'est pas prise en considération dans le calcul du taux d'inflation. Il a, aussi, évoqué l'impact du manque de contrôle en raison de l'affaiblissement de l'Etat.