L'ancien ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique, Gordon Gray a considéré que le mois de décembre était allé, pour le président de la République, Kaïs Saïed, de mal en pis. Il a évoqué une série d'échecs, dont sa première visite à Washington dans le cadre de sa participation au "US-Africa Leaders Summit" du 13 au 15 décembre 2022 et le rapport à la date du 14 décembre 2022 par le conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) de l'étude du dossier tunisien. Dans un article publié à la date du 26 décembre 2022 au journal "The National Interest" et intitulé "Où se dirigent les relations américano-tunisiennes après le désastreux décembre de Saïed ?" (Whither U.S.-Tunisian Relations After Saied's Disastrous December?), l'ancien ambassadeur a évoqué la courte introduction de Blinken combinée à une série de remarque face à un président qui, selon lui, parlait trop et d'une façon ennuyeuse. Décrivant davantage l'allocution de Kaïs Saïed, il l'a qualifié de « faibles tentatives d'humour et commentaires défensifs. (personne n'a prétendu que Saïd était un orateur doué)». L'échec de cette visite concerne, également, l'entretien entre le chef de l'Etat et les journalistes et le comité de rédaction du Washington Post. L'ancien ambassadeur a considéré qu'il s'agissait d'un véritable désastre en matière de relations publiques. Il a rappelé que le Washington Post avait toujours soutenu la démocratie en Tunisie. Malheureusement, suite à cet entretien, le journal a considéré que Kaïs Saïed s'était contenté d'user de tactiques et d'arguments caducs et auxquels les autocraties avaient continuellement recours.Kaïs Saïed avait dénoncé, lors de cette rencontre, des forces étrangères non identifiées tentant de susciter l'opposition à son régime. Le retour de Kaïs Saïed en Tunisie a été accompagné, selon Gordon Gray, d'événements encore plus pénibles. L'ancien ambassadeur a évoqué le faible taux de participation aux élections législatives du 17 décembre 2022. Il a expliqué ce phénomène par le boycott de l'opposition et l'indifférence des électeurs. Il a expliqué que le record de la participation la plus faible dans le monde était désormais lié à ces législatives. Le jour même des législatives, l'Instance supérieure indépendante pour les élections avait annoncé que seulement 8,8% des électeurs avaient exercé leur droit de vote. Ce chiffre a atteint par la suite les 11,2 %, mais demeure toujours le record du monde de la plus faible participation à des élections. Gordon Gray a indiqué que le changement du taux de participation a suscité une certaine méfiance en raison des atteintes à l'indépendance de l'instance chargée des élections. L'ancien ambassadeur a conclu qu'aucun des deux chiffres ne reflétait une confiance en Kaïs Saïed ou une légitimité de ce dernier. Gordon Gray a souligné la solidité des relations tuniso-américaines. Il a rappelé que Thomas Jefferson avait organisé une rupture de jeûne à la Maison Blanche en décembre 1805 à l'occasion d'une visite tunisienne durant le mois de ramadan. Il a évoqué les liens d'amitié entre feu Habib Bourguiba, leader du mouvement indépendantiste tunisien, et l'ancien consul des USA en Tunisie durant la Deuxième Guerre mondiale. Il a rappelé que le consul était le seul américain à avoir une rue en son nom en Tunisie. Gordon Gray a évoqué les déclarations et communiqués du département d'Etat signalant une dégradation des normes démocratique et les atteintes à l'indépendance des institutions de l'Etat. Il s'est interrogé sur l'attitude à adopter par l'administration Biden face à un retour vers l'autocratie. Il a évoqué une possible pression à travers l'introduction de conditions dans le cadre de l'accord que le gouvernement tunisien cherche à conclure avec le Fonds monétaire international (FMI). Il a appelé l'administration Biden à inviter des représentants de la société civile tunisienne et non les membres du gouvernement à participer au Sommet pour la démocratie qui se déroulera les 29 et 30 mars 2023. Gordon Gray a affirmé que la déclaration du département d'Etat le lendemain des élections n'était pas une forme de soutien au système de Kaïs Saïed. Il a rappelé que la déclaration appelait à plus de réformes transparentes et inclusives, dont l'octroi de plus de prérogatives au parlement, la mise en place de la cour constitutionnelle et la préservation des droits humains et des libertés fondamentales pour l'ensemble des Tunisiens. Il a considéré que l'application de l'accord du Millennium Challenge Corporation (MCC) n'était possible que suite à un retour vers la démocratie. Cet accord porte sur un montant égal à 498 millions de dollars. Il vise à faciliter les échanges commerciaux avec la Tunisie et à diminuer leurs coûts. L'accord inclut des investissements visant la gestion, l'expansion et la numérisation du port de Radès.