L'Association des Magistrats Tunisiens (AMT) a indiqué que les juges étaient sous pression en raison des arrestations visant des personnalités publiques, des politiciens, des journalistes et des syndicalistes. L'association a considéré que les magistrats chargés de trancher dans ces affaires avaient fait l'objet de menaces de la part du président de la République, Kaïs Saïed et de la part d'activistes et de pages sur les réseaux sociaux. Dans un communiqué du 4 mars 2023, l'AMT est revenue sur la suspension d'un juge d'instruction au sein du pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, la fermeture de son bureau, le changement des serrures et la saisie du conseil provisoire de la magistrature dans le but de le limoger. Le communiqué de l'AMT fait référence au juge d'instruction chargé du dossier de Hattab Ben Othman, secrétaire général du Syndicat national des agents et des cadres de la justice. Il n'avait pas émis de mandat de dépôt à l'encontre de ce dernier. Sa décision avait été fortement critiquée par les soutiens du président. L'AMT a estimé que sa suspension était un dangereux précédent visant à terroriser les magistrats et à les soumettre aux instructions et à la volonté du pouvoir exécutif. L'AMT a mis en garde contre les déclarations du chef de l'Etat au sujet des magistrats et a estimé qu'il s'agissait d'une ingérence dans le déroulement des enquêtes et d'une atteinte aux principes de la séparation des pouvoirs, du procès équitable et de l'indépendance de la justice. L'AMT a appelé le président de la République et le pouvoir exécutif dans l'intégralité de ses composantes à respecter l'indépendance du pouvoir judiciaire et à respecter ses prérogatives constitutionnelles. Elle a appelé à mettre fin aux discours basés sur les menaces en raison des pressions politiques qu'ils apportent. L'AMT a demandé au ministère de la Justice et au pouvoir exécutif de mettre fin à leur intention de vengeance visant les magistrats et à ne plus se servir de l'inspection générale dans ce but-là. L'association a estimé que le ministère de la Justice harcelait les juges et leur portait atteinte en raison de leurs décisions et jugements. L'AMT a appelé les juges, notamment judiciaires, à s'attacher à leur indépendance et à leur impartialité et à faire preuve de courage. Les juges sont appelés à appliquer la loi sans prendre en considération les menaces, les pressions ou les instructions quelle que soit leur origine. L'association a exprimé son étonnement quant à la politique du silence et de l'indifférence adoptée par le conseil provisoire de la magistrature. Elle a évoqué la dégradation de la situation du pouvoir judiciaire à travers la révocation de façon unilatérale de magistrats, le refus d'appliquer des jugements du tribunal administratif ordonnant le rétablissement des magistrats révoqués, l'entame de procédures judiciaires non-fondées envers une partie d'eux et le refus de rendre public le mouvement des magistrats. Ceci porte atteinte à leur droit de demander d'être transféré et aux droits des justiciables en raison des postes vacants au niveau de plusieurs tribunaux. L'AMT a demandé au conseil provisoire de la magistrature de sortir de son silence et de jouer son rôle de garant de l'indépendance de la justice conformément au texte sur lequel ses membres ont prêté serment. Ils avaient juré de défendre l'indépendance de la justice et de barrer la route aux mesures arbitraires y touchant. L'AMT a appelé l'intégralité des organisations nationales et internationales et les composantes de la société civile à se tenir aux côtés de la justice indépendante et à protéger les magistrats indépendants du terrorisme et la pression auxquels ils font face et visant à les pousser à appliquer certaines instructions.