La révolte du pain en Tunisie entre 1983 et 1984 a été déclenchée par la décision du gouvernement de Mohamed Mzali d'augmenter les prix des produits céréaliers en réduisant les subventions gouvernementales. Cette décision était motivée par les pressions exercées par le Fonds monétaire international (FMI) dans le cadre d'un programme d'ajustement structurel visant à réduire les déficits budgétaires et à maîtriser l'inflation. L'annonce de la réduction des subventions a suscité une vive réaction parmi la population tunisienne, en particulier parmi les classes populaires qui dépendaient fortement des produits céréaliers subventionnés, tels que le pain. La réduction des subventions a entraîné une augmentation drastique des prix des produits céréaliers, tels que les pâtes et la farine, avec une augmentation de 110 %. Cette hausse des prix s'est directement répercutée sur le prix du pain, qui est passé de 80 à 170 millimes ce qui a eu un impact immédiat et significatif sur le coût de la vie pour de nombreux Tunisiens, aggravant ainsi les difficultés économiques déjà existantes.
Les manifestations ont commencé le 27 décembre 1983, initialement à Douz, Kebili, Gabès et se sont rapidement étendues à d'autres villes, notamment Tunis, Sfax, Sousse et Kairouan. Les manifestants ont exprimé leur colère en descendant dans les rues, en bloquant les routes, en brûlant des pneus et en lançant des pierres sur les forces de sécurité.
La réaction du gouvernement a été initialement répressive, avec des affrontements violents entre les forces de sécurité et les manifestants. Des arrestations massives ont été effectuées et des cas de torture et de mauvais traitements ont été signalés. Les émeutiers sont essentiellement des jeunes et des paysans pauvres, des travailleurs saisonniers ou des chômeurs. Ils sont appuyés par les étudiants qui déclenchent une grève de solidarité.
Les policiers sont débordés et le Président Habib Bourguiba proclame l'état d'urgence. Tunis et sa banlieue s'embrasent le 3 janvier 1984 et les émeutes se poursuivent pendant trois jours malgré la proclamation de l'état d'urgence et le couvre-feu décrétés dès le 1er janvier. L'armée intervient avec des blindés et rétablit l'ordre le 5 janvier 1984. Bilan : plus de 150 morts et des centaines de blessés. Cependant, l'escalade de la violence et l'ampleur des manifestations ont finalement conduit le gouvernement à reculer. Le 6 janvier 1984, le Président Habib Bourguiba convoque la télévision et indique : "Toutes les augmentations sont annulées, on revient à la situation initiale, ce qui m'a influencé c'est qu'on m'a dit que le pain se vendait pour servir de fourrage aux vaches, et puis j'ai demandé à Zakaria Ben Mustapha lors d'un conseil ministériel si c'était vrai que les poubelles contenaient du pain et il m'a confirmé l'histoire... J'accorde un délais de trois mois au gouvernement pour refaire les calculs et faire de sorte de préserver le prix des produits céréaliers et augmenter par exemple les prix d'alcool et de vin".