La Banque tunisienne de Solidarité (BTS) a annoncé le lancement d'un nouveau produit à savoir des crédits dédiés aux fameuses entreprises communautaires si souvent évoquées par le président de la République, Kaïs Saïed, et ses soutiens. D'ailleurs, le lancement de ce nouveau type de crédit a été rendu public le 14 juin 2023, soit le lendemain de la visite du chef de l'Etat à Redayef où il a évoqué la question de ces entreprises. Le président de la République avait appelé des manifestants, s'étant rassemblés à l'unité de production de phosphate, à entreprendre des projets privés et à exploiter les terres agricoles pour les revitaliser et créer de la richesse. Il avait déclaré : « Je ne vends pas d'illusions et je vous prépare la voie pour créer de la richesse à travers des sociétés communautaires ». Le lendemain de cette déclaration, la BTS s'est empressée de rendre public le lancement de ce nouveau produit tout en expliquant qu'il s'agissait de prêts à des taux préférentiels et sans autofinancement. Le taux d'intérêt est de seulement 5% avec un délai de grâce pouvant aller jusqu'à un an. Le remboursement, quant à lui, peut aller jusqu'à sept ans. Notons que le plafond du montant pouvant être accordé n'a pas été publié par la banque. La question de la mise en place de ce type de crédit n'est pas vraiment surprenante puisque la loi de finances relative à l'exercice 2023 avait annoncé la chose dans son article 29. Ce dernier indique qu'une ligne de crédit sera mise en place au profit des entreprises communautaires et précise que les prêts seront octroyés à des taux préférentiels. La ligne de crédit dispose d'un fond à hauteur de vingt millions de dinars. Business News a essayé de joindre la BTS au numéro affiché sur le site web dans l'entreprise. Néanmoins, en appelant le 70 018 424, nous avons eu droit à un message nous demandant de bien vérifier le numéro composé. En contactant une agence de la BTS, Business News a appris que les crédits variaient de 150.000 à 200.000 dinars. Or, avec un minimum de 150.000 dinars pour une ligne de 20 millions de dinars, on ne peut créer que près de 134 entreprises communautaires. Ce chiffre semble dérisoire puisque ce type de structure est censé créer de la richesse et réaliser un développement économique local et régional, voire au final national, selon les espérances présidentielles. Supposons que ce type d'entreprise vise directement et exclusivement les chômeurs. Le nombre total de ces derniers s'élève à 655.000 selon les derniers chiffres publiés en mai 2023 par l'Institut national de statistique. Rappelons qu'une entreprise communautaire doit être formée par, au moins, cinquante personnes. Ceci signifie qu'il nous faudra plus de 13.000 pour absorber le nombre total de chômeurs. Ce qui est interpellant dans ce genre d'affaires reste l'absence de précision au sujet du plafond, mais aussi, l'octroi de crédit à des taux préférentiels à un type de structures qui n'a toujours pas prouvé son efficacité. D'ailleurs, ce type d'entreprise n'a pas séduit les Tunisiens. Jusqu'à maintenant, nous avons appris la création de seulement cinq structures du genre alors que le décret relatif à ces entreprises a été publié le 21 mars 2022, soit depuis près d'un an et demi. Le ministre des Affaires sociales, Malek Zahi, a annoncé, le vendredi 6 janvier 2023, que cinq entreprises ont été créées et que 35 autres étaient en cours de création. Depuis cette annonce, les informations se font rares au sujet des entreprises communautaires. Même les soutiens du Président et ceux qui se disent proches du palais de Carthage n'en parlent que rarement. Ils préfèrent aborder la question d'un accord imaginaire entre la Tunisie et le groupe des Brics. Autre critique adressée à la mise en place de cette ligne de crédit, les avantages très limités et insuffisants au profit des PME. Plusieurs experts ont insisté sur le rôle important joué par ces structures dans le tissu économique national. Une partie des professionnels, quant à elle, considère que l'Etat met en place des conditions d'accès à ces avantages et à ces lignes de crédits beaucoup trop exigeantes et inatteignables. De plus, la mise en place de cette ligne de crédit signifie qu'au final la Tunisie se mettra à dépenser de l'argent pour un projet qui n'est pas censé lui assurer des revenus.