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Tunisie : Un marché carbone en attente
Publié dans Business News le 21 - 10 - 2023

La Tunisie n'a pas encore mis en place son marché du carbone, mais des efforts ont été déployés en 2019 avec le projet "Assistance à la fixation des prix du carbone et à l'établissement de la contribution nationale dans ce domaine". Un projet dont les mécanismes s'alignaient sur les spécificités tunisiennes, avec pour objectif de réduire son intensité carbone nette de 45 % d'ici 2030 par rapport à celle de 2010.
Un marché du carbone est un lieu où les équipes de gestion des organisations peuvent acheter et vendre différents instruments liés aux émissions de gaz à effet de serre. Les deux types d'instruments échangés sont les crédits carbone et les compensations carbone.
Il existe aussi deux types de marchés du carbone : les marchés volontaires et les marchés de conformité. Les marchés de conformité peuvent être désignés sous différentes appellations selon les régions, comme marchés réglementés et systèmes de commerce des émissions.
Le Protocole de Kyoto en 1997 a été significatif dans la mesure ou pour la première fois la participation internationale aux marchés du carbone a commencé à devenir plus courante. Cependant, avec l'absence des Etats-Unis et de la Chine dans cet accord, une adoption généralisée est restée difficile à atteindre.
Ce changement a débuté en 2015, lorsqu'un accord historique a été conclu par 196 Parties à la COP 21, l'Accord de Paris. Cet accord, qui revêt une importance cruciale dans la gestion du changement climatique, a pour objectif ultime de limiter les émissions mondiales et d'instaurer la responsabilité des pays en matière de réduction de leur empreinte carbone.
L'Accord de Paris constitue une base solide et ambitieuse pour l'utilisation des marchés internationaux. Il renforce les objectifs mondiaux, promeut la transparence et l'obligation de rendre compte des Parties. L'article 6 de cet accord reconnaît l'importance des marchés internationaux du carbone. Il permet aux Parties d'utiliser le commerce international de quotas d'émissions pour contribuer à atteindre les objectifs de réduction des émissions. Il établit un cadre de règles comptables robustes et crée un mécanisme de marché plus ambitieux.
Les marchés du carbone reposent sur le concept de comptabilité carbone, qui est essentiel pour évaluer les émissions de gaz à effet de serre. Cette comptabilité carbone joue également un rôle central dans l'analyse ESG (Environnement, Social et Gouvernance).

Les marchés du carbone, qui ont longtemps manqué d'élan, sont désormais devenus un outil majeur dans la lutte contre le changement climatique. À la fin de 2021, plus de 21 % des émissions mondiales étaient soumises à une forme de tarification du carbone, comparativement à 15 % en 2020. Les entreprises sont de plus en plus tenues de payer des régulateurs pour émettre une tonne de dioxyde de carbone dans l'atmosphère. Les investisseurs manifestent également un intérêt croissant, avec une augmentation de 164 % du volume des échanges sur ces marchés en 2022, atteignant 760 milliards d'euros. Les prix du carbone favorisent les entreprises qui adoptent des pratiques respectueuses de l'environnement, tandis que les émetteurs importants sont désavantagés en termes de compétitivité. Les revenus générés par la vente de permis d'émission peuvent être réinvestis dans des projets liés aux énergies renouvelables et à d'autres initiatives vertueuses.
Cependant, un problème subsiste : la plupart des marchés ne fonctionnent pas comme prévu. Parmi les 64 taxes sur le carbone et les systèmes d'échange d'émissions en 2021, seule une petite minorité, couvrant 3,8 % des émissions, fixe un prix du carbone supérieur à 40 dollars par tonne, un montant que la Carbon Price Leadership Coalition estime comme le coût social minimum. La plupart des marchés du carbone sont insuffisamment chers pour avoir un impact significatif. Souvent, la pression politique pousse les gouvernements à maintenir des prix bas.
Le deuxième problème est que de larges pans de l'économie sont souvent exclus. Les entreprises industrielles font valoir que les inclure dans un ETS solide confère un avantage injuste aux exportateurs de pays ayant un prix du carbone plus bas.
Ceci dit le fonctionnement des marchés du carbone relève davantage d'un défi politique que d'un défi économique. Abaisser les plafonds d'émissions totales ou étendre la couverture à davantage de secteurs ne nécessite pas une refonte profonde de la conception des marchés du carbone. La difficulté réside plutôt dans la création et la préservation du soutien en faveur de mesures qui rendent la plupart des activités économiques plus coûteuses.

La Tunisie entre sa CDN et le marché carbone
La Tunisie n'a pas encore créé son marché carbone, mais un projet intitulé "Assistance à la fixation des prix du carbone et à l'établissement de la contribution nationale dans ce domaine" a été mis en place en 2019. Bénéficiant d'un soutien financier de la Banque mondiale et d'un soutien technique du Programme des Nations unies pour le développement, ce projet visait à aider la Tunisie à élaborer une feuille de route pour mettre en place un système de régulation des prix du carbone.
Les trois mécanismes envisagés lors de ce projet s'alignaient sur les spécificités tunisiennes, le premier implique l'imposition d'une taxe carbone pour financer le Fonds de transition énergétique, le deuxième concerne l'inclusion d'un système de rachat basé sur les résultats du soutien apporté au développement du secteur de l'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable, et la troisième repose sur un accord volontaire entre les fabricants de ciment et les autorités locales.
Dans sa mise à jour de la Contribution Déterminée au niveau National (CDN), la Tunisie a émis un objectif de réduire son intensité carbone nette de 45 % d'ici 2030 par rapport à celle de 2010. Cet objectif repose sur différents volets sectoriels ambitieux parmi eux :
Objectif pour le secteur de l'énergie : Réduire l'intensité carbone du secteur de l'énergie de 44 % d'ici 2030 par rapport à 2010.
Objectif pour le secteur des procédés industriels : Réduire l'intensité carbone du secteur des procédés industriels de 12 % d'ici 2030 par rapport à 2010, en mettant en place des mesures d'atténuation des gaz à effet de serre spécifiquement ciblées sur le secteur du ciment et l'acide nitrique.
Mais jusqu'à ce jour, le marché carbone tunisien n'a pas encore vu le jour. Un marché qui doit être une priorité selon Ahmed Karam, l'ancien président de l'Association professionnelle tunisienne des banques et des établissements financiers (APTBEF). L'expert appelle à ce que les réglementations européennes sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre soient au cœur des discussions en Tunisie «l'objectif est de lutter contre la concurrence déloyale et d'éviter que certaines entreprises européennes se délocalisent vers des pays qui ne respectent pas ces normes en matière d'émissions de gaz à effet de serre ». Ces règles, mises en place par l'Union européenne, ont commencé à être imposées aux entreprises européennes et doivent également être appliquées par les pays partenaires pour garantir l'accès au marché européen.
La Tunisie est confrontée à la nécessité d'engager un vaste programme d'investissement pour moderniser son secteur industriel et économique en général. Cela suppose des capitaux importants, et l'UE pourrait jouer un rôle clé dans ce processus, car la protection de l'environnement est devenue un enjeu mondial, affirme Ahmed Karam qui déclare : « Les négociations pourraient aussi porter sur le soutien de l'UE à cette transformation ».
Pour M. Karam, les Européens ont l'intention d'introduire progressivement ces réglementations dans divers secteurs, en commençant par les activités les plus polluantes, comme la production d'acier. La Tunisie doit se préparer à ces changements en s'appuyant sur l'Europe, qui dispose de ressources considérables et d'un marché international en pleine croissance axé sur l'économie verte, d'après l'expert.
« Pour réussir cette transition, il est impératif de mettre en place des mesures volontaristes, de sensibiliser les banques, et d'exiger que les investissements respectent les normes d'émissions de gaz à effet de serre. Le temps presse, car le non-respect de ces règles pourrait exclure la Tunisie du marché européen. La Tunisie pourra négocier avec l'Union européenne la faisabilité de créer un mécanisme collaboratif afin de moderniser les entreprises exportatrices et les aider à se conformer aux nouvelles normes européennes en matière d'émission de carbone, contribuant ainsi à atteindre l'objectif de l'UE de réduire les émissions de gaz à effet de serre », indique Ahmed Karam à Business News.

L'UE a pris ces mesures conformément aux accords de la COP 21 pour se protéger des économies puissantes telles que la Chine. Toutefois, il est souligné que la Tunisie accuse un retard dans la prise de conscience et qu'il est urgent de mobiliser les industriels et les institutions financières pour mettre en œuvre des actions concrètes.
« Il est temps de réfléchir à la création d'un marché organisé, similaire à ceux existant dans d'autres régions, pour encourager la réduction des émissions et renforcer la balance commerciale. Pour cela, des mécanismes de financement à long terme et des partenariats avec des bailleurs de fonds seraient nécessaires. Le marché du carbone doit devenir une priorité pour la Tunisie afin de moderniser ses entreprises, de stimuler ses exportations et de contribuer à la lutte contre le changement climatique ».

Le MACF un challenge pour la Tunisie
Le dimanche 1er octobre 2023 , le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) a commencé sa phase de transition. Il s'agit d'un outil essentiel de l'Union européenne (UE) pour lutter contre la fuite de carbone, et il constitue l'un des piliers centraux du programme ambitieux "Ajustement à l'objectif 55" de l'UE. Il a pour objectif d'harmoniser les prix du carbone entre les produits fabriqués au niveau national et les produits importés. Ce mécanisme vise à garantir que les politiques climatiques de l'UE ne seront pas compromises par la délocalisation de la production vers des pays ayant des normes environnementales moins exigeantes ou par la substitution de produits de l'UE par des importations ayant une empreinte carbone plus élevée.
Pendant sa phase transitoire, le MACF sera uniquement applicable aux importations de certains produits, tels que le ciment, le fer, l'acier, l'aluminium, les engrais, l'électricité et l'hydrogène. Les importateurs européens de ces marchandises devront fournir des informations sur le volume de leurs importations ainsi que sur les émissions de gaz à effet de serre associées à leur production, sans qu'il y ait encore d'ajustement financier à ce stade. Les importateurs seront encouragés à recueillir des données pour le quatrième trimestre de 2023, mais ils auront jusqu'au 31 janvier 2024 pour soumettre leur première déclaration.
La mise en œuvre du Mécanisme d'Ajustement du Coût du Carbone (MACF) aura des implications financières pour les entreprises exportatrices. Cela signifie que ces entreprises devront payer la différence de coût liée à la réduction nette des émissions de gaz à effet de serre (tCO2e) du produit qu'elles exportent. Cette mesure pourrait entraîner une perte potentielle de compétitivité pour ces entreprises, ce qui se traduirait par une diminution de leurs parts de marché. Pour faire face à cette situation, il sera nécessaire de moderniser ou de réviser la chaîne de valeur du produit exporté. En d'autres termes, les entreprises devront trouver des moyens de maintenir leur compétitivité, soit en améliorant leur efficacité énergétique, soit en explorant de nouvelles voies pour réduire les émissions de carbone liées à leur production.

Exemples à suivre
Dans le monde arabe il existe quelques exemples qui ont réussi à mettre en place un marché carbone, le premier est la Saudi Arabia's Regional Voluntary Carbon Market Company (RVCMC), créée par le Fonds d'investissement public du royaume et la Saudi Tadawul Group Holding Company. Ce marché carbone saoudien joue un rôle central dans la promotion du marché volontaire du carbone et l'encouragement des pratiques commerciales durables et des actions climatiques, tant au niveau régional qu'international. En octobre de l'année dernière, le RVCMC a supervisé la vente de plus de 1,4 million de tonnes de crédits carbone. De plus, un autre exemple provient des Emirats arabes unis avec l'UAE Carbon Alliance, une coalition d'entreprises formée pour développer et faire croître un marché carbone aux Emirats. Cette coalition s'est engagée à acheter des crédits carbones africains d'une valeur de 450 millions de dollars d'ici 2030.
En Afrique, le Kenya, le Malawi, le Gabon, le Nigeria et le Togo se sont engagés, à travailler avec la nouvelle Initiative africaine sur les marchés du carbone (ACMI), un engagement affimré durant la COP27 en Egypte. L'ACMI vise à produire annuellement 300 millions de crédits carbones, avec pour ambition de débloquer environ 6 milliards de dollars de revenus et de créer 30 millions d'emplois d'ici 2030.
Puis durant le sommet climatique de l'Afrique à Nairobi, au Kenya, en septembre dernier, des millions de dollars ont été promis pour augmenter la production de crédits carbone en Afrique de 19 fois d'ici 2030.
La Tunisie doit fournir plus d'effort pour établir un marché carbone, pour accélérer la transition vers une économie bas carbone, réduire les émissions de GES et contribuer à la lutte contre le changement climatique. Rappelons que d'après le rapport annuel de la Banque africaine de développement sur la mobilisation du financement du secteur privé pour le climat et la croissance verte en Afrique, paru en aout 2023, les dommages et pertes causés par les questions liées au changement climatique et aux choix politiques en Tunisie s'élèvent à 5 milliards de dollars.

Les besoins estimés pour le financement de l'action climatique entre 2020 et 2030 s'élèvent à environ 24 milliards de dollars, tandis que les coûts d'adaptation au changement climatique sont estimés à 4 milliards de dollars, et les coûts de réduction des effets des changements climatiques sont estimés à 14 milliards de dollars, selon le rapport.


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