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Sonia Dahmani, après le froid, la soif
Publié dans Business News le 07 - 01 - 2025

Régulièrement, Ramla Dahmani Accent témoigne sur les réseaux sociaux des conditions de détention de sa sœur la prisonnière d'opinion Sonia Dahmani. Comme pour les précédents, Business News relaie ces témoignages afin que l'on n'oublie pas le sort réservé par le pouvoir à l'avocate et chroniqueuse, objet d'un véritable harcèlement derrière les barreaux. Voici sa dernière publication publiée lundi 6 janvier 2025 en début de soirée.

Aujourd'hui, Mehdi a réussi à me faire pleurer. Moi qui ne pleure jamais, j'ai craqué. Il m'a dit que Sonia lui avait confié que je lui manquais. Pas juste un petit manque, pas juste une absence qu'on ressent de loin. Non, un manque qui lui déchire le cœur, un vide qui lui pèse chaque jour un peu plus. Elle lui a dit que ne plus me voir, ne plus m'avoir près d'elle était une vraie déchirure. Et moi, moi qui me force à tenir, moi qui me répète chaque jour qu'il faut encaisser, qu'il faut avancer, j'ai senti tout s'écrouler. Parce que cette douleur, je la ressens aussi, ce manque, chaque jour, chaque minute, chaque seconde. Son rire me manque, sa voix me manque, sa présence me manque, son odeur me manque. Cette douleur résonne en moi, m'écrase, m'empêche de respirer. Moi aussi, je souffre. Du silence. De ce gouffre immense laissé par son absence. Ne plus pouvoir lui parler, ne plus pouvoir lui raconter mes joies, mes peines, ne plus pouvoir rire avec elle, ne plus pouvoir me plaindre, me confier. C'est un arrachement, un manque que rien ne comble.

Mais l'absence n'est pas la seule torture qu'on lui inflige. Après le froid, après la faim, après l'isolement, voilà qu'ils ont ajouté la soif. Dix jours. Cela fait dix jours que le magasin qui leur sert à se nourrir le week-end quand il n'y a pas le couffin de la famille « la cantina » comme ils l'appellent est fermée pour "inventaire". Dix jours où elles n'ont rien pu acheter. Dix jours qu'elles boivent à petites gorgées pour économiser les bouteilles qui leur restent. Parce que l'eau du robinet est imbuvable, rouillée, toxique. Parce que les familles n'ont pas le droit de leur fournir de liquide. Alors elles restent là, la bouche sèche, la gorge en feu, jusqu'à ce que le vertige les prenne. Vendredi, une gardienne qui a encore un peu d'humanité, , a vu sa détresse et a pris sur elle pour lui donner un pack d'eau.. un pack qu'elle a partagée avec ses codétenues, parce que dans cet enfer, tout se partage : la douleur, l'injustice, la faim, la soif, la nourriture, l'eau. la moindre once de survie se divise.
Et elles n'ont pas que soif. Elles ont faim. La faim est une compagne fidèle. Puisque pour cause d'inventaire elles ne peuvent plus rien acheter, elles n'ont plus rien. Ce week-end, leur seule nourriture a été de l'huile. Juste de l'huile. De l'huile au petit déjeuner, de l'huile au déjeuner, de l'huile au dîner. Elles avalent ce qu'elles peuvent, pas pour se nourrir, juste pour tromper leur faim. Et ceux qui prétendent administrer cette prison vivent sans contraintes. Ils mangent à leur faim, boivent à leur soif, remplissent leurs caddies où bon leur semble. Le soir, ils rentrent chez eux, ouvrent leur frigo, et décident. Dans l'enfer de Sonia, il n'y a ni choix ni alternatives. Pas d'ailleurs où aller, pas d'autre solution que d'endurer. Il n'y a que la privation, l'assèchement, l'oubli. La direction semble oublier que l'administration a l'obligation de fournir de l'eau et de la nourriture. Ce n'est pas un inventaire, c'est une punition par la faim, une condamnation à mort par la soif.
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Et comme si ce n'était pas suffisant, Sonia est malade. Depuis des jours elle est en insuffisance respiratoire. Pas un simple essoufflement, pas une gêne passagère. Elle suffoque, elle peine à trouver l'air, elle lutte pour respirer. Elle a demandé à voir un médecin. On lui a répondu qu'il était absent. Quinze jours qu'il est absent. Vendredi, ils ont enfin consenti à la faire consulter, quand son état s'est aggravé. Le médecin lui a donné un traitement, en précisant qu'elle devait le prendre immédiatement. Nous sommes lundi. Elle n'a toujours pas reçu ses médicaments. Est-ce qu'ils veulent la tuer ? Est-ce que c'est ça, le plan ? Qu'elle s'éteigne à petit feu, étouffée par le froid, la faim, la soif et maintenant la maladie ?
Au milieu de toute cette horreur, il y a quand même une chose qui m'a soulagée. J'avais cru que Sonia avait attrapé la gale et des poux. J'avais mal compris, parce que je ne la vois plus, que je ne peux plus lui poser directement la question. Je vis à travers les bribes d'informations qu'on me rapporte. On m'a parlé de gale, de poux, de femmes qui se grattent, de corps abîmés, et j'ai imaginé le pire. Pendant quinze jours, j'ai été rongée par cette idée. Aujourd'hui, Mehdi lui a demandé si elle allait mieux et elle lui a répondu que non, qu'elle avait échappé à ça contrairement à beaucoup d'autres femmes. Dieu merci. Au moins une chose qui me rassure. Je ne veux pas rapporter de fausses informations. Sonia souffre déjà assez. Je ne veux pas en rajouter, et surtout, je ne veux pas donner du grain à moudre à ceux qui se réjouissent de son malheur. La vérité est déjà insupportable comme ça. Je ne veux pas qu'on puisse dire que j'exagère, que je mens, que j'en fais trop.

Et pourtant, malgré tout ça, malgré l'isolement, malgré la radio coupée, malgré les journaux confisqués, malgré les lettres volées, malgré le froid qui ronge les os et la faim qui ronge le ventre, malgré la soif, Sonia avait le sourire aujourd'hui. Un immense sourire. Elle a dit à Mehdi et à papa qu'elle allait bien. Qu'on ne devait pas s'inquiéter. Qu'elle riait, qu'elle plaisantait, qu'elle était debout, forte, prête à affronter son procès. Mehdi m'a raconté que papa est sorti en disant : "Mais quelle fille, mais quelle femme incroyable, mais qu'est-ce que je suis fier d'elle."
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Ces mots m'ont fait un bien fou. Je suis tellement heureuse que papa ait pu voir au-delà de sa douleur, au-delà de sa peine, au-delà des barreaux, au-delà des murs de cette prison, pour voir Sonia telle qu'elle est : un roc, une femme exceptionnelle, une force inébranlable.
Maintenant, il ne nous reste qu'à prier. À prier pour que le 10 janvier, le ou la juge qui tiendra son sort entre ses mains trouve en lui la force d'être juste. De mettre la loi avant la peur. Le droit avant la soumission. La justice avant les ordres. Qu'il respecte le serment qu'il a prêté et non les instructions qu'on lui dicte. Qu'il soit un vrai juge et qu'il rende un jugement digne, juste et libre. Qu'il ait le courage d'arrêter cette mascarade. De libérer Sonia. De dire : "Assez de souffrance." Que cette torture cesse enfin.

R.B.H.
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