Dans un communiqué diffusé lundi 21 avril 2025, le comité de défense de l'ancien chef du gouvernement, Ali Larayedh, dénonce un procès qu'il qualifie de « grave dérive du cadre légal ». Selon ses avocats, ce qu'on appelle communément le dossier d'embrigadement et de départ vers les zones de conflit n'est, en réalité, rien d'autre qu'un « dossier politique fondé sur des évaluations erronées et malveillantes, sans fondement factuel ni preuves matérielles ». Le comité de défense affirme que « l'accusation n'a pas réussi à imputer à Ali Larayedh un quelconque acte illégal », les griefs se limitant à des considérations purement politiques sur sa gestion du ministère de l'Intérieur. D'après les enquêtes et témoignages officiels, la période durant laquelle Ali Larayedh était en poste « enregistrait les chiffres les plus bas concernant les départs vers les zones de conflit », contrairement aux années qui ont suivi. La défense insiste : l'ancien Premier ministre n'est pas poursuivi pour une infraction réelle, mais pour « des positions responsables prises dans un contexte national critique ». Elle va plus loin en assurant que « le dossier ne contient ni infraction ni preuve de culpabilité ». Ali Larayedh, disent ses avocats, « n'est intervenu d'aucune manière ni n'a autorisé des mesures facilitant les départs ou enfreignant la loi ». Il aurait même été l'un des premiers à alerter sur le phénomène, mettant en place des mesures concrètes : interdiction de voyager, autorisations parentales, renforcement des contrôles aux frontières.
Ali Larayedh avait pourtant insisté pour que soient ajoutées au dossier « les statistiques officielles précises sur les départs vers les zones de conflit, réparties par date ». Un élément qu'il considère essentiel pour prouver son innocence. Mais cette demande a été rejetée, soulignant, selon ses défenseurs, « une volonté manifeste de dissimuler la vérité ». Le comité de défense dénonce un renvoi basé sur une loi de 2015 pour des faits supposés survenus en 2012, ce qui constituerait « une violation flagrante du principe de non-rétroactivité des lois ». Ils reprochent également l'utilisation abusive de circonstances aggravantes et critiquent une ordonnance de renvoi jugée « vide de toute présentation précise des faits matériels », en contradiction avec les exigences de l'article 119 du Code pénal.
Le choix de la justice d'organiser un procès à distance n'est pas non plus passé inaperçu. Malgré des difficultés techniques empêchant l'accusé de suivre l'audience précédente dans de bonnes conditions, la Cour a refusé qu'il assiste physiquement aux débats, en dépit de sa demande répétée. « Sans justification réelle ni fondement légal, la cour a décidé de tenir le procès à distance », déplore le communiqué. Selon les avocats, la justice a aussi refusé d'entendre des témoins clés, notamment des responsables politiques, sécuritaires et militaires qui ont, à l'époque, participé aux décisions. Dans ce contexte, le comité conclut en affirmant qu'« il est impossible d'établir la vérité dans cette affaire en l'absence des garanties les plus élémentaires d'un procès équitable ». Il formule trois demandes claires : l'ajout des statistiques officielles sur les départs vers les zones de conflit, l'annulation du procès à distance pour permettre à Ali Larayedh d'être présent physiquement, et l'audition de témoins de l'époque.
L'affaire des réseaux d'embrigadement avait déjà conduit à la mise en détention de plusieurs personnalités politiques, dont l'ancien ministre de l'Intérieur Ali Larayedh, l'ancien responsable de la sécurité à l'aéroport Tunis-Carthage, Abdelkarim Laâbidi, le porte-parole du mouvement Ansar Chariâa, Seifeddine Raïes, ainsi que d'autres prévenus. L'enquête sur cette affaire implique plus de 800 personnes, dont l'ancien président de la République, Moncef Marzouki.