Khouloud Mabrouk libérée    Bourse de Tunis : Le Tunindex en hausse    Tunisie – Grève des contrôleurs aériens en France : La Tunisair annule 16 vols demain    Tunisie – Sultanat d'Oman : Le ministre des AE reçoit une lettre adressée au président de la République    Tunisie – Les instituteurs suppléants manifestent    Tunisie – Prolongation de la détention préventive de Wadie Al Jary    Météo Tunisie : de la pluie et des températures nocturnes pouvant descendre à 6°C    Monastir : bientôt la création d'un circuit touristique à Lamta    Siliana : Le meilleur en matière de soins et opérations grâce aux médecins tunisiens en France    Tunisie – Le suivi des entretiens de la délégation tunisiennes aux réunions du FMI et de la BM    Espérance Sportive de Tunis -Mamelodi Sundowns : Chaîne et heure du match    FTF : Validation et rejet des listes de candidats    Des voyageurs utilisant une porte de métro endommagée : La TRANSTU explique    Nessim Ben Slama écope d'une amende de 500 dinars    Suspension de l'activité des bacs à Djerba    Barrage de Mellègue : La fin des travaux est prévue pour 2025    Stade d'El Menzah : Une étude de faisabilité sous l'œil des experts Chinois    La Tunisie s'apprête à lancer sa première bibliothèque numérique    Où sont les élites de ce pays ?    Beni Khalled: Malgré l'abondance de production, seules 7000 tonnes d'oranges ont été exportées [Vidéo]    Géologie de la Séparation : un film tuniso-italien captivant et poétique à voir au CinéMadart    Hospitalisation du roi d'Arabie saoudite    Sénégal : Des frappes spectaculaires pour récupérer l'argent volé, même les entreprises françaises devront payer leurs impôts sur place…    Italie : Des gardiens de prisons arrêtés pour agressions sur Tunisiens mineurs    Urgent : La détention de Wadie Jary prolongée de quatre mois    Ligue 1 – Play off – Le CA affronte l'ESS ce dimanche : Enrayer la spirale    Dette publique | Des résultats en demi-teinte    L'homme qui aimait la guerre    Green Power Technologie signe un accord de partenariat avec Soteme, pour la distribution des solutions Huawei Fusionsolar en Tunisie    Conseil ministériel restreint à La Kasbah : Une série de mesures au profit des Tunisiens résidant à l'étranger    Parquet : L'interdiction de la médiatisation de l'affaire du complot contre la sécurité de l'Etat toujours en vigueur    Météo en Tunisie : pluies et températures en baisse    Aujourd'hui, coupure d'eau potable dans ces zones    Education : Un rassemblement annulé à la faveur du règlement de plusieurs dossiers    EXPATRIES : Hassan Ayari passe à Toronto    Au fait du jour | Il n'y a pas que l'argent    Foire internationale du livre de Tunis : vers la prolongation de la FILT 2024 ?    Malentendues de Azza Filali    L'Italie, invitée d'honneur du 18 au 29 avril à la Foire Internationale du livre de Tunis : «Anima Mediterranea»    Echos de la Filt | Pavillon de l'Italie, invitée d'honneur : Evelina Santangelo et Azza Filali échangent autour de leurs récents ouvrages    Brésil: Elle vient à la banque avec le corps de son oncle pour avoir un prêt en son nom    Ultimatum législatif aux Etats-Unis : TikTok doit être vendu sous un an ou disparaître !    Campagnes controversées en Turquie : retrait des enseignes arabes des commerces    Soutien à Gaza - Le ministère des Affaires religieuse change le nom de 24 mosquées    Anne Gueguen sur la guerre à Gaza : la France œuvre pour une solution à deux Etats !    Festival International de Théâtre au Sahara : 4ème édition du 01 au 05 mai 2024 à kébili    Un pôle d'équilibre nécessaire    Chute de mur à Kairouan : Le tribunal rend son jugement    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le dossier n'est annexé à celui des bénéficiaires de l'amnistie du droit public que pour mieux le noyer
Leila Haddad, avocate des familles des martyrs et blessés de la Révolution
Publié dans Le Temps le 02 - 06 - 2013


Entretien conduit par Faouzi KSIBI
Elle est toujours là pour défendre ce dossier épineux et dont on n'entend presque plus parler avec tout l'acharnement et la détermination qu'on lui connaît. Elle reçoit, au quotidien, dans son bureau,
toutes ces familles et toutes les victimes désespérées qui ruminent l'amertume de l'oubli et de l'isolement et auxquels elle essaye de remonter le moral, de soutenir et de défendre, inconditionnellement, auprès des tribunaux. C'est chez elle que ces laissés pour compte et ces abandonnés trouvent refuge et sont consolés. Décidément, la révolution dévore ses enfants. On l'a invitée pour faire consulter ce dossier qu'on tente, constamment, d'enterrer à chaque fois qu'elle le fait émerger en compagnie des quelques fidèles de son métier qui se font de plus en plus rares. D'autre part, il est, vraiment, décevant voire déprimant que ceux-là mêmes qui doivent tous les avantages dont ils jouissent et les rangs supérieurs auxquels ils ont accédé dans la hiérarchie sociale à ces victimes se montrent si ingrats et leur rendent la pareille en les évinçant et en les humiliant comme l'atteste notre avocate.
-Le Temps : comment les derniers procès ont-ils évolué ?
-Me Haddad : au cours de la dernière séance, on a entendu le reste des accusés, c'est-à-dire les dirigeants du ministère de l'intérieur, tels que Jalel Boudrigha en tant que directeur général des unités d'intervention, Lotfi Zouaoui en tant que directeur général de la sécurité publique. Cette séance est reportée pour le 5 juin à laquelle comparaitra l'ex ministre de ce ministère, RafikHaj Kacem et AdelTiouiri, l'ex directeur général de la sûreté nationale. Par contre, dans le dossier du Kef, on a entendu tous les accusés et on a commencé à interroger, de nouveau, les témoins, à l'image du gouverneur de Kasserine de l'époque, par l'instruction civile et l'instruction militaire prétextant queleurs déclarations ont été déforméeset que ce qui est écrit et enregistré ne reflétait pas ce qu'ils ont réellement dit. Il est clair que la tension qui existait au début des interrogatoires a fait place à la connivence.
-Pouvez-vous être plus explicite ?
-En vérité, il s'agit d'un bras de fer entre avocats, on permet à ceux de la défense d'accéder à toutes les déclarations de leurs clients afin d'en faire ressortir d'autres données et imprimer, ainsi, une nouvelle orientation au dossier. Ce manège ne réussira pas, car tout est consigné dans les procès-verbaux initiaux où plusieurs éléments les incriminent. Nous allons, en tant qu'avocats des familles des martyrs et des blessés de la révolution, présenter, au cours des prochaines plaidoiries, de nombreuses preuves. Je dois reconnaître que la cour d'appel était très audacieuse an procédant à de nouvelles interrogatoires, à la rédaction de nouveauxprocès-verbaux et à l'audition de nouveaux témoins dans le but de découvrir la vérité. Le tribunal militaire a, de son côté, procédé à des investigations de terrain à Kasserine et aux unités d'intervention de Bouchoucha, à la cité Ezzouhour… Toutes ces données vont permettre de jeter la lumière sur le dossier et le rendre moins sombre qu'auparavant.
-Donc, on peut dire que la situation est désamorcée ?
-Pas vraiment,puisqu'il n'y a pas de nouveaux accusés et que 80% des assassins des martyrs sont encore inidentifiés. Cela est dû au fait que la vérité était noyée depuis le départ, au lendemain de la fuite de Be Ali. Plusieurs parties ont participés à cette occultation telles que le ministère public et le gouvernement de Ghannouchi qui est en fait celui du président déchu, le souci majeur de ceux-là était de faire disparaître au plus vite tous les indices du crime. Malheureusement, ils ont jusqu'ici réussi leurs manœuvres dans une large proportion. D'ailleurs, la cour d'appel du tribunal militaire a, à trois reprises, demandé le plan de répartition des unités d'intervention ainsi que les armes qui étaient en leur possession, mais à chaque fois les responsables de ce secteur prétendaient qu'ils ne disposaient d'aucun renseignement à ce sujet, que les documents s'y rapportant ont été détruits à cause du désordre qui régnait, et que, par conséquent, il n'y avait ni ordres de missions, ni plan de répartition. Il est clair que l'ancienne méthode est, toujours, en vigueur, pire, elle s'est renforcée par l'intervention des nouveaux acteurs, à savoir les syndicatsdes forces de l'ordre dont le souci majeur c'est de sauver leurs collègues d'embarras. Et j'ai, personnellement, rapporté au juge comment, lors de l'une des enquêtes de terrain effectuées par les délégations militaires auprès des unités d'intervention, c'étaient les syndicalistes qui ont répondu à toutes leurs questions se substituant, ainsi, aux responsables. Ils essayent de tirer d'affaire même ceux qui sont en garde à vue et ceux qui sont déjà jugés en présentant des documents pour faire croire que ce n'étaient pas eux qui ont tiré les coups de feu et tué les martyrs. On peut comprendre que défendre leurs collègues relève de leur tâche, mais il faut savoir que ce qui s'est produit touchait l'ensemble du peuple tunisien et que la recherche de la vérité, de notre part, s'explique par notre volonté de conserver la mémoire nationale, la condition sine qua non de la justice transitionnelle. Cette attitude ne va, certainement, pas satisfaire les familles des martyrs et les blessés auxquels on distribue des miettes à titre d'indemnités pour les faire taire. Et si les grands dossiers de Tala, Kasserine et Tunis connaît un tel sort, que dire alors de ceux des victimes isolées ? Après deux ans devant les tribunaux militaires, ces derniers sont transférés au tribunal administratif où jusqu'au jour d'aujourd'hui les dates des procès ne sont pas encore arrêtées et qui risquent fort d'être reportés à l'année judiciaire prochaine, vu que celle qui en cours est sur le point de s'achever. Les peines des victimes de la révolution se poursuivent, le périple de la souffrance est encore long et les distances s'allongent. Leur dossier s'achemine vers une impasse.
-Vous entendez par là qu'il n'y a pas de volonté politique de découvrir la vérité ?
-Effectivement, le gouvernement ne peut aucunement se prévaloir de l'indépendance de la justice quand il refuse de coopérer positivement avec les tribunaux militaires en répondant favorablement à leurs requêtes. Le refus émanant du ministère de l'intérieur traduit une volonté politique visant à masquer, au peuple tunisien, la vérité des faits qui se sont produits entre le 17 décembre et le 14 janvier tunisien. Toutes les réponses contiennent l'expression « il n'est pas possible » prétextant que tous les documents ont été brûlés dans les postes de police qu'on a incendiés. La connivence entre la Troïka et le ministère de l'intérieur ne fait pas l'ombre d'un seul doute. Cette politique est poursuivie par tous les gouvernements qui se sont succédés, et il en ressort qu'ils se sont tous mis autour d'une table ronde pour coordonner leurs actions et arrêter un plan commun.
-Vous avez dit que, depuis le début, il y avait une imbrication de la justice avec la politique qui, en définitive, a, toujours, eu le dernier mot et disposé de la première comme bon lui semblait. Est-ce que cette situation continue avec le gouvernement actuel ?
-Absolument ! Les politiques font, toujours, main basse sur le dossier des martyrs et des blessés essayant de le classer de façon qu'il ne dérange personne. Et quand Essebsi a dit qu'il n'y avait pas snippers, il savait très bien que toutes les traces ont été effacées par son prédécesseur, Ghannouchi. Cela met à nu la collusion entre eux et les responsables du ministère de l'intérieur avec lesquels ils ont conclu un marché, parce qu'ils sont persuadés qu'ils ne pouvaient pas gouverner sans leur concours. Ils ont troqué la libération des inculpés contre l'assistance sécuritaire leur garantissant de sauvegarder leurs sièges. Ennahdha n'a pas dérogé à la règle, bien au contraire, elle a apporté une nouveauté en la matière en ajoutant au dossier des martyrs et des blessés celui de ses prisonniers politiques et de l'amnistie de droit commun qu'elle veut régler aux dépens du premier qu'elle tente de noyer aussi bien sur les plans politique et juridique qu'au niveau des droits de l'homme. Cette intention malveillantes'est manifestée d'une manière claire et nette en transformant la commission réservé aux premiers en un comité s'occupant, à la fois,des familles des martyrs et blessés de la révolution et des prisonniers politiques. Et sachez qu'au sein de l'ANC, on a institué des commissionsqui se renseignent auprès des familles des bénéficiaires de l'amnistie de droit public pour déterminer la valeur du dommage subi et leur verser les indemnités, chose qu'on a déjà demandée pour les victimes de la révolution et qui était refusée. D'ailleurs, ces commissions n'ont jamais invité les associations des familles des martyrs et blessés de la révolution qu'on a tout fait pour démanteler de l'intérieur en provoquant des dissensions entre leurs composantes, et ce n'est pas un hasard qu'aujourd'hui il n'existe aucune de ces associations.
-Quels sont les procédés dont elle use pour mettre à exécution ce plan ?
-Tout d'abord, les familles des martyrs et blessés de la révolution sont éclipsés dans champ médiatique. Ensuite, ils sont, systématiquement et délibérément, exclus de tous les colloques et work portant sur la torture, et je peux vous citer, à titre d'exemple, le colloque organisé par le haut-commissariat de l'ONU et où j'étais la seule chargée de leur dossier et qui ai exposé leur cause, alors que tous les autres participants étaient des associations représentant les prisonniers politiquesde Ennahdha. J'ai, alors, demandé à la responsable du haut-commissariat où étaient les victimes ? Pourquoi ne les a-t-on pas invités et les a-t-on écartés ? Il n'aurait pas été plus judicieux que la justice transitionnelle commence par eux avant de passer aux autres ? Sa réponse était que c'était le ministère des droits de l'homme et de la justice transitionnelle qui a établi la liste des invités dont 99% étaient des associations islamistes. Un autre exemple est encore plus édifiant à ce propos : le même ministère a organisé un congrès sur les victimes à la bibliothèque nationale où il était écrit sur les badges les noms de ces derniers suivant un ordre préférentiel : en dessous les yousséfistes, au milieu, quelques éléments de la gauche et tout au-dessus, c'est-à-dire en première position, les islamistes. Et comme vous le voyez il y avait une absence totale des victimes de la révolution, ce qui veut dire qu'on ne les reconnaît pas en tant que telles, leur éclipse est méthodique.
-Si vous nous rafraîchissiez la mémoire en nous rappelant les procédés mis en œuvre par les premiers gouvernements en vue d'étouffer le dossier des victimes de la Révolution?
-L'opération de camouflage des crimes a commencé à la mi-janvier, juste après la fuite de Ben Ali, ce processus était déclenché, précisément, le 15 de ce mois quand les familles des martyrs, accompagnés de leurs avocats, se sont démenées pour déposer plainte auprès des tribunaux judiciaires. En agissant de la sorte, elles se sont supplées au ministère public chargé, selon la loi, d'ouvrir ce dossier qui n'a, donc, connu la voie des tribunaux que sur l'intervention de la défense, c'est-à-dire que l'accusation n'a pas été soulevée par cette autorité juridique habilitée à le faire et qui s'est, alors, illustrée par son absence dans cette affaire relevant de ses prérogatives. Les enquêtes n'ont démarré que le 16 février et se sont poursuivies jusqu'au 6 mai, date du transfert du dossier au tribunal militaire. Pendant toute cette période, ces dernières n'ont pas avancé d'un iota à cause du rôle joué par le ministère de l'intérieur, surtout à l'époque de AhmedFriâa, pour vider le dossier en faisant disparaître toutes les preuves accablant ses agents et fonctionnaires. Tout ce qu'a fait le doyen des juges des enquêtes judiciaires c'était l'interpellation des responsables de cet établissement, à savoir l'ex ministre de l'intérieur et quelques officiers supérieurs. Quand il était nommé à la tête de ce ministère, FarhatRajhi a, implicitement, confirmé les accusations révélées en démettant de leurs fonctions 47 officiers supérieurs. Pour ce qui est du rôle du ministère de la défense dans l'orientation des enquêtes et, par conséquent, le changement du cours des événements, il suffit de rappeler le fait qu'il s'est emparé du dossier qui a quitté les bâtiments de la justice civile et s'est, subitement, trouvé entre les murs des tribunaux militaires.
-Comment cela s'est produit et sur quelle base a été décidé le transfert du dossier ?
-Le transfert a eu lieu, comme je l'ai précisé, le 6 mai après avoir passé cinq longs mois dans les tiroirs des tribunaux de la justice civile sans que les enquêtes ne progressent, bien au contraire, plus le temps passait, plus le dossier s'allégeait et se fondait comme la neige sous les rayons ardents du soleil. On a procédé à ce transfert en s'appuyant sur l'article 22 qui accorde les prérogatives aux tribunaux militaires chaque fois que les forces de l'ordre sont partie au procès, mais le plus inquiétant et l'indice qui trahit l'intention des responsables de faire disparaître le dossier pour le clore définitivement c'est l'application de l'article 7 qui interdit, expressément, aux familles des martyrs de faire appel à leurs avocats pour les représenter à toutes les étapes de l'enquête sachant que l'amendement de cet article du mois de juillet 2011 n'est entré en vigueur que le 16 septembre, c'est-à-dire le lendemain de la proclamation de la sentence par la chambre d'accusation de Tunis après que la même instance du Kef ait pris la même résolution le 9 du même mois et ce pour barrer la route à toute nouvelle preuve. Tous ces éléments mettent en évidence une volonté préméditée et un plan bien ficelé, préparé à l'avance par les autorités chargées du dossier dans le but d'exclure les avocats et les empêcher de jouer un rôle dans cette affaire.
-Si vous nous parliez des différentes phases par lesquelles sont passés les dossiers des blessés.
-90% d'entre eux ont été conservés par l'instruction militaire en raison de la non identification des contrevenants, et les dossiers sont transférés à la justice administrativepour recommencer le marathon des procès des blessés dont certains sont amputés de jambes ou bien gardent encore des balles enfouies dans le corps, le butin qu'ils ont gagné d'une Révolution qui a émerveillé le monde et enrichi certains. Au niveau de l'appel, le tribunal chargé de l'affaire essaie de raccommoder le dossier au tant qu'il peut pour absorber la colère des familles des victimes et ce en acceptant quelque demandes formulées par les avocats et refusées par le tribunal de première instance militaire parmi lesquelles les registres des munitions et le positionnement des unités de l'ordre sur le terrain pendant les opérations de meurtre. La question qui s'impose : pourquoi les avoir refusées à une étape où il était possible de découvrir quelques vérités et les avoir autorisées après un an et demi ?!!! Le temps est capable de faire disparaître toutes les preuves du crime… c'était le but poursuivi de toute cette mise en scène.
-En ce qui concerne les indemnités versées aux familles des martyrs et aux blessés de la révolution et la prise en charge de ceux-ci, particulièrement, pour les soins médicaux, on entend deux versions qui sont, totalement, contradictoires, l'une émanant du gouvernement qui prétend qu'il assume, pleinement, son devoir envers eux, l'autre avancée par les concernés eux-mêmes qui affirment qu'ils n'ont rien perçu et qu'ils sont, complètement, délaissés. Qu'en est-il au juste ?
-Les familles de martyrs et les blessés de la révolution sont négligés voire même humiliés. Ces derniers subissent un mauvais traitement qui est délibéré dans les hôpitaux où on s'occupe d'eux après tous les autres patients, c'est une manière de les décourager et de se débarrasser d'eux. Donc, les cartes de soins qu'on leur a livrées n'ont aucune importance, et les statistiques montrent que leurs blessures sont infectées davantage justement à cause de cette négligence de la part du ministère de la santé. En témoigne le fait que tous ceux qui ont quitté le territoire national et qui sont au nombre de seize, parmi plus de deux cent cinquante cas dangereux, ont été pris en charge par quelques hommes d'affaires et quelques associations. Et même certains de ces privilégiés qui sont partis en France où on leur a posé des prothèses sont revenus, pas plus tard qu'hier, à l'hôpital Med Kassab, à l'image de Moslem qui a écrit sur mon mur de facebook qu'il aurait aimé être martyr plutôt que blessé à cause de cette nonchalance et ce mauvais traitement qui étaient à l'origine de l'amputation de sa jambe. Dons, contrairement à ce que prétend le gouvernement, les blessés ne bénéficient d'aucun privilège, bien au contraire, ils sont sous-estimés, humiliés et pauvres. En effet, seulement quelquesuns parmi eux ont intégré la fonction publique en qualité de concierges, gardiens et nettoyeurs, et pour ce qui est de ceux qui ont un niveau universitaire, on a retiré leurs dossiers pour n'en garder que le diplôme du baccalauréat pour les déclasser en grades et leur octroyer des postes de travail d'un degré moindre et il y en a un qui a bac+6 et auquel on en a retranché deux ans. Le décret relatif à l'emploi n'a concerné, en fait, que ceux de l'amnistie de droit public, c'est-à-dire les islamistes, sachant qu'ils sont, systématiquement, titularisés dans les cabinets et des postes de prestige, alors que les ceux des familles des martyrs et les blessés de la révolutionne jouissent que de contrats de six mois à l'expiration desquels ils se retrouvent, à nouveau, en chômage. Pire, on leur demande de présenter le bulletin numéro 3, et si au bout de cette période ils ne le font pas, ils sont écartés de la fonction tout en les recensant parmi ceux qui y ont été intégrés. C'est, vraiment, une pure aberration que d'exiger de ceux qui ont dit non à Ben Ali et qui ont exposé leurs corps aux balles et aux gaz lacrymogènes de s'adresser à ce même ministère qui a réprimé la révolution dans le sang et qui représentait l'appareil répressif du régime déchu pour lui demander une attestation de bonne conduite !!! On leur a demandé de refuser ces pseudos offres et d'observer des sit-in devant le ministère de l'emploi pour revendiquer leurs droits.
-On a entendu dire que les familles des martyrs et des blessés de la révolution ont réclamé aux tribunaux qu'on écarte certains avocatsde leurs procès. Vous confirmez ces échos ?
-Pratiquement, on est deux avocats à répondre toujours présents à ces procès et qui suivons de près l'évolution du dossier, Me CharfeddineKhellil et moi-même, en contrepartie, le nombre de ceux des accusés s'est multiplié. A l'ouverture de ce dossier, tous les avocats se sont portés volontaires pour défendre ces victimes, mais avec le temps, ils en ont tous démissionné se contentant d'en prononcer le mot question de parer leurs discours, ils en usent comme « Au nom de Dieu… » pour, ensuite, le dépasser et s'occuper de leurs projets personnels. Donc, ces familles en ont eu assez de ne voir que leurs noms figurer sur leurs dossiers et demandé qu'on les raye de la liste.
-Parlez-nous de l'association « Mains sans chaînes » que vous comptez créer.
-Au début, j'ai pris la décision de n'intégrer aucune association, étant convaincue que la robe noire que je porte m'oblige de remplir mon devoir envers ces victimes et envers mon pays, la chère Tunisie, sur le terrain de la justice. Mais lorsque j'ai constaté que leur dossier est sur le point d'être se fermé, classé et jeté à la poubelle, là, je me suis rétractée et j'ai décidé de conserver leur mémoire et la documenter, tout d'abord, pour mes enfants et les enfants de la patrie et, ensuite, pour les générations à venir et ce à travers cette association que je vais mettre au jour très prochainement. Elle est constituée d'un petit groupe de jeunes avocats, sa mission consistera, donc, à observer et enregistrer les dépassements perpétrés dans le cadre de la Révolution tunisienne qui représente le principal dossier pour nous. J'ai, personnellement, participé à un stage avec l'institut arabe des droits de l'homme et l'organisation palestinienne « le droit » qui m'a émerveillée par sa documentation des atteintes commises par les Israéliens contre les Palestiniens. Je me suis dit, alors, pourquoi après deux ans et demi d'expérience dans le traitement de ce dossier je ne procède pas de la même manière qu'eux en présentant à notre peuple les noms de nos martyrs avec les photos, les circonstances de leur assassinat et des jugements prononcés dans les procès faits à leurs assassins. La création de cette association est aussi une déclaration officielle de ma part que je milite encore dans le domaine des droits de l'homme dénonçant aussi bien le viol que la torture qui ne connaît pas de répit et qui prend des couleurs variées en fonction de l'appartenance idéologique et politique. Notre pays est devenu un terrain ouvert propice à toutes les manœuvres déstabilisatrices, et je vois qu'il est de mon devoir de participer, de mon côté, à l'effort collectif avec les moyens modestes qui sont en ma possession contre le danger réel qui le guette de tous côtés et le sauver des griffes des charognards.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.