Après l'été et son farniente, après le ramadan et ses courses u marché, après la séance unique et son laisser-aller, après les fêtes de la fin d'année et leurs vacances d'hiver, et après la fête du 1er jour de l'an de l'hégire, on va enfin pouvoir travailler. On va enfin pouvoir trouver un interlocuteur au bout du fil. On va enfin pouvoir s'organiser et fixer des rendez-vous. C'est fou le nombre de fêtes que nous avons. Entre les congés officiels, les congés imposés par la mondialisation (nouvel an, vacances d'hiver), les congés religieux, les congés liés à notre culture (break, pont, séance unique de l'été), les congés liés à notre entourage (le cadet malade et l'aîné a séché les cours) on est éligible au concours du peuple qui travaille le moins de temps durant l'année. Et encore ! On n'a pas calculé le nombre d'heures réellement travaillées durant les jours où l'on n'a pas d'excuse pour chômer. Exemple : en huit heures de travail quotidien, combien pensez-vous qu'un salarié produit réellement ? On arrive toujours avec cinq à dix minutes de retard. C'est systématique. Le soir, idem. On se débrouille pour sortir cinq à dix minutes à l'avance. Et même si l'on ne peut pas sortir avant l'heure (à cause d'une pointeuse par exemple), on éteint son PC au moins quinze minutes avant l'heure légale. Quand on débarque au boulot (avec le retard), on consacre systématiquement vingt minutes pour siroter son direct et manger son croissant. Postez-vous devant une administration ou une banque quelconque et comptez le nombre de personnes qui se ramènent au bureau sans leur café et brioche. Ça se compte sur les doigts d'une seule main. C'est facilement vérifiable. Après le petit déjeuner, il faut bien entretenir ses relations avec ses collègues de bureau. Au menu des discussions : le match de foot de la semaine écoulée ou de la semaine à venir pour les hommes, le feuilleton du soir et les péripéties du candidat de la veille dans l'émission de Sami Fehri pour les femmes. Neuf heures arrive, il est temps que tous ces gentils salariés aillent travailler. Après quelques minutes imposées par le démarrage de la machine qui ne fonctionne jamais correctement, on pourrait espérer commencer la journée. A dix heures, on sonne le break. Rebelote avec un goûter, un café et une cigarette. Rebelote également avec l'entretien des relations sociales avec les collègues. Au menu des discussions, cette fois-ci, la guerre en Irak, en Afghanistan ou ailleurs. Peu importe, l'essentiel c'est de se mettre dans la peau de la victime arabo-musulmane haïe par les Occidentaux. Ceci pour les hommes. Pour la gent féminine, et à dix heures, ça ne rate jamais, le sujet classique est « qu'est ce que tu as fait hier soir pour dîner pour que j'en fasse de même pour le soir ». Et c'est parti. Donnons leur 15-20 minutes puis on reprend le boulot. A 11 heures tapantes, on reprend une petite pause cigarette (même ceux qui ne fument pas ont droit à la pause) entrecoupée par des coups de fil à la maman, à la belle-mère, à la sur, à la tante et, inévitable, à la femme de ménage. Question de lui rappeler qu'on est là ! Après la pause déjeuner (et son lot de sortie avant l'heure sous prétexte de faim et d'arrivée après l'heure sous prétexte de file d'attente devant la gargote du coin), on a droit à la pause sieste. Les claviers en savent quelque chose de cette sieste. Normalement, on se lève vers les 14h30-15 heures, on redémarre l'ordinateur et on travaille tout en rouspétant sur ces horaires de double séance. A 16 heures, pause cigarette et à 16h50 on éteint tout et on se dirige vers la porte de sortie pour ceux dont l'horaire légal s'achève à 17 heures. C'est ainsi que nos journées se passent chez une partie (une bonne partie ?) de nos employés dans les différentes grandes entreprises et dans certaines (ou plusieurs) administrations. On a beau parler mondialisation, capitalisme, danger sur l'emploi, concurrence, chômage, et tout le tralala, il n'y a rien qui fera changer de position de si bonnes vieilles habitudes. On souhaite tout le courage aux décideurs !