L'excédent budgétaire de 2,08 milliards de dinars atteint fin mars 2025 n'a aucun sens, a affirmé vendredi 13 juin 2025 le professeur universitaire en sciences économiques Ridha Chkoundali. Invité de Zouheir El Jiss dans l'émission Politica sur Jawhara FM, l'universitaire a rappelé que le budget de l'Etat repose sur le principe d'annualité. « On ne peut déterminer si le budget est sur la bonne voie ou non qu'en fin d'année », a-t-il expliqué. À titre d'exemple, il a précisé que l'an dernier, à la même période, l'Etat avait enregistré un excédent de 1,19 milliard de dinars à fin mars 2024, mais avait terminé l'année avec un déficit budgétaire de près de 10,05 milliards. Pour lui, cet excédent s'apparente à une situation où « on a un projet à réaliser avec des ressources propres et des emprunts, mais comme les travaux n'ont pas commencé, on croit à tort qu'il y a un excédent dans les comptes ». Il estime que lorsqu'il y a déficit, cela signifie que l'Etat a avancé dans l'exécution budgétaire ; à l'inverse, un excédent peut indiquer un retard ou un blocage dans la mise en œuvre des projets budgétés — ce qui, selon lui, ne relève pas d'une bonne gouvernance des finances publiques. Dans le détail, comme les chiffres publiés ne concernent que le premier trimestre (le quart de l'année), seules les rubriques ayant dépassé 25% du montant budgété dans la loi de finances 2025 peuvent être considérées comme bien engagées. Les autres, non.
En ce qui concerne les ressources fiscales et non fiscales, 24,7% du montant prévu ont été réalisés, ce qu'il qualifie de « bonne performance ». Pour l'endettement, 28,7% de l'endettement intérieur et 32,3% de l'endettement extérieur ont été mobilisés. Côté dépenses, les taux de réalisation sont de 22,5% pour les salaires, 13,2% pour la compensation, et seulement 9% pour les dépenses de développement. « Le budget est un instrument de politique économique qui vise des objectifs clairs : croissance, emploi, développement, etc. Si ces objectifs ne sont pas atteints, cela signifie que la politique budgétaire a échoué », a-t-il résumé.
Par ailleurs, Ridha Chkoundali a estimé que les frappes israéliennes en Iran auront un impact économique négatif. Il a souligné que les cours du pétrole se sont envolés vendredi 13 juin 2025. « Avant cette frappe, le pays allait économiser, au niveau budgétaire, près de 1,5 milliard de dinars grâce à la baisse des prix du pétrole », a-t-il souligné. Selon lui, l'hypothèse de croissance retenue par le gouvernement sera difficile à réaliser, ce qui affectera automatiquement les recettes fiscales de l'Etat. Il a également rappelé que la politique du « compter sur soi-même », prônée par le chef de l'Etat, repose avant tout sur les ressources propres, majoritairement fiscales.
Interrogé sur le tapage médiatique autour de l'excédent budgétaire — alors qu'il ne s'agirait selon lui que d'« une tempête dans un verre d'eau » —, Chkoundali a mis en cause la communication du gouvernement : « ce discours est destiné à l'étranger et aux institutions internationales, notamment le FMI, afin de montrer que les équilibres budgétaires sont maîtrisés, que la dette est remboursée, que le déficit commercial est sous contrôle et que la note souveraine s'améliore ». Or, selon lui, ce message ne concerne pas les Tunisiens, dont la priorité reste leur pouvoir d'achat. « Ce qui intéresse le citoyen, ce sont les indicateurs de l'économie réelle : croissance, chômage, prix, pouvoir d'achat », a-t-il insisté. Et de conclure : « il n'y a pas d'harmonie entre les messages de la présidence de la République et ceux du gouvernement ».