L'Observatoire national de l'agriculture (Onagri) a publié, vendredi 19 septembre 2025, son rapport mensuel Onagri Vigilance pour septembre, dont une partie est consacrée à l'invasion de criquets pèlerins ayant touché plusieurs gouvernorats du sud de la Tunisie entre mars et juin 2025. L'institution y revient sur les conditions ayant favorisé cette invasion, les moyens mobilisés pour y faire face et les résultats obtenus. Selon le rapport, la Tunisie a été confrontée, au printemps 2025, à une recrudescence acridienne venue de Libye et d'Algérie. Des conditions climatiques et écologiques favorables – pluies importantes, humidité du sol et abondance de verdure – ont créé un environnement propice à la reproduction et à la propagation du criquet pèlerin.
Ce phénomène s'inscrit dans un contexte régional marqué par des foyers récurrents en Afrique du Nord et dans les zones sahéliennes, faisant de ce ravageur une menace agricole transfrontalière. Historiquement, la Tunisie a connu plusieurs vagues invasives : celles de 1987–1988 et de 2004–2005 avaient entraîné d'importantes pertes agricoles et nécessité de vastes campagnes de lutte. Les premiers groupes de criquets ailés ont été détectés le 12 mars 2025 dans le sud du pays, ce qui a conduit le ministère de l'Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche à lancer immédiatement une campagne nationale de lutte. Celle-ci a concerné six gouvernorats : Tataouine, Médenine, Kébili, Tozeur, Gabès et le sud de Sidi Bouzid. Des moyens humains, techniques et logistiques importants ont été mobilisés : véhicules 4x4, unités de pulvérisation terrestre, un hélicoptère pour les traitements aériens, ainsi que des pesticides adaptés. Les opérations de pulvérisation et de suivi intensif ont été menées par les directions régionales du ministère, avec l'appui d'équipes spécialisées. Au total, plus de 20.800 hectares ont été traités, dont environ 5.770 hectares par voie aérienne, principalement dans les gouvernorats de Kébili, Tataouine et Médenine, les plus durement touchés. Un aspect déterminant de cette campagne a été la coopération internationale. Membre de la Commission de lutte contre le criquet pèlerin en région occidentale de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la Tunisie a travaillé en coordination avec l'Algérie, la Mauritanie et les instances spécialisées de l'organisation onusienne. Cette collaboration a permis le partage en temps réel d'informations, l'obtention de soutiens logistiques et le renforcement des capacités de surveillance.
Au terme de trois mois d'efforts, les opérations ont permis de contenir l'expansion de l'invasion et de réduire considérablement les risques de pertes agricoles massives. Dès la seconde moitié de juin, la sécheresse du sol et la disparition du couvert végétal dans le sud tunisien ont favorisé le départ des groupes résiduels vers les zones de reproduction estivale du Sahel africain (Mali, Niger, Tchad). Toutefois, l'Onagri alerte sur le risque d'un retour à l'automne 2025, compte tenu des conditions pluviométriques favorables enregistrées dans ces zones. Le ministère de l'Agriculture indique poursuivre ses préparatifs en matière de veille, de surveillance et de planification logistique afin de garantir une réaction rapide en cas de nouvelle invasion. En juin dernier, l'ingénieure principale de la direction phytosanitaire et du contrôle des intrants agricoles au ministère, Mouna Mhafdhi, avait confirmé la stabilisation de la situation après une série d'interventions de grande ampleur. Le ministère avait toutefois souligné que la vigilance restait de mise.