Une moyenne inquiétante : 7000 Tunisiens s'éteignent chaque année à cause du tabac. Le fléau n'épargne ni fumeurs ni leur entourage. Pour souligner ses méfaits, une mobilisation tous azimuts est en train de prend forme. La société civile, forte de toutes ses composantes a déclaré "la guerre au tabagisme", comme l'a formulé Salem Mekki, président de l'Organisation tunisienne de l'éducation et de la famille et président de la commission sectorielle de la société civile. Une charte a été signée dans ce sens par les organisations nationales, les associations et les ONG (organisations non gouvernementales) lors d'une manifestation grandiose du tissu associatif, en présence de Mondher Znaïdi, ministre de la Santé, qui a mis le paquet en promettant d'effectuer la visite de deux hôpitaux par semaine, pour défendre la santé du Tunisien, sa bourse et l'économie nationale contre un ennemi pernicieux et surtout très dangereux. L'aspect préventif a été défendu mordicus par Hatem Ben Salem, ministre de l'Education et de la Formation, qui entend sensibiliser les élèves, les lycéens, les étudiants, les parents et le cadre enseignant aux terribles conséquences de la première cigarette. C'est un ministre qui fonctionne à 500 à l'heure. On l'a connu ainsi lorsqu'il était à la tête du ministère du Commerce. Il n'a pas manqué de l'être lorsqu'il était au ministère du Tourisme et, maintenant qu'il est ministre de la Santé, il n'y a aucune raison qu'il change. Mondher Zenaïdi est tout le temps au four et au moulin. Il ne rate rien. Surtout pas ceux qui le contredisent ou le critiquent. Armé d'une batterie d'arguments, il ne demande pas mieux que d'écouter ceux de ses contradicteurs. C'était le cas, la semaine dernière, à la suite de la chronique hebdomadaire de Nizar Bahloul, consacrée au tabagisme et à la communication mise en place pour lutter contre ce fléau. M. Zenaïdi invite le directeur de Business News à lui faire part de ses suggestions et mettre avec lui la main à la pâte dans ce combat national. Pour le ministre, aucune (bonne) idée ne doit être écartée, car le combat contre le tabagisme est notre affaire à tous ! Du coup, c'est sans surprise que l'on retrouve archicomble la grande salle du Laïco, ex-Abou Nawas Tunis, en ce samedi 6 juin 2009, à l'occasion du colloque national contre le tabagisme, organisé sur directives du président de la République et la tutelle de deux départements directement concernés par la lutte anti tabagique, le ministère de la Santé publique et le ministère de l'Education et de la Formation. La plupart des composantes de la société civile étaient représentées : l'OTEF, l'UNFT, l'UTAP, l'UGTT, l'UTICA, Basma, l'Organisation tunisienne des mères, l'Organisation nationale des aveugles, le Croissant rouge tunisien, les Conseils de l'ordre des médecins, des pharmaciens, des dentistes La Charte signée le jour même par ces organismes traduit une volonté ferme de réussir la gageure d'éradiquer le fléau, sinon d'en réduire les méfaits, du moins amener les fumeurs à prendre conscience des menaces auxquelles ils s'exposent. Mondher Znaïdi a animé le colloque de bout en bout. Il a noté que cette conférence vient concrétiser le principe de concertation entre les différents partenaires sociaux concernés dans le but d'approfondir la conscience sur les enjeux nationaux et de mobiliser les énergies pour pouvoir relever les défis notamment dans le domaine de la santé. La décision de faire de 2009 l'année de la lutte contre le tabagisme reflète tout l'intérêt accordé à la santé du citoyen, en Tunisie, et la volonté de le protéger contre les divers dangers. Il a souligné l'importance fondamentale de la participation des organisations et des associations à la lutte contre le tabagisme, à travers les actions de proximité dont la finalité est de convaincre les fumeurs à se débarrasser de ce fléau. Hatem Ben Salem, ministre de l'Education et de la Formation, a mis l'accent sur l'adhésion de la famille éducative à la concrétisation du plan national de lutte contre le tabagisme, surtout que la jeunesse est la catégorie la plus exposée aux dangers du tabac. Le ministre a passé en revue le programme de lutte contre le tabagisme adopté par les différents établissements éducatifs, notamment les campagnes de sensibilisation sur les dangers du tabac, l'exploitation, à cet effet, des moyens de communication dont les radios internes, les affiches et les activités des clubs de santé dont le nombre s'élève à 760 clubs. Dans une improvisation empreinte d'humour et de concision, Salaheddine Dridi, universitaire, journaliste, directeur général de l'Information et président de la commission sectorielle de l'information au Comité national pour la lutte contre le tabagisme, a fait passer un message à la fois simple et fort à l'ensemble des intervenants dans la lutte anti tabac : la communication relève du domaine des composantes de la société civile au travers du contact d'individu à individu, du "corps à corps". L'information appartient aux médias qui ont pour rôle de diffuser sur une plus large échelle les recommandations du tissu associatif et d'essayer de convaincre, grâce à une information pertinente et toujours renouvelée, les 3,5 millions de fumeurs à se départir de leurs mauvaises habitudes. La diffusion de l'information est axée sur les symboles ; comme les cafés et les hammams. Une action énergique est à mener en direction des modèles, en l'occurrence les membres du corps médical qui doivent donner l'exemple en adhérant à la lutte contre le tabagisme. Salem Mekki, président de l'OTEF et président de la commission sectorielle de la société civile, a présenté la stratégie des organisations et des associations nationales pour la participation au plan national de lutte contre le tabagisme, au moyen du renforcement de l'action sur le terrain. Brahim Abderrahim, représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), en Tunisie, a salué les efforts déployés pour la lutte contre ce phénomène dangereux qui est à l'origine de graves maladies et du décès de 8 millions de personnes chaque année, à travers le monde. Mohamed Belaïba, directeur général de la santé publique, a, au début du colloque, présenté les axes de la stratégie nationale de lutte contre le tabagisme, notamment, le renforcement de la prise de conscience et de la sensibilisation, l'intensification des actions sur le terrain, la facilitation de l'accès aux visites médicales de soutien au sevrage contre le tabac, la formation de médecins dans le domaine de la sensibilisation aux dangers du tabagisme et la prise en charge des personnes désirant arrêter de fumer. Dans le même contexte, il est prévu de dynamiser le plan interdisant de fumer dans les espaces collectifs, à commencer par les établissements sanitaires et éducatifs, la mobilisation des organisations et des associations et le renforcement de leur actions sur le terrain. Les artistes ont été de la partie. Comme leaders d'opinion, ils ont certainement un rôle à jouer dans cette lutte contre un fléau qui gangrène la société. Lotfi Bouchnaq a réalisé un clip où il chante la nécessité, voire l'urgence, de couper les ponts avec la nicotine et le goudron qui détruisent le capital humain, cher à la Tunisie. Le chanteur, le compositeur et le parolier ont été félicités chaudement par le ministre de la Santé publique et ont reçu des distinctions. Raouf Ben Yaghlène a présenté, dans un one man show époustouflant, une lettre ouverte à la cigarette qu'il a traitée de tous les noms. Le comique a fait un tour d'horizon sur la relation de l'être humain et de ses dépendances d'un côté et le tabac et son pouvoir tyrannique de l'autre. Il a été très applaudi par la salle. Moncef BEDDA